L'histoire
Extrait
du chant La Maison Paternelle : Casa Paterna
Notes de mise en scène
A propos de Toussainte…
Extrait de la chanson du Coucou : A Canzona di u cucu
Sur le chemin de Toussainte…
Extrait du chant Le Rosier : U Rusulaghju
Extrait du chant La mort de Lucie : Morte di Lucia
Extrait du chant Le Maudit : U Malcuncigliu
Lettres… extraits…
1920, la Corse porte le deuil de ses fils tués pendant la Grande Guerre. Toussainte a vingt ans. Elle quitte son village avec un brevet élémentaire en poche pour rejoindre sa sœur et son beau-frère au Maroc, où elle deviendra institutrice ...
À travers la correspondance qu’elle adresse durant toute sa vie d’exilée à son frère Jean, nous partageons ses joies et ses peines, ses contradictions, ses surprises et ses révoltes.
Sous nos yeux, cette jeune fille devient femme, épouse, mère, prend la vie avec courage et la comprend peu à peu.
Nous traversons avec elle la Grande Histoire, celle de la colonisation puis de la décolonisation, la Guerre de 39-40, jusqu’en 1975, année des évènements d’Aléria, date clé de l’histoire insulaire.
Ce texte raconte l’histoire d’une vie simple qui tient à un fil mystérieux, indestructible, celui qui relie une femme corse à son île, où qu’elle soit dans le monde.
E in mi ne so pensosa
Dopo ave passattu un ora
Sentu un langgu pietosu
Dicendi si discia fora
Ne ripigliu la stradella
E tinamenta ch’in l’aghjiu in vista
Mi rigingù versu ella
Torna sola
E ancu più trista
Après avoir passé une heure
J’entendis une plainte
Me disant tu es déjà dehors.
Je repris la ruelle
Regardant la maison
Jusqu’à ce qu’elle disparaisse à mes yeux
Je m’en retournai seule
Et encore plus triste
1920, la Corse porte le deuil de ses fils tués pendant la Grande Guerre. Toussainte a vingt ans. Elle quitte son village avec un brevet élémentaire en poche pour rejoindre sa sœur et son beau-frère au Maroc, où elle deviendra institutrice... Grâce à la correspondance qu’elle adresse durant toute sa vie d’exilée à son frère Jean, nous partageons ses joies et ses peines, ses contradictions, ses surprises et ses révoltes. Sous nos yeux, cette jeune fille devient femme, épouse, mère, prend la vie avec courage et la comprend peu à peu. Nous traversons avec elle la Grande Histoire, celle de la colonisation puis de la décolonisation, la Guerre de 39-40, jusqu’en 1975, année des évènements d’Aléria, date clé de l’histoire insulaire. Ce texte raconte l’histoire d’une vie simple qui tient à un fil mystérieux, indestructible, celui qui relie une femme corse à son île, où qu’elle soit dans le monde.
Marie-Catherine Conti
Le regard que porte Nadine Fischer sur Toussainte, née avec le siècle, au travers d’elle sur la Corse et son histoire, est bouleversant par ce qu’il a de précis, de généreux; ce regard est porté sur une femme en exil, d’abord au Maroc puis au Vietnam. La correspondance, contrairement au journal intime, s’adresse à l’autre; la présence de l’autre - ici celle de son frère Jean - est constante; le spectateur reçoit les lettres comme si elles lui étaient adressées, en plein cœur.
Il s’agit bien d’un spectacle. Marie-Catherine Conti et Mimi Allegrini prêtent leurs âmes à ce flot de vie; la sobriété et la justesse du jeu, des voix, la qualité de l’écriture ont touché le public venu nombreux partager l’histoire de Toussainte à sa création, lors des deuxièmes Rencontres Théâtrales de Haute Corse et même au-delà puisque des représentations supplémentaires ont dû être organisées afin de répondre aux demandes non satisfaites pour cause d’affluence. Ce spectacle avait tout naturellement sa place dans une programmation qui se veut fidèle en contant les racines et l’histoire du peuple corse tout en étant résolument ouverte sur le monde. Toussainte est tout cela à la fois, elle est emblématique. Ce spectacle a ponctué les Rencontres 1999 par sa force et sa vérité. Souhaitons que d’autres représentations aient lieu permettant ainsi à tous ceux qui croient en l’avenir de la Corse de retrouver, à travers les déterminations et le courage de Toussainte, l’optimisme et le goût de la paix.
Robin Renucci
Quandu sbarconu li grechi A furassi lu ruggone Fù lu cucu ai lu cantu Chi sono lu ratachione E lu corsu independante Si batti cume un leone
Quand les grecs débarquèrent Pour occuper le pays Ce fut le coucou avec son chant Qui sonna le ralliement Et le corse indépendant Se battit comme un lion
« Une femme traverse son époque et regarde le monde qui l'entoure avec en point de ralliement constant la Corse, terre lointaine et aimée qui ne se laisse jamais oublier. En offrant ainsi le récit de son existence, elle se fait l'écho d'une autre histoire, la Grande, celle de la colonisation puis de la décolonisation, la guerre de 1939-40 jusqu'aux années 1975. Touché en plein cœur, le spectateur sort ébranlé du parcours singulier de cette jeune femme, future épouse, mère et grand-mère interprétée par une Marie-Catherine Conti bouleversante… » Scène Nationale d'Angoulême - Joël Gunzburger
« J’ai coutume dans le cadre du festival de Sarlat de proposer parmi les « Petites formes » un certain nombre de textes non théâtraux mis en théâtre. Cette année-là, j’ai programmé «
Les lettres de Toussainte ».
Bien qu’ayant lu les textes de Nadine Fisher, et connaissant l’exigence talentueuse de Marie-Catherine Conti, je craignais que le succès en Corse ne soit lié à un phénomène d’identification, et que le spectacle ne soit difficilement « exportable ». Mais j’ai assisté à Sarlat, en organisateur euphorique, à l’écroulement de mes inquiétudes.
Le texte de Nadine Fisher, mêlant avec intelligence et sensibilité le destin individuel au destin collectif, permet à tous de trouver ses références dans ce survol sensible du siècle. Les liens entrecroisés des petites histoires avec la Grande touchèrent les spectateurs du festival, quelles qu’aient été leurs origines sociales ou culturelles. L’histoire de cette femme dépassa de loin l’exotisme régional, pour s’affirmer comme un vrai moment de théâtre. Un de ceux où la rencontre entre un texte, des interprètes et le public transforma ceux qui y ont participé. »
Festival de Sarlat - Jean-Paul Tribout
Corta hè a vita
Pochi so li mumenti
Di vera alicria
E di benistà
Scialemu ci la è cuddemu i rosuli
Rosuli di a vita
Dumanu pò cambia
Pò cambia
La vie est bien courte
Rares sont les moments
De véritable joie
Et de bien-être
Vivons pleinement et cueillons les roses
Les roses de la vie
Demain ça peut changer
Ça peut changer
Cum’hè chellu si po more
S’è sopessi qualchi breve
O Lucia per fà ti vulta
Ma in me caghja la neve
Comment peut-on mourir
Si je savais quelque incantation
O Lucie pour te faire revenir
Mais en moi se fige la neige
Tu si l’alberu di lume
Chi camini in la muntagna
Tu si lu tonu e lu fiume
E lesia chi canta pianu
Tu si gioia o tristezza
Ma cun te mi maravigliu
So nata in lu to dolcezza
Fratellu miù
Tu es l’arbre de lumière
Par les chemins de la montagne
Tu es le tonnerre et le fleuve
Et l’esia qui chante doucement
Tu es joie et douleur
Mais avec toi je m’émerveille
Je suis née dans ta fureur
Mon frère
Marseille, 18 septembre 1920
Mon cher frère,
Le bateau de la compagnie Paquet qui fait la ligne Marseille - Casablanca, via Rabat, ne part que dans deux heures alors j'ai le temps de t'écrire mon Jean...
Casablanca, 12 novembre 1923
Tu me dis, mon cher frère de me bien conduire. Tu me connais assez pour savoir que je ne ferai jamais rien de contraire à notre honneur.
Fez, 2 décembre 1926
Mon cher frère,
Je suis si fière que, en grandissant, Sébastien te ressemble chaque jour davantage... Je t'écris dans la chambre des enfants à côté de mon tout petit Lissandre…
Il m'est venu une idée qui m'effraie et dont j'ose à peine te parler. Dis-moi... En donnant naissance à un enfant, en même temps que la vie ne lui donne-t-on pas aussi la mort? ...
Ventosa, 4 Août 1932
Ma chère Lucie,
12 ans que je n'étais pas rentrée ! ...
Dès que j’ai senti l'odeur du maquis en arrivant à Ajaccio, j’ai eu la sensation de n'être jamais partie... La vie s'est passée ailleurs... Si loin... Mais moi, j'étais tout entière à Ventosa... Dans mon île... J'avais si peur que tout ait changé au village et rien n'a changé... sauf les disparus..
Hanoï, 8 Mai 1954
Mon Jean,
Eh bien voilà ! Je pense qu'il n'y a plus beaucoup de place pour moi en Indochine. Comme tu dois le savoir par la radio, Dien Bien Phu est tombée hier.
Ventosa, 14 Mai 1975
Ma petite chérie,
Tu vas être étonnée de recevoir une lettre de ta grand-mère. Mais j'ai deux ou trois choses à te dire... Qu'on ne peut dire au téléphone... Surtout quand on sent qu'on va bientôt mourir - excuse-moi d'être un peu solennelle - Ne sois pas triste, je ne le suis pas…
Adieu mon petit cœur. Je t'aime…
Toussainte Ottavi
6, rue Pierre-au-Lard 75004 Paris