La ravissante Ronde est une variante de La Ronde.
Le principe est le même : cinq femmes, cinq hommes qui tour à tour vont se rencontrer, se désirer, s’accoupler et se séparer.
1 rencontre 2. 1 s’en va, 2 reste et 3 arrive. 2 s’en va, 3 reste et 4 arrive… 9 s’en va, 10 reste et 1 arrive. Et la boucle est bouclée. Celle qui fait tourner le monde, la ronde du désir et du sexe. Mais le regard de Schwab est plus contemporain, plus distancié. Il s’écarte du réalisme de Schnitzler de plusieurs manières :
Personnages
« Tous les personnages masculins ont des organes génitaux qui se dévissent. Tous les personnages féminins ont des écrous échangeables. »
Le sexe des personnages est un objet. L’acte se fait très vite et sans contact : l’homme dévisse son sexe et le donne à la femme qui le glisse sous sa jupe. Ils s’agitent tout deux, puis elle le lui rend. Pourquoi ? Que veut nous dire Schwab ? Que notre sexualité a perdu sa dimension charnelle, qu’elle s’est déshumanisée ? Que la recherche de plaisir comme nous l’entendions dans le Kâma Sûtra s’est dénuée de toute sensualité et s’est réduite à une succession de fantasmes ? Veut-il renforcer l’idée que la Ravissante Ronde qui fait tourner le monde et la tête des protagonistes n’est qu’une mascarade ridicule, dérisoire ?
Langue
Il faut tout simplement que LA langue inouïe soit fusillée d’UNE langue par décision de la cour martiale.
Schwab invente des tournures de phrases, se joue de nos habitudes de langage, tord la langue dans tous les sens, comme un contorsionniste le ferait pour nous montrer que la déformation est une forme qui se regarde. C’est une langue « hyper » charnue, riche, pleine, qui a peur du silence et qui vient combler le vide dans un trop plein de sons. Il y a là violence, humour et esprit de dérision.
Chaque personnage sera caractérisé par une manière de se mouvoir et de parler qui lui sera propre : du désarticulé à la tension extrême, du minimalisme au maximalisme, du dérisoire au grotesque, du chuchotement au hurlement, de la voix parlée à la voix chantée.
La Ravissante Ronde s’articule autour du vide. Elle se placera dans un grand cabaret scintillant où le strass masque un abime effrayant.
Le plateau sera nu. L’espace vide se remplira des corps, des voix, de cette parole charnue, de cette gesticulation, jusqu’au trop plein. Les personnages seront tous présents pendant toute la durée de la ronde. Ils seront soit protagonistes, soit spectateurs, accessoiristes, éclairagistes des numéros en représentation.
Seules les lumières donneront à imaginer les différents décors. Des couloirs de passages, des ronds de cabaret, des néons une boule à facettes…
Il n’y aura pas de musique à proprement parler, mais des sons stridents réalisés sur le plateau ou qu’on préenregistrera. Par exemple un ballon en plastique que l’on dégonfle en le faisant couiner au moment du coït.
Les costumes seront très distingués. Robes de soirées, pour les femmes. Les hommes seront en chemise, veste et caleçon, pas de pantalon, des chaussures très bien cirées et des chaussettes.
Pour renforcer la dimension dérisoire de la sexualité, les organes génitaux masculins et féminins seront représentés par des objets lumineux qui s’allumeront et tournoieront comme des gyrophares au moment de l’acte. Des lumières cousues sur les costumes à l’endroit des seins clignoteront. Au même instant, les lumières plateaux s’éteindront pour laisser place à ces feux d’artifice.
17 cité Joly 75011 Paris