Une histoire loufoque
L’aventure Pœub
Une comédie épique
Extrait
C’est l’histoire débridée d’un patron de café irlandais qui tue le chef de la police locale, devient son remplaçant, se lance dans une conquête territoriale calamiteuse et revient at home, piteusement vêtu d’un tonneau, pour devenir bouffon dans son ancien bistrot. Raconté ainsi, ça a l’air plutôt loufoque… et ça l’est vraiment !
Valletti est le digne héritier d’Alphonse Allais, de Raymond Queneau et d’Eugène Ionesco. Un auteur atypique, cocasse et inventif, qui désarticule le langage et dit tout et son contraire à la fois.
Gérard Charut
Le texte de Pœub précédé de Un cœur attaché sous la lune est paru aux Éditions L’Atalante, Nantes, 2002.
Monsieur Globul, patron du pœub, est amené par inadvertance à tuer d’un seul coup de clé à molette le redouté Clarb Brentanos. Propulsé ainsi chef de la station Sept, il se retrouve impliqué au milieu d’une conflagration mondiale. Après une fuite éperdue à travers les horreurs de la guerre, ayant tout perdu, il décide de retourner dans son ancien bar-restaurant. Mais pendant son absence sa femme et associée Lydia a cédé le bouge à la collectivité. Il ne reste plus qu’une place à pourvoir, celle d’ambianceur. Clown, quoi. Ben, pourquoi pas ?
Pœub est une pièce monstrueuse :
Parce qu’elle a besoin pour vivre de plus de soixante personnages.
Parce qu’elle se déroule sur une année entière.
Parce qu’elle se passe dedans, dehors et partout.
Parce qu’elle est à la fois comique et douloureuse.
Parce qu’elle est à la fois tragique et ironique.
Se mettre dans l’idée d’organiser la création sur une scène de théâtre de cette pièce est en soi une aventure. Je suis heureux que ce soit Michel Didym qui s’y attelle. D’abord parce que l’aventure, il sait ce que c’est et ça ne lui fait pas peur. Et Globul n’a pas besoin des peureux ! Parce qu’aussi nous commençons à avoir une certaine complicité : à travers sa mise en scène de Et puis, quand le jour s’est levé, je me suis endormie où il a su guider et conseiller Christiane Cohendy avec une grande justesse, à travers aussi son travail en Colombie et au Venezuela de El sol se levanto, Léopoldo !
Enfin à travers ce qu’il est, c’est-à-dire quelqu’un capable de créer le tourbillon autour de lui sans pour autant y sombrer lui-même à la stupéfaction de tout le monde. Alors allons-y ! Partons avec Globul, Lydia, Clirquette, Nordinn, Elyette et bien d’autres à l’abordage des scènes françaises et, qui sait, peut-être internationales. En chantant, bien sûr, comme dans toute tragédie qui se respecte !
Serge Valletti, mars 2004
Il y aurait beaucoup à dire sur cette pièce de Serge Valletti, Poeub. A commencer par ce titre, qui s’offre d’emblée, comme une énigme à résoudre. Porter la pièce à la scène, au plateau, cela veut dire tracer dans cette énigme un chemin qui doit prendre en compte non pas l’intention de l’auteur, mais ses mille et une intentions. Celles qui sont évidentes, flagrantes, et les autres, plus latentes. Celles qui crèvent l’oreille, et les autres, plus sourdes.
Cela veut dire que dans le titre, Poeub, il y a ce oe, le oe du noeud, du coeur, de l’oeuf, qui pose problème et qui se fait entendre, qui sonne et résonne, comme la langue de Valletti, une langue à déployer dans l’espace. Il faut alors s’aventurer entre le o et le e pour y trouver, sans doute, l’histoire d’un homme, nommé Globul, qui, du printemps à l’été, de l’été à l’automne, de l’automne à l’hiver, accomplit un trajet singulier, initiatique. Ce sont les quatre saisons d’un individu, de sa naissance à sa maturité, de son éclosion à sa chute, et peut-être bien, si l’on poussait plus loin la métaphore, de sa vie à sa mort. Cet homme, Globul, est bistrotier ; patron de pub. Petit bonhomme sans envergure, exemplaire sans gloire du citoyen grincheux, que le hasard, mêlé de volonté, va propulser sur les routes du monde et dont l’histoire, avec un petit h, va croiser l’autre histoire, celle avec un grand H.
Par un concours de circonstances ahurissantes, que le seul caprice de l’auteur met en place et légitime, Globul tue un homme, Clarb Brentanos, un gars plutôt douteux, plutôt mafieux, dont il va prendre la place, accédant brutalement à un poste de leader. Il est propulsé chef de la station 7. Glissements progressifs de la fable : un individu lambda devient responsable politique, exerçant le pouvoir dans une société en crise, dont on perçoit, par à coups, les déroutes. Glissements progressifs de l’anecdote vers la fable, construite à vue, qui s’élabore.
Inutile de chercher à comprendre le pourquoi du comment. Les évènements qui éclatent en rafales dans la pièce de Valletti ont cette force inégalable de l’imaginaire en marche. Ce sont les paroles qui les créent, et non une logique rodée à toute épreuve. Ce sont les scènes qui accouchent des scènes, par la seule vertu des mots, la seule puissance de l’écriture, l’irréductible indépendance d’une langue qui vagabonde en toute liberté et s’affranchit des règles de la convention. La pièce de Valletti est exemplaire de ce point de vue. Seule la fiction fait loi. C’est un matériau à saisir, une matière à pétrir. Une matrice qui appelle le jeu, sollicite les corps, les voix, les acteurs, les attend, les réclame, exige le plateau pour s’épanouir à son aise dans un espace à définir. Une chose est sûre, cet espace est celui du théâtre. Pas un autre.
Dans le pub de Globul, lieu propice aux histoires, aux dérapages, aux décalages, on fait l’inventaire. Un inventaire à la Valletti et non à la Prévert. Qui convoque en avalanche des personnages aux noms étranges, Hernilgs, Clirquette, Bjak, et ainsi de suite, tout à l’avenant. Autant dire le peu de cas que l’auteur fait d’un réalisme sociologique.Débarque ainsi une inspectrice peu ordinaire, des tamponneurs, un Nordinn, un Melun, un Dick, une Marguerite…
Nous ne sommes pas, mais alors, pas du tout, dans une trame sage et posée, dans une narration simplifiée. Mais nous ne sommes pas davantage dans un grand délire sans pensée. D’entrée, nous atterrissons au coeur d’un univers poétique, absolument et radicalement ancré au second, troisième ou quatrième degré. Il s’agit alors de naviguer, comme le fait l’auteur, entre toutes les lignes de fuites qui se présentent à nous. Tendre l’oreille, ouvrir les yeux. Etre attentif aux fils tendus, en dessus, en dessous, aux entrelacements, aux dérives et aux superpositions.
A la structure enchevêtrée et complexe de la pièce. Il y a la piste, littérale, de ces êtres mesquins, qui chipotent, pinaillent, s’agacent, se coupent la parole, s’agitent. Et se pavanent. De ces personnages de théâtre qui se bousculent au portillon et qui jouent, comme on joue au théâtre. Jouent du réel, jouent des situations, des postures, des humeurs, des états et des situations. Se jouent des temps et des espaces. Jouent la comédie et la parodie. Jouent la caricature. Jouent la vie. A fond. Et lèvent le voile sur une humanité drôle et tragique, comme l’est toute humanité.
Il y a celle, en miroir, du théâtre lui-même dont Valletti connaît les rouages intimement. N’hésitant pas à le poser dans une mise en abyme démultipliée. Intervenant lui-même, au centre de la fiction, via la figure d’une documentaliste qui retrace les grands pans de la fable.
Il y a celle encore, plus ambiguë, de cet assassin devenu Président, contraint à l’exil, parcourant les routes d’un pays en proie à la dévastation. Globul s’enfuit et la fiction explose alors en une comédie épique où des personnages passent, disparaissent, apparaissent, comme autant d’exemplaires d’un monde poétique. Globul, ce pourrait être l’accession accidentelle d’un quidam au pouvoir. Et ce qui en découle de caricature, de dérision, de grotesque, d’excès, de dangerosités, de leçons à retenir, de questions à se poser. Globul, c’est Ubu croisant Matamore et se souvenant de Richard. Il en est l’héritier bâtard, le fils putatif. Il condense et ramasse les spectres de figures familières du théâtre. Il est la dynamique qui propulse la pièce de bout en bout. Il l’initie et la clôt.
Valletti n’est pas contemporain pour rien. Il est acteur, lecteur, auteur. Il se souvient de ses aînés. Derrière la dérision et le rire, derrière le grotesque et l’emphase, flottent des souvenirs en suspens. On pense à d’autres auteurs. Molière, oui, Jarry, effectivement. Et aussi Beckett, Brecht, quelques réminiscences autrement plus angoissantes que Pagnol qui n’est certes pas loin mais pas le seul. Passer à côté de ce tragique qu’il y a dans le rire de Valletti serait passer à côté de Valletti tout court.
Poeub en est la preuve évidente.
Autran. - C’est l’histoire de gens qui se tapent dans les mains ou je sais pas quoi ?
Balitov. - C’est une comédie ?
Autran. - Moi ! je sais pas, c’est annoncé « comédie » ! Sur le papier qu’ils vous ont envoyé, y a marqué quoi ?
Balitov. - Je vois pas bien… Comédie… ça doit être comédie ! Puisqu’en tonneau j’imagine mal la tragédie !
Autran. - Remarquez que des fois, dans les entrailles, les types, surtout pendant la guerre et à l’envers, les tonneaux, ils s’en servaient pour te donner une bonne leçon aussi…
Alors là c’était tragique… avec les épines dorsales dedans, dans les soubassements !
Globul. - Je vais disparaître, ne vous étonnez pas que je disparaisse, si vous continuez à faire des phrases dans le fond, là, laissez un peu les gens écouter !
Charlie Chann. - C’est en fait une sorte de pantomime, mais en tonneaux, alors on n’y comprend rien, et c’est bien !
[…]
Pœub, « L’hiver - le retour », scène 8
j'ai adoré ce spectacle, drole et loufoque, il est très émouvant, la musique est très belle et la presse a écrit de très beaux articles sur ce spectacle dans lequel j'ai laissé mon coeur... A voir absolument, Poeub m'a beaucoup émue et si j'en ai l'occasion, je ne manquerai pas d'aller le revoir !
j'ai adoré ce spectacle, drole et loufoque, il est très émouvant, la musique est très belle et la presse a écrit de très beaux articles sur ce spectacle dans lequel j'ai laissé mon coeur... A voir absolument, Poeub m'a beaucoup émue et si j'en ai l'occasion, je ne manquerai pas d'aller le revoir !
15, rue Malte Brun 75020 Paris
Station de taxis : Gambetta
Stations vélib : Gambetta-Père Lachaise n°20024 ou Mairie du 20e n°20106 ou Sorbier-Gasnier
Guy n°20010