C'est un spectacle en prise avec l'actualité - révolutions Tunisienne, du Nil que nous propose Sandra Abouav, chorégraphe et unique interprète de Slide. Elle évolue doucement dans un univers de contraintes arbitraires et l'espace tout entier, gigantesque machine à écraser, se plait à restreindre progressivement son champ d'action. La musique se fait virulente, explosive, lancinante, dangereuse.
Surveillance omniprésente, toute puissance d'un ordre pré-établi commandent aux mouvements. Mais le temps de l'aliénation est autant celui d'une lente prise de conscience, et l'on sent sourdre la colère dans les gestes. L'écrasement au sol, aboutissement du processus, est aussi celui de l'identification claire de l'objet de la lutte. L'espace est à se réapproprier comme champ de possibles, comme terrain de je(u).
Motivés par l'instinct de (sur)vie, les mouvements se font d'abord vigilants et prudemment exploratoires. On prend ses marques pour l'envol. La faculté d'être libre est déjà la liberté, et implique vide et peur du vide ; la danseuse, en proie à un vertige grisant, est à la fois lanceuse d'une balle et la balle qu'elle a lancée. Le mouvement se propage en hélice. Le corps, en phase avec sa pleine respiration, renait, s'épanouit, devient disponible. Le visage de Sandra Abouav, couvert de cendres, est le témoin éloquent de sa propre métamorphose, du passage d'un corps en défaut d'oxygène à un corps libre.
77, rue de Charonne 75011 Paris