" J'ai choisi le domaine de la douleur et de l'ombre comme d'autres celui du rayonnement et de l'entassement de la matière. " Antonin Artaud
Cette lecture musicale sur la correspondance d’Artaud s’oriente particulièrement sur son amour pour Génica, sa maladie, sa jalousie, sa folie…
" Là où d'autres proposent des oeuvres, je ne prétends pas autre chose que de montrer mon esprit " , écrit Artaud, " le poète maudit " , en préambule de L'ombilic des Limbes. Et posant cela, il dit toute l'essence de son oeuvre et de ses poèmes. Anarchie, désordre, délire et surtout quête de lui-même, de l'esprit et de la réalité. L'impossible harmonie entre son corps et sa pensée et la difficulté à trouver le sens de l'être le conduiront à être interné pendant 9 ans en hôpital psychiatrique (notamment à Rodez où il subit les électrochocs dans les années 40).
Refusés initialement en 1923 par Jacques Rivière directeur de la NRF avec qui il échangera une correspondance riche, ces poèmes ne sont pourtant pas l'oeuvre d'un fou mais celle d'un homme qui va au bout de lui-même, pousse le questionnement jusqu'aux derniers retranchements, jusque dans ses limbes. Il invente une " poésie mentale " , presque psychotique et obsessionnelle, inspirée des idées surréalistes où l'humanité jaillit à vif, gangrenée par la douleur et la rage face au mystère de l'incarnation.
Il se livre ainsi à des descriptions aigues de la douleur interne qu'il ressent, de son " effondrement central de l'âme " , de " l'érosion à la fois essentielle et fugace de la pensée " . Il utilise pour cela des approches à la fois cliniques, poétiques et quasi philosophiques.
Son écriture est cathartique, il va démultiplier les efforts pour mettre des mots sur l'indicible et se heurter à ses limites tout en déployant une précision lexicale rare sur la souffrance humaine.
Lecture à partir d’extraits d’Œuvres d’Antonin Artaud - Editions Gallimard.
1, place Charles Dullin 75018 Paris