On se connaît

Vitry-sur-Seine (94)
du 22 au 23 juillet 2000

On se connaît

Nous sommes en l’an 2000. J’ai 22 ans. Je me lève, allume l’ordinateur, consulte mon e-mail, sors acheter des cigarettes, croise mon voisin de palier dont je ne connais toujours pas le prénom, achète le journal pour y lire que Pinochet prend des vacances au bord de la mer, je suis en retard (déjà). Aller vite, ne pas regarder derrière, ne pas regarder autour : pas de temps et puis ç’est effrayant.

Manifeste
Pièce en douze tableaux pour dix comédiens et une télé
Un espace double, deux espaces isolés
Mise en " jeu ", mise en mouvement
La Compagnie

Manifeste

Dialogue entre amis

- Tu vas à Avignon cet été ?
- Non, à Vitry.
- Ah ? T’as d’la famille là-bas ?
- On peut dire ça.
- Mais Avignon, vous le faites pas ?
- Non.
- T’as tort.
- Ah ?
- Ouais ! C’est quand même le must du must !
- Ah ?
- Ouais ! C’est vraiment le top de l’art ! C’est là où il faut aller pour être vu !
- Et vous jouez où ? ...Pour être vus.
- Ben... Y restait les chiottes du Palais alors on a dit : Banco !
- Ah.
- Ouais. Super, non ?
- Combien ?
- Cinquante mille.
- Ah.
- Ouais !
- Tu connais Vitry ?
- Le sud, c’est ça ?
- C’est ça. À dix minutes de Saint Michel. Soleil garanti tout l’été. Plage de pavés. Transat. P’tit coin repas-concert sous les arbres et puis y a une grande gare désaffectée avec cinq ou six salles de spectacle.
- Ah ?
- Ouais ! " Le must du must ". De la danse, du théâtre, de la vidéo, de la musique tout l’été.
- Ah.
- Ouais.
- ... Mais c’est une manifestation ?
- On peut dire ça. Une manif qui dure trois semaines.
- C’est louche ton truc... Faut adhérer à un parti ou un truc dans l’genre, non ?
- Non. Tu ne vas pas à Avignon. Tu vas à Vitry. C’est tout.
- Mais... quand même Avignon...
- Tu sais, gars, à un moment, dans sa vie, faut choisir entre les chiottes et les pavés, tu vois ?
- Vitry, tu dis ? ...

Pièce en douze tableaux pour dix comédiens et une télé

Nous sommes en l’an 2000. J’ai 22 ans. Je me lève, allume l’ordinateur, consulte mon e-mail, sors acheter des cigarettes, croise mon voisin de palier dont je ne connais toujours pas le prénom, achète le journal pour y lire que Pinochet prend des vacances au bord de la mer, je suis en retard (déjà), je prends le métro parce que le bus c’est trop lent, bon, il y a des clochards, mais " désolée, pas de temps, ni d’argent ", mais je ne les regarde plus, j’ai l’habitude, je vais travailler dans un restaurant (il faut vivre) où je cours pour servir des clients, trop pressés pour dire bonjour ou merci, je rentre vite m’affaler devant la télé et regarder les infos en continu sur LCI, nouveau massacre en Tchétchénie… je téléphone à Constance parce que je n’ai pas encore parlé à quelqu’un aujourd’hui, trop fatiguée pour surfer sur le net, je m’endors.

Aller vite, ne pas regarder derrière, ne pas regarder autour : pas de temps et puis ç’est effrayant.

ON SE CONNAÎT ? c’est une furieuse envie d’arrêter la course, de braver ces lois modernes, de les montrer, de les dire, d’en rire peut-être… Une absolue nécessité de DIRE notre détresse, notre impuissance, notre désir de dialogue, d’échange, notre besoin de poésie…

Parler, raconter notre monde, comme on le voit, comme on l’aime et comme on le déteste, ses règles et ses rêves.

ON SE CONNAÎT ? c’est mon histoire, notre histoire. Acteurs d’une société consommatrice, multimédiatique, spectateurs, somme toute indifférents, de ses dérives… et vice-versa !

ON SE CONNAÎT ? c’est un regard que l’on porte sur soi, un regard que l’on porte sur l’autre, un regard sur le monde, un regard dur, mais empreint de drôlerie, à la fois tendre et cynique…

" Il m’est difficile aujourd’hui de croire à un monde rempli de vivants, difficile de croire que nous pouvons être heureux d’être là pour être là.

Il n’y a pas longtemps, j’avais la vision qu’on prenait tout le monde sur une énorme photo et au-dessus était inscrit : " une bande de cons ". Et puis en regardant bien, j’y ai vu ma tronche. Sortons de la photo de famille. Famille déçue, absorbée de troufignoleries, le regard mort et la bouche pleine de justice, égalité, fraternité, humanité.

Je veux encore croire que nous sommes fous, maladroits dans l’art de vivre et non pas des hypocrites condamnés à être des crétins. "

Véronique DUMONT

Un espace double, deux espaces isolés

L’idée est de créer, d’installer un lieu de " re-présentation " qui soit à la fois un espace divisé : celui de la confrontation et un espace commun : celui du dialogue.

Deux espaces isolés : d’un côté, les spectateurs, de l’autre, les acteurs. Les uns regardent les autres.

Un espace double : les spectateurs sont tour à tour spectateurs et acteurs, les acteurs, tour à tour acteurs et spectateurs. On se regarde, on s’écoute.

Tout au long du spectacle, se succèdent tableaux de la vie quotidienne (les transports, soirée, entre amis…) et faits divers annoncés par un média. En plaçant l’élément média (télévision ou comédien dans le rôle d’un journaliste) dans le public, on peut établir un premier lien entre les deux parties et aboutir peut-être à un questionnement.

Les spectateurs seront spectateurs d’un jeu : celui de la vie quotidienne et acteurs d’une réalité médiatisée, inversement pour les comédiens.

Lequel des deux spectacles a une action sur ses spectateurs ?

À l’heure où l’on peut poser la question de la réalité de tout fait médiatisé (tant on y est indifférent), peut-on être sensible à un objet artistique qui transcende ou décale une réalité quotidienne ?

Mise en " jeu ", mise en mouvement

Le décalage s’établira par la signification du jeu, la distanciation : dans l’interprétation et dans la chorégraphie.

Nous travaillerons à partir d’improvisations, d’exercices sur le clown, sur le bouffon pour créer des personnages de la vie quotidienne sans s’inscrire dans un réalisme ou un naturalisme du quotidien. Chaque comédien interprètera plusieurs personnages et signifiera, marquera la prise en charge d’un personnage par l’apport d’un accessoire particulier au personnage en question (ou par un autre procédé à définir).

Dans la même optique, nous travaillerons sur le mouvement avec une chorégraphe. Dans un premier temps, le travail chorégraphique sera parallèle à la création des personnages : travail du corps, du mouvement par rapport à un personnage.

Puis nous travaillerons sur le mouvement du spectacle en lui-même : la chorégraphie, le mouvement de chacun des tableaux, toujours dans le souci de s’éloigner de ce qui serait une peinture naturaliste de notre vie quotidienne.

La Compagnie

La compagnie DU ZIEU DANS LES BLEUS a été formée en octobre 98 à l’occasion de la création de LARME BLANCHE, spectacle autour de textes de Joël Jouanneau, Michel Azama et Eugène Durif, conçu et mis en scène par Nathalie Garraud. Il est repris, avec l’accord des auteurs, en avril 99 à l’École Spéciale d’Architecture, puis en Gare au Théâtre à Vitry-sur-Seine pour "Nous n’irons pas à Avignon" en juillet 99.

La compagnie participe en septembre-octobre aux "Petit, petit, petit 99" (4ème rencontre de théâtre au m2) en Gare au Théâtre à Vitry-sur-Seine : création de DOUX VIENT LE VENT de Thomas Bompard (mise en scène Nathalie Garraud).

À la demande de l’association La Page Blanche, la compagnie a présenté, en janvier 2000, au Festival "Les femmes et les enfants d’abord" au Théâtre des Songes la création d’une pièce d’Agathe Poirier : PETITE HISTOIRE (mise en scène Nathalie Garraud).

La compagnie travaille en ce moment à la création de deux spectacles : HALEINE MATINALE, pièce chorégraphique pour 4 danseurs, un comédien et un violoniste (argument et chorégraphie Aymeric Guiluy).

ON SE CONNAÎT ?, pièce en douze tableaux, pour dix comédiens et une télé, d’Agathe Poirier.

Le travail est axé sur la recherche de nouvelles formes : écriture, scénographie, chorégraphie, interprétation…Quels langages artistiques utiliser, inventer en parallèle à l’évolution de notre société, de ses modes de communication et de fonctionnement ? Quel dialogue établir et comment ?

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Informations pratiques

Nouveau Gare au théâtre

13, rue Pierre Sémard 94400 Vitry-sur-Seine

Accès handicapé (sous conditions) Bar Grand Paris Val-de-Marne
  • RER : Vitry-sur-Seine à 70 m
  • Bus : Vitry RER à 132 m, République - Vaillant Couturier / Vitry-sur-Seine Gare à 218 m, Gabriel Péri à 340 m
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Plan d’accès

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13, rue Pierre Sémard 94400 Vitry-sur-Seine
Spectacle terminé depuis le dimanche 23 juillet 2000

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