Dans le cadre du Festival d'Automne à Paris.
Spectacle en anglais surtitré en français.
Neutral Hero, « héros neutre » : l’oxymore est d’autant plus opérant si l’on sait qu’il est le titre de la nouvelle pièce de Richard Maxwell, enfant prodige de la scène new-yorkaise, dont le théâtre – en lequel on a parfois voulu voir une version contemporaine de celui de Ionesco ou de Beckett – ne cesse d’explorer précisément cette idée de neutralité, d’apathie. Théâtre paradoxal que celui de cet artiste polymorphe (à la fois auteur, metteur en scène et musicien) de 42 ans, dont l’apparente inexpressivité est portée pourtant par un amour démesuré des acteurs, de tous ces individus qui donnent chair aux personnages ; un théâtre qui s’immisce au coeur de la prétendue « banalité » du quotidien, de l’Amérique des laissés-pour-compte.
Peu présent sur les scènes françaises depuis Good Samaritans et Showcase (présentés en 2006 au Festival d’Automne), Richard Maxwell et les New York City Players, après un bref passage au Théâtre de l’Agora à Évry avec Ads, reviennent avec une drôle d’épopée : Neutral Hero explore le thème du héros en partant du paradigme selon lequel tous les mythes ne font que raconter la même histoire et en s’inscrivant dans la minutieuse topographie d’une ville du Midwest dans laquelle Richard Maxwell a grandi.
Assis sur la scène, douze protagonistes aux origines les plus diverses (comme souvent, plusieurs d’entre eux sont des « amateurs ») évoquent leur quotidien, scandé par les chansons composées par Richard Maxwell (selon lequel cette pièce peut être envisagée comme « une très longue pop-song »). Peu à peu, derrière ces gestes en apparence monotones, c’est une geste d’un tout autre type qui en vient à se jouer sous nos yeux et faire écho à d’autres, immémoriales – celles de Gilgamesh ou d’Ulysse.
Tour à tour comédie musicale et saga politique, Neutral Hero, jouissive tentative de rivaliser avec la profondeur édifiante des grandes oeuvres classiques, est la preuve par l’absurde que la neutralité est chose absolument impossible au théâtre. Et que celui-ci, tant qu’il est vivant, sera toujours impossible à neutraliser. « Je me dis chorégraphe comme je dis que je suis espagnole : parce que j’ai un accent, une culture, une origine. C’est pareil avec la danse. »
Place Georges Pompidou 75004 Paris