Les marges, les à-côtés de la vie et du monde, ce que l'on dédaigne de regarder simplement parce que c'est là, voilà ce qui intéresse Pierre Meunier, poète du théâtre. Le monde qui nous est imposé à coup d'agression télévisuelle ou autre n'est pas nécessairement celui où l'on voudrait vivre. Sous le signe d'Henri Michaux, Pierre Meunier se penche sur ceux qui “n'ont pas retenu la leçon”, qui “n'ont pas vu les panneaux”. Ce sont les “égarés”, ceux qui ne peuvent pas être comme tout le monde.
Sommés que nous sommes de ressembler à quelque chose.
Avant même de naître. Déjà.
Pourquoi vouloir chercher autre chose, quand les modèles sur mesure qui nous sont offerts nous épargnent toute peine, toute réflexion inutile.
Modèles normalisés, accessibles à tous...
Ça vous croche en dedans, il n’y a plus qu’à se laisser faire.
Si l’essentiel vous manque, oubliez qu’il existe, on vous y aidera.
Les Egarés n'ont pas retenu la leçon, ils n'ont pas vu les panneaux...
Des rêveurs blessés. Ils sont cinq, trois hommes et deux femmes, sur scène. Ils nous font face. Au lointain, un marteau pilon, puissance frappante. Les Egarés vont affronter la brutalité, l'acharnement à aplatir, à anéantir, à nier la diversité. Ils vont lutter contre ce qui voudrait les isoler, les dresser l'un contre l'autre. Le théâtre, dernier lieu public où leur présence soit tolérée, mais pour combien de temps encore ?
Pierre Meunier, auteur, metteur en scène, comédien et circassien, a travaillé trois années durant, en ateliers d'écriture, avec des patients de l'hôpital psychiatrique de Ainay-le-Château, dans l'Allier. Pierre Rotenberg, philosophe et écrivain, était l'un d'entre eux. Touché par ce que ces hommes blessés, "marins privés de haute mer", assomés de médicaments, sont parvenus à produire, Pierre Meunier a eu envie de faire entendre ce qu'ils peuvent nous apporter. Il ne faudrait parfois pas grand-chose pour basculer de leur côté.
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