Du fond de sa cellule, un condamné à mort confie, en un récit âpre et puissant, les coins d’ombre de sa douloureuse existence. A ses mots, se mêlent ceux de l’écrivain narrateur, confondus dans une même révolte, une même « guérilla linguistique ».
De Tafraout à Rabat, en passant par Agadir et Paris, Mohammed Khaïr-Eddine a, durant toute sa vie d’exil et d’errance, fustigé le père, le Roi, les religieux et tout ce qui pouvait représenter à ses yeux l’autorité et l’ordre. Son mal être d’enfance et son mal vivre d’homme en ont fait un mal aimé dont la complainte a ressurgi dans ses livres aux fulgurances incandescentes, avec une rage à fleur de lignes. « Enfant terrible », « écorché vif », les mêmes mots reviennent pour dire la personnalité de ce trublion iconoclaste qui a marqué de ses « encres vives » les lettres marocaines.
Dans le dépouillement de l’espace, Cédric Gourmelon fait entendre la voix et les mots dressés de l’écrivain rebelle. Le propos est là, cru et nu, comme la poésie qui le porte.
Le Déterreur est un « séisme ». Un roman de l’urgence et de l’alarme dont la beauté vénéneuse semble renaître du sordide. L’oeuvre d’un insurgé provocateur, autant dire un complice de Jean Genet et de son Condamné à mort, ce demi-frère, cet « assassin si beau qu’il fait pâlir le jour ».
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