Au théâtre, un soir de représentation dans une grande ville : un serveur, un acteur, une spectatrice passionnée, un inspecteur toujours à l’affût et une succession d’imprévus… des malentendus… une galerie de portraits qui débordent du cadre... Tel est le début d’un désordre festif qui va s’infiltrer dans divers lieux : les appartements, le tramway, l’église, le cinéma, les bains publics, le tribunal.
D’autres figures sociales comme l’ouvrier, le citoyen porté sur la boisson, le milicien, la cerbère, vont les rejoindre et se confronter à nos personnages récurrents. Quiproquos, plaisirs immédiats, rencontres amoureuses mais aussi trahisons et prémices d’une répression latente vont se succéder suivant les lieux investis.
En parallèle à ces situations fictives, un nouvel arrivant, l’auteur, vient nous faire partager les étapes décisives de son itinéraire sentimental, tout en traversant l’Histoire. Zochtchenko, en digne héritier de Gogol, brocarde ses semblables dans un miroir déformant où gravitent différents spécimens d’une société fissurée. Dix-huit personnages dans une farandole burlesque pour un rire gagné sur le tragique de la vie, un rire salvateur et universel.
Comment se fait-il que l’humoriste russe le plus célèbre de l’ère soviétique soit inconnu du public francophone, alors qu’il ne le cède en rien à ses confrères européens ou anglo-saxons ? En effet, de son vivant, Mikhaïl Zochtchenko était admiré à tel point qu’il devait souvent se déguiser sous un pseudonyme pour résister aux assauts de ses admirateurs... « C’est du Zochtchenko ! » voilà une exclamation familière à tous les Russes depuis les années vingt. Satiriste, héritier de Gogol, il a donné des portraits savoureux de la vie soviétique ; le tsar de l’époque n’était pas Nicolas Ier mais Staline...
Il ne s’agit pas d’une pièce mais d’un ensemble de scènes burlesques d’après les récits de Zochtchenko : des personnages récurrents se retrouvent dans une sorte de maelstrom où des liens ténus vont entrelacer leur destin. L’Histoire de petites gens en marche…
L’équipe artistique se nourrit de Chaplin, Keaton, Murnau, Pabst, des avant-gardes russes du début du XXe siècle, et des peintres Ensor, Grosz, Otto Dix entre autres. Le travail avec les comédiens est concentré sur l’axe texte-corps. Pas de psychologisme : un traitement des obsessions des personnages, de leurs débordements avec la jubilation que cela suppose. Nous insistons sur le découpage des lignes géométriques et des déséquilibres des corps...
La prégnance de l’oeuvre de Zochtchenko dans notre société, la cruauté joyeuse et parfois involontaire engendrée par le comportement des personnages, voilà ce à quoi nous nous attelons avec cette nouvelle création.
Serge Poncelet
Le Théâtre Yunqué est né en 1992 sous l'impulsion de Serge Poncelet, ancien comédien du Théâtre du Soleil, formateur d'acteurs et metteur en scène. Par un traitement burlesque qui n'altère en rien la force dramatique des œuvres, la compagnie propose des spectacles et des stages en France et à l'étranger, principalement axés sur la primauté de l'émotion, l'engagement du corps sur scène et des thématiques qui questionnent les différents visages de l'âme humaine.
« Zakouski ou une vie joyeuse, une création écrite comme une partition pour un hymne à l’ivresse d’une société à bascule. La liberté de penser s’oppose à la pensée de liberté. (…) Burlesque mêlant habilement poésie et philosophie, ce théâtre d’avant-garde ouvre le portail d’une culture grillagée dans une Russie meurtrie par la Révolution d’octobre et par l’installation de Lénine au Kremlin. » Théâtrothèque
« Zakouski ou la vie joyeuse se révèle être une très bonne surprise, étonnamment moderne dans sa forme et dans son discours, voire toujours d'actualité même en démocratie. » Froggy's Delight
78, rue du Charolais 75012 Paris