Spectacle en allemand surtitré.
"Cette chose qui se trouve devant moi est-elle encore du genre humain ? Y a-t’il encore quelque chose qui nous ferait agir autrement qu’avec l’intention de faire du profit ?" René Pollesch
La saga du Prater composée de cinq spectacles évoque un monde dans lequel on devrait, selon Giorgio Agamben, stopper la machine dominante de notre conception de l’homme, et se remettre en question dans l’espace laissé béant ! Parvenir à transmettre tout cela dans un film vidéo ou produire des images sur ce qui n’est pas encore saisissable pourrait être une devise de René Pollesch. Pour cela, l’auteur-metteur en scène, électron libre du théâtre allemand, a développé ces dernières années une forme théâtrale singulière. Son matériau (les textes qu’il écrit) reste tout le temps utilisable, il n’y a pas d’histoires et de personnages au sens traditionnel.
Les mises en scène de Pollesch traitent de ce qui est d’ordinaire marginalisé dans le théâtre comme les vies des acteurs confrontés à leurs propres situations professionnelles et personnelles. “Mes travaux s’attaquent à certains imaginaires et à certaines images que nous traînons toujours avec nous, selon lesquels nous aimerions agir, alors que cela ne nous est plus possible. Ce conflit m’intéresse beaucoup. S’il existe chez moi une perte d’orientation dans les relations sociales, mes textes me servent de repères”.
À partir de 2004 René Pollesch a écrit cette saga en cinq parties pour la scène berlinoise du Prater, petite salle de la Volksbühne. Parfois d’autres metteurs en scène ont été invités à porter ses textes à la scène, dans une scénographie toujours conçue par Bert Neumann.
Dans Prater Saga 1 - Mille démons te souhaitent la mort, deux jeunes vidéastes Twopence-Twopence et Diabolo tournent un film dans la luxueuse villa de Bigman en Afrique. Ils construisent ainsi de manière provisoire les représentations d’une vie rêvée, mais à peine arrivés ils sont déjà partis.
Dans Prater Saga 2 - Twopence-Twopence et la Voodoothèque, Bigman ne croyant plus aux relations humaines matérialise son désarroi amoureux en épousant un objet en l’occurrence un canapé. Quant à Diabolo, il incarne le diable.
Ce jeune homme, dénué de tout sentiment est central dans Prater Saga 3 - Dans ce quartier, le diable est une mine d’or.
Dans Prater Saga 4 - Diabolo-Dommage qu’il soit un diable, les personnages n’en finissent pas de se concerter et agissent de manière énigmatique, ils tentent par exemple de définir une machine à concevoir l’homme, qui sera abandonnée parce qu’elle tourne à vide.
Dans Prater Saga 5 - La magie du désespoir on retrouve les éléments évoqués dans les quatre volets précédents ; tous les personnages s’interrogent pour remettre tout en question. René Pollesch traite de façon très personnelle le sujet universel qu’est “l’amour” et les liens affectifs entre humains, et l’intensité avec laquelle tout se désagrège.
Où en sommes-nous, aujourd’hui, avec la solidarité ? Celle d’un contrat social entre gouvernants et gouvernés, qui disparaît de plus en plus de la politique actuelle - mais aussi la simple solidarité entre deux personnes qui s'aiment ?
René Pollesch consacre la cinquième et dernière partie de sa “Saga” dans le style des telenovelas au “réel dans l’amour” et révèle, dans l’intensité avec laquelle nous nous déshumanisons dans nos relations, ses dimensions les plus sombres. Comme d’habitude, le cinéma fait son apparition dans ce théâtre rempli d’images, d’allusions et de références culturelles ; cette fois-ci, c’est l’univers d’Ingmar Bergmann (et plus particulièrement Scènes de la vie conjugale) qui nous salue de loin.
Mais René Pollesch ne s’intéresse pas exclusivement aux abîmes psycho-pathologiques de l’homme et de sa vie privée. Son théâtre dénonce la force productive que constitue la perfidie humaine comme un fondement économique à partir duquel le sujet élabore des mécanismes, afin d’assurer sa propre “sécurité” dans ce monde désolidarisé. La vie en couple serait-elle purement et simplement basée sur la production mystérieuse d’argent, et profondément marquée par l’éternelle situation concurrentielle ?
Traduction française de Joseph Schmittbiel.
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