Un spectacle pour adultes que peuvent voir les enfants, librement inspiré du conte de Perrault.
Comme elle a peur la fillette ! Son papa veut l’épouser ! Fuir, fuir, nul autre choix pour échapper à la main velue du père. Elle court dans la forêt, affublée de cette horrible peau de bête. Et la voilà qui erre, souillon infestée de vermine, dans un monde qui ignore qu’elle est fille de roi. Monstrueux désir qui oblige une enfant tout juste devenue femme à camoufler sa beauté. Amour, amour, sauve la petite princesse !
Le roi – Je serai son père, je serai son guide, je serai son mentor, je serai son époux.
La marraine – C’est interdit.
Le roi – Qu’est-ce qui est interdit ?
La marraine – D’épouser sa fille.
J’ai voulu écrire un spectacle dont la chair qui le constitue trouve son origine ici, à Bussang, au Théâtre du Peuple, au coeur d’une utopie. Une histoire qui rassemble le Peuple de ce théâtre : les spectateurs, les acteurs amateurs et les professionnels, ceux qui écrivent sa généalogie depuis plus d’un siècle.
Ce sera donc un conte parce que la montagne est sans doute un endroit où pourrait encore se cacher la bête ; parce que ce théâtre est une forteresse qui pourrait abriter une princesse, un roi, une fée, un prince. Parce que nous avons tous une chose en commun qui nous rassemble : l’enfance. Et en héritage, les contes entendus avant le sommeil, et qui nous accompagnent encore. Parce que les spectacles du Théâtre du Peuple sont inscrits dans le territoire et la tradition - comme les contes - et que faire des spectacles ou raconter des histoires, c’est être témoin et passeur à la fois.
Un conte est la promesse de l’effroi et du merveilleux, une sorte de tragédie où triomphe l’espoir. Ce sera donc Peau d’âne, l’histoire de cette jeune princesse condamnée à épouser son père. Le parcours initiatique d’une enfant qui cherche à devenir femme et qui doit s’enfuir pour échapper à ce désir furieux. Heureusement, Peau d’âne a une fée à ses côtés, un ange qui veille sur elle et qui va la sauver.
J’ai écrit ce texte en m’inspirant du conte originel de Charles Perrault, en y étant fidèle et infidèle à la fois, comme le veut la tradition du conte. Mon héroïne cheminera de la douce enfance jusqu’aux tumultes de l’enfer, où elle rencontrera la lumière, son prince.
Ce théâtre porte en lui le caractère sacré que je recherche, pour mon conte, sombre et mystérieux. Sur le plateau, sera installé un petit royaume où règnent un roi et une reine, entourés de leur cour. C’est le dernier royaume au monde, fief illusoire avec pour rempart un bois digne des forêts impénétrables qui hantent les cauchemars.
Le spectateur, au coeur de cet univers, entrera dans le conte comme on traverse un miroir, par effraction. Il verra alors un village entier descendre la colline pour faire ses adieux à la Reine, l’âne sur scène errant au milieu de son or, ou encore Peau d’âne s’échappant par la grande porte du théâtre pour se perdre dans la nature.
Ce spectacle est un pèlerinage au pays de notre enfance, un rendez-vous avec nos peurs archaïques et nos premiers émerveillements. Un rêve, mais les yeux ouverts.
Olivier Tchang Tchong
40, rue du théâtre 88540 Bussang