À 19h démarre la projection du film Quand la mer monte. L’histoire d’Irène (Yolande Moreau), comédienne en tournée dans le Nord de la France avec un one-woman-show Sale Affaire… Elle rencontre Dries, un « porteur de géant ». C’est le début d’une histoire d’amour qui a d’étranges résonances avec le spectacle qu’Irène joue sur scène.
Puis, à 21h, Yolande Moreau débarque sur scène pour jouer son spectacle, Sale affaire du sexe et du crime, celui dont il est précisément question dans le film. Elle n’est pas dans le Nord, elle est là, sur le plateau, avec son masque de carton-pâte… À partir de là on n’est plus dans un film. Ça devient saignant. Drôle et saignant. Grotesque, drôle et saignant !
Précédé de la projection de son film Quand la mer monte, film de Gilles Porte et Yolande Moreau, avec Yolande Moreau, Wim Willaert, Olivier Gourmet, Philippe Duquesne, Jackie Berroyer… Le film a été salué par deux Césars en 2005 (meilleur premier film et meilleure actrice).
Le film dure 1h33, entracte de 20 minutes puis spectacle d'une heure environ.
Je me souviens qu’à l’époque où j’ai écrit Sale affaire (dans les années 80), je voulais parler du vide, de la folie ordinaire, de la difficulté d’exister… J’ai écrit le spectacle les après-midi dans les cafés dansants… Il y avait beaucoup de vieilles dames qui se pomponnaient et qui gloussaient quand on les invitait à danser. On aurait dit des jeunes filles de 15 ans… C’était joli et terrible… Pour raconter ce vide, cette désespérante envie d’amour, j’ai utilisé le port du masque. Le personnage prenait du recul avec la réalité, faisant penser à un personnage d’Ensor ou encore au Cri de Munch…
« Sale affaire, j’ai trempé dans un crime… » Ce sont les premiers mots du spectacle. Le personnage vient de tuer son amant, elle déballe sa vie d’une voix âpre, et la banalité de sa vie est plus effrayante que son crime… Faire du théâtre donne à l’acteur l’occasion de régler ses « comptes » avec la vie. On triture la réalité, on y met un peu de soi, un peu des autres et l’on partage tout ça avec un public, chaque soir différent, qui rit, se reconnaît…
Yolande Moreau
J’ai découvert le personnage de Sale affaire au début des années 90… Je me souviens du grain de sa voix, de son accent, de ses silences, de ses hésitations, de son rire, de son regard avec deux trous noirs à la place des yeux, de ses gestes rares, courts, répétitifs, précis comme celui de se frotter machinalement les mains ensanglantées sur sa robe rayée… Je me souviens du jeu minimaliste de Yolande, de la justesse de celui-ci, de son efficacité, de l’existence incroyable de son personnage…
J’ai ensuite eu l’occasion de suivre régulièrement le travail de Yolande… J’avais été notamment impressionné par son interprétation dans C’est magnifique de Jérôme Deschamps… J’ai alors imaginé un scénario avec Yolande dans le rôle principal : une femme en tournée avec son spectacle Sale affaire… Je suis alors allé trouver Yolande dans sa campagne et on a plongé pour 5 années de coécriture !
Gilles Porte
« Sale affaire !... J’ai trempé dans un crime !...
C’est moche, hein !...
Il est mort !... !
Ça vous fait rien,… Ça vous touche pas ?..
Moi non plus !...
C’est moche, hein !
Mais faudra que j’en parle à mon chef : ça part plus !!...
Le sang !!, le sang du crime !... Du « AA positif »…
Je le connais bien, c’était mon amant ! ...
J’ai habité deux jours avec !... C’est moche, hein ! …
Mais faudra que j’en parle à mon chef ! »
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