Deux tueurs, Ben et Gus, enfermés dans une petite salle sans fenêtre avec pour seul mobilier deux lits, une table et un réchaud à gaz à pièces, attendent la venue de leur victime. Une attente rythmée par le jeu de va-et-vient d’un monte-plats - assorti d’un bruit sourd et agressif - qui est leur seul lien avec le monde extérieur, un lien absurde et stressant. Petit à petit, la conclusion inéluctable se dessine dans l’opposition qui naît entre ces deux amis : l’affrontement se glisse subrepticement dans les mots lorsque les échanges s’achèvent par l’évocation d’une hiérarchie immuable qui donne raison immanquablement à celui qui dirige.
Puis, lorsque le monte-plats se met en marche, la machine s’emballe. La tension s’accroît, le jeu prend de la vitesse, les mouvements s’accentuent dans l’imminence de la fin, les mots s’endurcissent. Car, plus l’un se recroqueville sur son autorité instituée, plus l’autre questionne, s’interroge et doute du bien-fondé de son action. La finesse du texte est là, efficacement servie par l’interprétation, dans cette critique de l’engagement aveugle parce qu’imposé, et dans la révolte qui s’ensuit et s’amplifie au fur et à mesure que la hiérarchie s’affirme. Une révolte qui ne peut que s’achever dans la douleur et la violence. La fin ne surprend pas, elle n’est pas là pour ça. Elle est au contraire un aboutissement, la conclusion logique de cette réflexion menée sur les rapports sociaux et la conscience humaine : hiérarchie s’accommode très mal du doute et de la liberté critique. À voir donc, et à méditer.
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