Résumé des pièces
Note de mise en scène
Dans le cadre des 18èmes rencontres Charles Dullin.
La Fiancée des Landes : Une cabane au milieu des champs abrite les terreurs, la
passion et le drame de Marouchka, dans l'univers étouffant et sauvage de ses proches.
Eveil : Un homme et une femme cernés dans une auberge, résistent à une foule
déchaînée qui se précipite à la porte de leur chambre, prête à tous les crimes
comme à toutes les volte-face.
Deux ans avant la déclaration de la guerre 14-18 et jusquà sa mort en 1915 sur le front russe, August Stramm se met à écrire, intensément, six pièces de théâtre, une correspondance de guerre, plusieurs recueils de poèmes en vers libres, un long poème en prose : le dernier qui apparaît comme prémonitoire : y parle un homme sur le front, et lon entend ses dernières pensées, ses derniers souvenirs, ses derniers sourires et son dernier souffle. Pourtant, il écrivit ce poème avant même la déclaration de guerre. Son écriture semble témoigner dune urgence à dire lindicible, à nommer la violence, à la décrire comme pour mieux la circonscrire et la rejeter dans son néant.
Ce qui me touche dans lécriture de Stramm cest cette intensité dramatique et cette force suggestive qui transpire des mots, des bouts de phrases, toujours très courtes, rythmiques.
Peut-être faudrait-il monter ses pièces comme on exécute une partition musicale. (Hindemith composa dailleurs un opéra avec la pièce Sancta Suzanna en se servant du texte intégral comme livret).
Le choix que nous avons fait ici est plutôt du côté de linterprétation, retransmettre cette force déferlante, cette obsession à dire, à répéter ce qui émerge à la conscience : " Je nappartiens à personne, nous nous appartenons les uns aux autres, femme femme femme, putain, putain, putain, pas ta femme, jamais ta femme... "
Jai eu envie de monter ces deux pièces La fiancée des landes et Eveil parce qu elles parlent des blessures, les nôtres, celles des autres, celles de notre histoire, cela sans discours et sans message, comme un peintre, avec précision et violence, il assène plus des couleurs que des sentiments, nous étale des plaies à vif, des incompréhensions tremblantes, des tranches de peur, de haine, de lamour trop fort pour être supportable.
Stramm écrit sa propre mise en scène, un peu comme la recomposition dun rêve, à peine on parle dun personnage quaussitôt il surgit. Sans arrêt, quelque chose remonte du fond à la surface. Ici, les acteurs se trouvent confrontés non seulement à une écriture théâtrale précise, détaillée, mais aussi à toute une époque qui a connu Meyerhold, le Constructivisme (le metteur en scène Max Reinhardt mit en scène la pièce de Stramm, Forces, en 1921 au Berliner Kammerspiele). Dans cette écriture dénuée de sentimentalisme mais pleine daffects et de pulsions, lessentiel se joue en dehors des mots, lesquels mots claquent, eux, comme le fouet de Marouchka et nous transmettent le vent qui pique, le fleuve qui déferle dans les rues, lamour dun père pour sa fille, la liberté de lhomme qui rêve.
Agnès Delume
Metteur en scène
16, rue Marcelin Berthelot 94140 Alfortville
Voiture : périphérique Porte de Bercy / autoroute A4 direction Metz-Nancy sortie Alfortville.