Tocqueville ou l’éloge de l’esprit critique

Paris 11e
du 26 au 29 avril 2006
1h15

Tocqueville ou l’éloge de l’esprit critique

Le célèbre penseur de la démocratie américaine interviewé par une journaliste d'aujourd'hui, un débat passionnant, une relation mouvementée et anachronique !

Alexis de Tocqueville
La pièce
Notes de mise en scène
Le propos
Quelques extraits

  • Alexis de Tocqueville

Un penseur de la démocratie, visionnaire et profondément actuel. Alexis de Tocqueville, neveu de Chateaubriand, a failli ne jamais naître : la chute de Robespierre en 1794 évite in extremis la guillotine à sa future mère. Tocqueville naît à Paris en 1805.

En 1831, jeune magistrat, il part aux Etats-Unis étudier le système pénitentiaire américain. il découvre ce qu'est une démocratie marquée par "l'égalité des conditions", mais déplore l'esclavage et la disparition de la civilisation indienne. A la suite de ce voyage, il écrit son célèbre ouvrage La Démocratie en Amérique dont le 1er tome paraît en 1835.

Il participe à la vie politique de son époque : il est élu député en 1839, soutient la République en 1848, devient ministre des Affaires étrangères en 1849 pour quelques mois et s'oppose au coup d'état de 1851. Refusant en 1852 de prêter serment au nouveau régime de Louis-Napoléon Bonaparte, il démissionne du Conseil général de la Manche et se consacre à l'écriture de L'Ancien Régime et la Révolution qui connaîtra un grand succès. Il meurt à Cannes en 1859.

"Je n'ai jamais désiré le pouvoir, mais la réputation. La mienne est liée d'une manière indissoluble aux idées et aux institutions libérales. Me rattacher d'une manière même indirecte au gouvernement qui les détruit dans mon pays, laisser croire que je vais me rapprocher de lui, c'est me diminuer dans l'estime publique. (...) Je n'ai donc rien de mieux à faire pour le moment que de me retirer à l'écart et d'écrire. Cela même est encore de la politique."

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  • La pièce

La pièce est écrite à partir de la correspondance d'Alexis de Tocqueville, sous la forme d'un dialogue entre Tocqueville et une lectrice-journaliste d'aujourd'hui.

Au début de la pièce, la comédienne lit la correspondance de Tocqueville. Elle incarne alors une banale lectrice, confortablement installée chez elle. Cette lectrice s'approprie certains passages du texte de Tocqueville, se sent touchée au plus profond d'elle-même par leur universalité. En même temps, elle apporte un regard critique et amusé sur les propos tenus par "l'époux Tocqueville" à sa femme.

Elle rêve de s'entretenir avec Tocqueville. Grâce à son imagination, elle met en scène une émission télévisée dans laquelle elle va débattre avec lui ; elle sera la journaliste, Tocqueville l'invité. L'émission se déroule dans une ambiance qui n'est pas toujours conviviale, les échanges sont vifs, les arguments aigus voire acérés, traduisant les objectifs, les préoccupations et le caractère de chacun. Une fois l'émission terminée, la journaliste prolonge la discussion pour régler un conflit né au cours de l'émission, mieux connaître l'homme et le taquiner. Leur relation oscille entre admiration, complicité, rivalité, colère et séduction.

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  • Notes de mise en scène

Le dialogue est rendu possible par le livre. La lecture nous permet un dialogue passionné avec les auteurs de jadis. Dans la pièce, notre ambition est d'incarner le lien intime qui unit une lectrice actuelle à Tocqueville, malgré le temps qui les sépare.

Une parole vivante grâce à la forme théâtral. L'action dramatique permet de rendre vivante la parole d'un auteur. Ainsi pendant la pièce, des rapports complexes se nouent entre la lectrice et l’auteur par le biais d’une émission télévisée. En effet, la lectrice s’est projetée en journaliste et a mis l’auteur dans le rôle de l’invité. Le spectateur entend le texte même d’Alexis de Tocqueville qui s’exprime par la bouche de l’invité.

Il nous a semblé pertinent de construire la pièce à partir des lettres de Tocqueville. Outre leur caractère passionnant et la beauté de la langue, les lettres en tant que telles impliquent déjà une forme de dialogue avec le correspondant épistolaire et peuvent livrer une pensée intime, propice à une incarnation théâtrale.

Tout ce que dit Tocqueville dans la pièce provient textuellement de ses propres lettres, à l'exception de quelques phrases de liaison avec les répliques de la journaliste. Notre souhait est en effet de respecter non seulement l'esprit (sous réserve de la tournure coquine des dernières répliques !) mais aussi la lettre de la pensée de l'auteur. Les répliques de Tocqueville sont des extraits de ses lettres publiées notamment dans l'ouvrage Tocqueville lettres choisies. Souvenirs 1814-1859, Françoise Mélonio, Laurence Guellec, Quarto Gallimard, 2003.

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  • Le propos

Analyses politiques et discussion intime.
Afin de montrer plusieurs facettes de l'homme, penseur raisonné mais aussi homme qui doute, nous avons choisi d'alterner réflexion politique - les échanges avec la journaliste pendant l'émission - et réflexion sur la condition humaine - les échanges avec la journaliste à l'issue de l'émission -, d'alterner vie publique et vie privée, cela évidemment dans le plus grand respect de l'homme.

Des vertus publiques du doute...
Dévoiler différents aspects de la personnalité de Tocqueville présente plusieurs intérêts :
- varier les plaisirs du spectateur, nourrir la complicité entre la lectrice et l'auteur Tocqueville, enrichir l'intrigue entre la journaliste et son invité, favoriser l'incarnation théâtrale;
- et surtout, établir un lien entre "le Tocqueville individu qui doute" et "le Tocqueville penseur politique". Ce lien, à notre sens, c'est l'esprit critique.

Une pensée puissante et libre
Nous essaierons de résumer ce qui nous a profondément séduits chez Tocqueville et les raisons pour lesquelles il nous parait judicieux de le donner à entendre aujourd'hui en public. Commençons par le contenu de sa pensée. Ses réflexions sur la démocratie sont souvent d'une incroyable actualité et nous renvoient à nos propres comportements de citoyens. Ses observations peuvent aller jusqu'à instiller le doute dans ce que nous tenons pour acquis, nuancer nos opinions, nous rappeler par exemple la fragilité et la jeunesse des systèmes démocratiques, que certaines caractéristiques des Etats-Unis ne sont pas nouvelles ou liées à tel ou tel gouvernement. Dans un contexte d'attentats terroristes, comme en ont connus récemment les Etats-Unis, l'Espagne, la Grande-Bretagne - et la France dans les années 80 - ou comme en subit régulièrement Israël, penser la démocratie est certainement toujours aussi nécessaire.

Une méthode intellectuelle, l'esprit critique
Après avoir évoqué le contenu de la pensée de Tocqueville, poursuivons sur ce que nous considérons comme sa "méthode intellectuelle", l'esprit critique. Cet esprit critique joue un rôle essentiel parce que c'est grâce à lui que Tocqueville construit sa pensée, lui l'aristocrate acquis aux idées démocratiques, et aussi parce que l'esprit critique reflète sans doute le dynamisme d'une société. Ainsi la pièce pose entre autres la question du tabou qui appauvrit si fréquemment nos débats, celui du "politiquement incorrect". Notre société fait pourtant l'apologie de l'esprit de transgression. Mais nous nous valorisons fréquemment à bon compte en oubliant qu'une provocation habituelle devient un lieu commun, une manière conventionnelle de penser et nous ne savons pas nécessairement déceler nos nouveaux tabous.

"La grande subversion, c'est la nuance, c'est-à-dire quelqu'un qui ose penser et qui ose penser librement" dit ainsi l'écrivain haïtien Dany Laferrière (France Culture 12/01/06).

Les pétitions "liberté pour l'histoire" et "liberté de débattre" qui ont circulé en décembre 2005 à l'initiative de plusieurs intellectuels, de même que les réactions liées à la publication de douze caricatures intitulées "Les visages de Mahommet" - initialement parues le 30 septembre 2005 dans le journal danois Jyllands-Posten - confirment que l'esprit critique est au coeur du débat sur la démocratie.

Malgré ces sujets, la pièce reste ludique ! Elle amorce des pistes de réflexion à travers les points de vue de deux personnages et peut être une excellente introduction à un débat. De plus, elle comporte de nombreux moments d'humour, les personnages ayant leurs petites faiblesses, leurs côtés ridicules, égocentriques, exaltés, séducteurs.

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  • Critiques

"J'ai lu votre pièce d'un trait avec un vif plaisir et une grande satisfaction intellectuelle. Vous avez réussi à faire tenir beaucoup de Tocqueville dans votre texte qui va crescendo jusqu'au contraste Coran-Evangile et s'apaise de nouveau, une fois le micro fermé, avec l'évocation de l'époux de Marie Mottley. Un beau texte qui saisit bien l'âme et l'esprit de Tocqueville et de son oeuvre et qui devrait plaire s'il est, comme il le mérite, représenté. Bravo !" Raymond Boudon, sociologue, auteur de Tocqueville aujourd’hui

"Je vous remercie vivement de m'avoir envoyé votre travail, que je trouve très réussi. Les citations de Tocqueville s'harmonisent très bien avec les questions posées par la journaliste et le personnage prend vie. Je ne suis guère en contact avec les milieux du théâtre à Paris car j'enseigne à l'Université de Poitiers. Mais je parlerai de ce projet avec le responsable de l'association culturelle de notre UFR de lettres et langues, en le lui recommandant. Nous organisons régulièrement des manifestations, théatre, expositions, lectures, et, si cela vous intéresse, ce "Tocqueville" d'un nouveau genre pourrait trouver sa place dans ce cadre." Laurence Guellec, enseignante, auteur avec F. Mélonio de Tocqueville Lettres choisies. Souvenirs 1814-1859

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  • Quelques extraits

- "Les Etats-Unis jouent déjà un assez grand rôle parmi les nations pour que toutes soient intéressées dans le choix qu’ils font des hommes qui doivent les diriger."

- "Les Américains ne savent point assez le retentissement qu’ont leurs fautes dans le monde entier et le parti que, sur tous les points du globe, les ennemis de la liberté en tirent."

- "Je tiens pour fort improbable qu’il existe une inégalité naturelle et permanente dans la grande famille humaine, je ne sais rien, je vous l’avoue, de plus dangereux qu’une semblable doctrine pour l’avenir de l’humanité. C’est sur cette idée qu’est établi l’esclavage, qui déshonore les chrétiens du nouveau monde ; c’est au nom de ce principe qu’on y détruit les anciens propriétaires du sol avec un calme tout philosophique. Si cette doctrine se répandait sur la terre, je ne sache rien, je vous le confesse, qui fût plus propre à paralyser les efforts de l’homme par lui-même, à engloutir son courage et à le livrer à tous les tyrans présents et à venir."

- "Je tiens pour constant que l’éducation laïque est la garantie de la liberté même de penser."

- "J’ai beaucoup étudié le Coran à cause surtout de notre position vis-à-vis des populations musulmanes en Algérie et dans tout l’Orient. Je vous avoue que je suis sorti de cette étude avec la conviction qu’il y avait eu dans le monde, à tout prendre, peu de religions aussi funestes aux hommes que celle de Mahomet. Elle est, à mon sens, la principale cause de la décadence aujourd’hui si visible du monde musulman et quoique moins absurde que le polythéisme antique, ses tendances sociales et politiques étant, à mon avis, infiniment plus à redouter, je la regarde relativement au paganisme lui-même comme une décadence plutôt que comme un progrès."

- "Il y a actuellement une tendance évidente à prendre en indifférence toutes les idées qui peuvent agiter la société, qu’elles soient justes ou fausses, nobles ou basses...Chacun se concentre de plus en plus dans l’intérêt individuel."

- "...vous vous inquiétez de l’indifférence des citoyens à l’égard de la politique... (...) L’une des principales causes de cette indifférence est la croyance chaque jour plus profondément enracinée dans la masse que la vie politique n’est plus qu’une partie où chacun ne cherche qu’à gagner; que la politique n’a de sérieux que les ambitions personnelles dont elle est le moyen; qu’il y a une sorte de duperie, et presque de bêtise et de honte, à se passionner pour un jeu sans réalité et pour des chefs politiques qui ne sont que des acteurs qui ne s’intéressent même pas au succès de la pièce, mais seulement à celui de leur rôle particulier."

- "Je considère le doute comme une des plus grandes misères de notre nature, je le place immédiatement après les maladies et la mort."

- "Je ne serai jamais heureux, cela est certain. Avec des moyens bornés et incomplets j’ai des désirs immenses."

- "Comment parviendrais-je à arrêter cette espèce de bouillonnement du sang que l’approche d’une femme quelle qu’elle soit me cause encore, comme il y a... 170 ans ?"

- "La Démocratie en Amérique, extraits : L'influence destructive qu'exercent les peuples très civilisés sur ceux qui le sont moins se fait remarquer chez les Européens eux-mêmes. Des Français avaient fondé, au milieu du désert, la ville de Vincennes. Ils y vécurent dans une grande abondance jusqu'à l'arrivée des émigrants américains. Ceux-ci commencèrent aussitôt à ruiner les anciens habitants par la concurrence ; ils leur achetèrent ensuite leurs terres à vil prix. Près d'un siècle plus tard, le nombre de Français était réduit à une centaine d'individus, dont la plupart se disposaient à passer à la Louisiane et au Canada. Ces Français étaient des hommes honnêtes, mais sans lumières et sans industrie; ils avaient contracté une partie des habitudes sauvages. Les Américains, qui leur étaient peut-être inférieurs sous le point de vue moral, avaient sur eux une immense supériorité intellectuelle : ils étaient industrieux, instruits, riches et habitués à se gouverner eux-mêmes.
Quelque chose de plus frappant encore se passe dans la province du Texas; l'Etat du Texas fait partie du Mexique, et lui sert de frontière du côté des Etats-Unis. Depuis quelques années, les Anglo-Américains pénètrent individuellement dans cette province encore mal peuplée, achètent les terres, s'emparent de l'industrie, et se substituent rapidement à la population originaire. On peut prévoir que si le Mexique ne se hâte d'arrêter ce mouvement, le Texas ne tardera pas à lui échapper."

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Spectacle terminé depuis le samedi 29 avril 2006

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