Douze monologues, douze portraits de femmes musulmanes, tantôt drôles, tantôt poétiques, tantôt poignants, tantôt tendres… et toujours émouvants. A travers l’intimité de ces femmes, un regard inédit, sans voyeurisme ni tabou.
Sur scène, quatre comédiennes ouvrent une fenêtre sur des itinéraires contrastés où les joies, les peines, la sexualité, la jouissance, l’amour, les interdits, les contraintes traditionnelles et familiales s’entremêlent. Entre culture d’origine et pays d’accueil, l’identité multiple se construit dans la contradiction, à la fois porteuse de conflits et d’enrichissement.
Tiraillées entre les pressions et leur volonté d’émancipation, la chape du conservatisme et leur soif d’expression, le déterminisme culturel et leur désir de libertés, ces femmes inscrivent leurs destins dans un « entre-deux je » permanent. Débarrassés des clichés, mais sans naïveté, les récits foisonnants délivrent un témoignage unique et bourré d’humour sur la quête de soi des femmes musulmanes dans les sociétés occidentales.
Partir à la découverte de l’autre, démonter les « a priori », se comprendre enfin, c’est ce qui guide toute ma vie. D’abord il y a eu ce documentaire sur le pouvoir des femmes que je tournais en Afrique il y a neuf ans et cette femme malienne qui me disait « Il y a toujours quatre personnes présentes dans tout dialogue. Il y a vous, il y a moi, il y a la personne que je fais de vous et la personne que vous faites de moi. »
Puis cinq femmes marocaines qui m’avaient approché pour diriger une sorte d’atelier théâtral. Dans ma cuisine, nous parlions de tout et de n’importe quoi, de travail, de hammam, de maternité, de pubis, d’intégration, d’intégrisme. J’ai alors perçu que ces femmes étaient tiraillées entre leurs valeurs traditionnelles et nos valeurs européennes, des femmes qui avaient découvert l’Europe par nécessité économique, et qui avaient été confrontées de manière abrupte à une double perception culturelle du monde. Celles que nos sociétés stéréotypent dans une culture « double » , celles dont on a peur parce que faute de connaître leur culture, on la fantasme...
C’est là qu’est née l’idée des Monologues voilés. Je voulais partir à la rencontre de ces femmes musulmanes de la première ou de la seconde génération de l’immigration. Rencontrer ces femmes musulmanes d’origines, d’âges et de milieux divers, des Marocaines, des Turques, des Egyptiennes, des Somaliennes. J’insiste sur « milieux divers » parce que nous avons tendance à contingenter la femme musulmane dans un quart-monde socio-économique.
J’ai demandé à toutes ces femmes de me parler de leur relation au plaisir, à la tradition, au Coran, au viol, à la maternité, à l’homosexualité, à la circoncision, au désir… Je voulais démontrer par le théâtre les a priori que les cultures de tous bords peuvent avoir respectivement l’une envers l’autre.
Je n’ai pas fait ce spectacle pour faire dire aux femmes musulmanes ce qu’elles disent ou pensent tout bas… elles ont le hammam pour ça. Non, j’ai créé avec elles les Monologues voilés pour ouvrir les portes du dialogue.
Adelheid Roosen
15, rue Blanche 75009 Paris