Mettant en scène des anti-héros d’une tendresse désarmante, Philippe Quesne donne à voir dans La Mélancolie des dragons, un théâtre où les ficelles du spectacle sont démontées au fur et à mesure que la représentation s’élabore. Un discours de la méthode aussi drôle que délicat.
Du Moyen-Âge à Woodstock, les hommes qui ont voulu sauver le monde se sont toujours laissé pousser les cheveux.
Un groupe de hard rockers chevelus, en panne dans un paysage enneigé, présentent à leur unique invitée Isabelle, passée là par hasard, leur projet de parc d’attractions idéal, où leurs inventions, aussi fulgurantes que décalées, font naître le merveilleux.
Si ce spectacle créé en 2008 a fait le tour du monde, c’est que sous son résumé simple, se déploie un véritable questionnement sur l’art. L’effet de théâtre, aussi brut que dérisoire, est le support même de la douce poésie de Philippe Quesne, la dose de folie supplémentaire qui permet de faire décoller le réel. Les expérimentations modestes de ces chevaliers troubadours, ne visent pas à épater la galerie, mais au contraire à créer une communauté bienveillante autour d’œuvres fragiles et temporaires. Loin de tout angélisme, cette pièce fondatrice est traversée par une inquiétude sourde et entre en résonance avec l’état d’un monde que ces anti-héros, ne comprennent pas toujours même s’ils en maîtrisent les technologies. Un théâtre qui célèbre l’inventivité et les pratiques des doux rêveurs, capables d’échafauder des mondes à partir de peu.
« La Mélancolie des dragons respire la nécessité toujours renouvelée de donner du possible, d’ouvrir des mondes, de réinventer des manières d’être au quotidien. Philippe Quesne pose un geste artistique simple et infiniment généreux : mettre à disposition tous les éléments d’une création pour que les personnes en présence, public tout autant que performers puissent participer à l’avènement des choses. » Smaranda Olcèse, Inferno, 9 janvier 2015
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