Déconseillé aux moins de 16 ans.
« Quand l’homme qui s’appelait Harry fit la connaissance de Charlotte Rittenmeyer, il était interne dans un hôpital de la Nouvelle-Orléans ». C’est le jour de son anniversaire. Leur rencontre est la mise à feu d’une bombe, ou plutôt elle en est déjà l’explosion. Il a vingt-sept ans, elle en a moins de vingt-cinq. Harry n’a jamais connu l’amour, s’étant voué corps et âme à ses études ; Charlotte est mariée, a deux petites filles. À sept ans, elle est tombée dans les flammes, elle en porte encore les cicatrices. Pourquoi lui-dit elle cela, à lui, dès la première fois ? Pourquoi cette intimité immédiate qui claque comme un coup de feu ? Est-ce qu’elle-même le sait ? Elle pratique la sculpture parce qu’elle aime faire « des choses qu’on peut toucher, qu’on peut prendre, des choses qui pèsent dans la main, dont on peut regarder l’envers, qui déplacent l’air et qui déplacent l’eau, et si vous les laissez tomber, c’est votre pied qui se brise et non la forme de l’objet ». Quelques jours plus tard, Charlotte Rittenmeyer quitte tout au nom de son amour pour Harry ; Harry Wilbourne interrompt son internat de médecine pour s’enfuir avec Charlotte. Ainsi commence – ligne de fuite, fuite en avant, avant-goût de la mort – une course à l’abîme qui va en quelques mois pousser le couple de La Nouvelle-Orléans à Chicago, puis « dans le Wisconsin et à nouveau à Chicago, en Utah et à San Antonio et de nouveau à La Nouvelle-Orléans », d’un chalet au bord d’un lac à une cabane perdue dans les neiges près d’une mine à demi abandonnée, jusqu’à un bungalow au bord de la mer, traversé par le bruissement du vent dans les palmiers sauvages...
La règle des amants : s’attarder quelque part mais ne jamais s’installer, ne jamais renoncer au mouvement perpétuel. La seule chose qui importe, celle à laquelle il faut tout sacrifier, c’est de se tenir ensemble dans l’amour, sans autre demeure. Charlotte et Harry ne veulent rien posséder – rien, à part leur désir dévorant l’un pour l’autre. Pour eux, le lien qui les unit doit se vivre comme un arrachement de chaque instant à tous les pièges de la respectabilité. L’un des dogmes de leur credo passionnel pourrait s’énoncer : il ne faut surtout pas que l’économie domestique... Charlotte se jette sans réserve dans l’aventure ; Harry, lui, se débat avec les démons de la norme. L’amante entraîne l’amant avec elle, à corps perdu, comme en un creuset où se consumer ensemble pour fondre le métal de l’utopie. Harry finira par apprendre (car ce voyage est aussi initiatique) qu’il n’est pour eux pas de retour possible. Et pourtant, en attendant de parvenir au point final, il faut bien vivre – il faut trouver le moyen de fournir ses conditions de subsistance à cette sauvage œuvre-vie qu’est un tel amour, alors même qu’il se veut inconditionnel, aussi absolu que la mort. Mais comment ?
Qu’aime-t-on encore de l’autre quand on attend de l’amour qu’il soit à ce point exclusif ? « Est-ce qu’à force d’aimer l’amour, on ne finit pas par oublier d’aimer l’autre ? Est-ce qu’une passion vécue comme une œuvre d’art n’est pas une entreprise solitaire, vouée à l’échec ? » C’est à la lumière de ces questions que Séverine Chavrier a porté à la scène cette œuvre déchirante où Faulkner dresse un « bilan introspectif et rétrospectif » des rapports entre œuvre et vie, ambition créatrice et désir. Tendant son oreille de musicienne, elle a discerné et réinventé le bruit et la fureur du grand romancier, les différentes strates vocales de ses créatures noyées dans les rumeurs du vent ou de la mer, leurs cris de jouissance nue, leurs murmures enfantins, et jusqu’aux intuitions presque silencieuses où s’ouvre pour chacune d’entre elles, au bord du mystère, « cette possibilité d’être un instant voyant, lucide, écrivain ».
Créée au Théâtre de Vidy à Lausanne, présentée fin 2014 au Nouveau Théâtre de Montreuil, sa superbe adaptation a séduit le public et la critique.
Adapté du recueil de nouvelles de William Faulkner Si je t'oublie Jérusalem.
Déconseillé au moins de 16 ans.
« Tout en suivant un découpage classique en trois actes, la metteuse en scène, Séverine Chavrier fait basculer ses acteurs d'une scène à l'autre comme on navigue en haute mer, dans de claquements de vents et des flashs de lumière et sans gilets de sauvetage. C’est un spectacle déchaîné qu'elle conduit. Egalement musicienne, elle fait de cette passion un tsunami sonore et visuel, épaulée par le travail remarquable du scénographe Benjamin Hautin, de l’éclairagiste David Perez et du créateur sonore Philippe Périn. » Véronique Klein, Mediapart 8 décembre 2014
« Séverine Chavrier démontre une vraie singularité : une façon de hacher menu les grands textes pour en extraire l'essence, de mixer au plus près humour et tragédie, de concevoir et d'habiter des espaces chaotiques et beaux. » Philippe Chevilley, Les Echos, 6 juin 2016
Mise en scène incroyable, textes magnifiques poétiques, émouvants. A voir, écouter absolument
Chapeau les interprètes pour cette pièce délirante !!!!
Pour 2 Notes
Mise en scène incroyable, textes magnifiques poétiques, émouvants. A voir, écouter absolument
Chapeau les interprètes pour cette pièce délirante !!!!
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