The Scarlet Letter

du 10 au 26 janvier 2019
2h40

The Scarlet Letter

S'inspirant de l’œuvre fondatrice de Nathaniel Hawthorne, Angélica Liddell livre à l'heure de l'empire de la raison un déchirant cri de souffrance.
S'inspirant de l’œuvre fondatrice de Nathaniel Hawthorne, Angélica Liddell livre à l'heure de l'empire de la raison un déchirant cri de souffrance. Spectacle en espagnol surtitré en français.

Spectacle en espagnol surtitré en français.

« Mais ce que hait le peuple, comme les chiens le loup, c’est l’esprit libre, l’ennemi des chaînes, celui qui point ne prie et qui hante les bois. » Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra

  • L'amour sans puritanisme

De Sidney Olcott à Wim Wenders, de Hugo Pratt aux scénaristes de Nip/Tuck ou de Mentalist, nombreux sont les auteurs qui se sont inspirés de l’œuvre fondatrice de Nathaniel Hawthorne, notamment de La Lettre écarlate publiée en 1850. Il y a là matière à inspirer l’artiste, metteure en scène, auteure et interprète espagnole Angélica Liddell. Son œuvre entière, depuis La Maison de la force jusqu’à la Trilogie de l’infini, est le reflet de sa souffrance intérieure en écho aux violences du monde.

Si c’était autrefois la religion qui censurait, rejetait, c’est aujourd’hui l’empire de la raison qui domine la pensée puritaine de notre société. Dans un déchirant cri de souffrance, Angélica Liddell nous rappelle que l’humanité trouve son fondement dans la culpabilité du premier homme, c’est sur cette base qu’elle libère ses tourments, porteuse des stigmates de nos infractions à la morale et de nos mauvaises consciences.

Librement inspiré de l'œuvre de Nathaniel Hawthorne.

  • La presse

« Dans une représentation fastueuse et volontiers narcissique, elle brode autour du roman de Nathaniel Hawthorne un pamphlet politiquement incorrect, qui en appelle à Artaud ou Foucault (Michel) pour affirmer une vérité que nul ne peut contester : l’art et la morale n’ont rien à faire ensemble. C’est incendiaire ! » Joelle Gayot, Télérama

« Le nouveau spectacle d’Angélica Liddell est un bain théâtral de jouvence dans sa noire beauté, son impudeur mâtiné d’esthétique, sa façon de concevoir la scène comme une tribune, une parlerie et plus encore comme une cérémonie où déployer ce que Antonin Artaud nomme les « forces vives » de la « poésie ». (...) La provocation et l’offense ne sont jamais loin de la souffrance chez Angélica Liddell. Il n’y a pas d’amour sans avilissement, dit-elle encore, faisant référence à Médée, Anna Karénine et Madame Bovary. » blog Mediapart, 12 janvier 2019

  • L’art sera toujours transgression

« Les fondateurs d’une colonie nouvelle, quel que soit l’idéal de vertu et de bonheur qu’ils aient eu d’abord à l’esprit, ont invariablement reconnu dans la pratique la nécessité, parmi les plus urgentes, d’affecter une partie du sol vierge à la constitution d’un cimetière et d’en destiner une autre à la construction d’une prison. »

C’est ainsi que Nathaniel Hawthorne débute La Lettre écarlate. Il est donné pour acquis que nous commettrons un délit et qu’il sera aussi irréversible que la mort, aussi irréversible que le premier homicide d’un frère contre un autre frère. Alors laissez-moi être une criminelle. Celle qui vous parle tue, vole, pervertit. Seul celui qui aime s’expose à l’insulte. Seul celui qui aime Paris s’expose au mépris de Paris. Comme Henry Miller, seul celui qui cherche l’exil à Paris sait découvrir les fosses septiques de Paris et le visage rongé de ses juges.

« D’abord, ça paraît merveilleux, parce qu’on a l’impression d’être libre. […] Par-dessous, c’est tout mort : il n’y a pas de sentiment, pas de sympathie, pas d’amitié. » Cet étranger qui débarque à Paris a déjà subi l’humiliation, il est l’héritier d’une lignée d’esclaves et d’inférieurs fort bien décrite par Diderot dans Le Neveu de Rameau.

En exposant sa propre pourriture, l’artiste, le fou, l’immoral agit tel un scalpel sur les bubons pestilentiels de ses maîtres : il les draine. Sans juges, la punition n’existerait pas. Et sans lettre écarlate, l’art n’existerait pas. Sans moralisme, l’art n’existerait pas. Sans hypocrisie, l’art n’existerait pas.

L’existence de l’art dépend donc entièrement de Paris, cette ville qui honore et déshonore les artistes avec la même voracité, cette ville qui nourrit les crimes poétiques de ceux qu’elle accueille pour mieux les répudier ensuite (au bout du compte, les oeuvres naissent de l’humiliation), cette ville retranchée derrière une divergence insurmontable entre les idées et la vie, cette ville qui, à force d’accumuler toute cette culture, est devenue un sommet d’ignorance, habitée par des érudits insensibles. Comme le dit Henry Miller à propos du chagrin qui vient après le coup de fouet, on reçoit des coups de pied au cul pour la bonne raison qu’on en redemande.

Le poète est toujours un étranger dans un monde réglement. Ma lettre brodée, je la dois aux juges ; sans puritanisme, sans jugement et sans châtiment, la lettre n’existerait pas. La lettre dépend tout autant du délit que du châtiment, entre autres parce que c’est à travers le châtiment que nous mesurons le degré de répression d’une société : le châtiment brosse le portrait de sa propre difformité dès lors qu’il est appliqué ; le délit, en revanche, esquisse le désir de liberté, non moins difforme. (Sale époque que la nôtre, qui confond l’immoralité et le délit.)

L’art sera toujours transgression car il inverse les règles sociales et fait de l’immoralité une éthique. Grâce à la force de la poésie, nous trouvons sur scène le moyen de travailler avec un espadon qui nous transperce le coeur, sans être morts. Nous trouvons le moyen d’assassiner avec des roses en guise de balles. C’est là que réside notre générosité : on vous tue en vous bombardant de fleurs et non de plomb.

L’expression est donc supérieure à l’offense. L’expression est notre maladie, l’expression est le monstre dont Hester (l’héroïne du roman d’Hawthorne) accouche, telle une Madone de Raphaël tenant dans ses bras un enfant rédempteur monstrueux, l’expression est ce que nous ne parvenons jamais à entrevoir dans la poitrine translucide de cet Arthur (le pasteur chez Hawthorne) qui se consume tout seul dans son coin.

Pour reprendre la réflexion de Georges Didi-Huberman, Ève devient Marie. L’immoral devient éthique. Vous avez besoin de la maladie d’Hester et Arthur pour accéder à la rédemption. Vous avez besoin de l’art, ne serait-ce que pour le condamner. Nous apportons dans vos tribunaux gelés la fi èvre et le ferment. Sans maladie, il n’y a pas de création. Sans Ève, Marie n’existerait pas. « La beauté était liée à la souffrance et la souffrance au salut », écrit Henry Miller. Vous avez besoin de la force de l’amour.

Je ne vous lâcherai pas la main tant que vous ne m’aurez pas frappée avec. J’ai 52 ans et je ne sais ni lire ni écrire. Si je me coupe un bout de chair et que je le plonge dans une casserole d’eau bouillante, il ne cuit pas, il reste cru. Je n’entends pas non plus clairement ; rien que des mots épars, étranges. Les démons oeuvrent pour moi. J’ai l’âge de les fréquenter.

À moins que mon travail soit tout simplement la divagation d’une idiote. Si seulement ce pouvait être le cas, alors je donnerais le meilleur de moi-même. Le pire de tout, c’est qu’il ne peut plus y avoir de titre, d’argument, il ne peut plus y avoir de commencement. Je ne peux plus reprendre au début, cela m’est impossible. Cette pièce parle donc de l’incapacité à fuir, c’est une pièce qui accepte le châtiment et les cauchemars comme origine de la beauté ; c’est, en défi nitive, l’oeuvre d’une criminelle. Supportez-moi et je vous parlerai, parce que je vous aime.

Par Angélica Liddell, traduit de l’espagnol par Christilla Vasserot


Sélection d’avis du public

spectacle un peu particulier, mais finalement interessant Le 28 janvier 2019 à 18h50

Peu être ne suis je pas très fine , mais j'ai mis un certain temps à comprendre de quoi il s'agissait; Une fois que j'ai compris j'ai suivi avec intérêt, mais j'ai trouvé le spectacle un peu long et fatigant à suivre . Est-il nécessaire de crier tout le temps pour se faire entendre . JBP

The Scarlett letter Par Christiane B. - 27 janvier 2019 à 09h44

Belle performance de Angelica lidlell

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spectacle un peu particulier, mais finalement interessant Le 28 janvier 2019 à 18h50

Peu être ne suis je pas très fine , mais j'ai mis un certain temps à comprendre de quoi il s'agissait; Une fois que j'ai compris j'ai suivi avec intérêt, mais j'ai trouvé le spectacle un peu long et fatigant à suivre . Est-il nécessaire de crier tout le temps pour se faire entendre . JBP

The Scarlett letter Par Christiane B. (2 avis) - 27 janvier 2019 à 09h44

Belle performance de Angelica lidlell

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La Colline (Théâtre National)

15, rue Malte Brun 75020 Paris

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Spectacle terminé depuis le samedi 26 janvier 2019

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