Portrait de Dario Fo
Extraits et citations
Dario Fo est né en 1926 au bord du Lac Majeur, dans une famille prolétarienne (son père était cheminot) de tradition démocratique et antifasciste. De ses années de jeunesse il garde le souvenir des conteurs de la vallée du Pô, des fabulateurs qu’il allait écouter le soir, au café. Très tôt il comprend, grâce à eux, que les versions officielles de l’Histoire, les discours servis par le pouvoir et l’Église doivent être revisités, contrebalancés par le « point de vue du peuple », plein de bon sens et de coeur. Toute sa vie d’artiste, vie aux facettes si multiples – il est comédien, peintre, dramaturge, metteur en scène, historien de l’art – il va la consacrer à explorer la généalogie de la culture populaire, à chercher dans les évangiles apocryphes, les fabliaux du Moyen Âge, les rythmes et les paroles des chansons traditionnelles, les fresques des églises romanes, les sculptures gothiques et même les tableaux des grands maîtres les preuves que la créativité, la culture ne sont pas, quoiqu’on en dise, le seul fait d’individus « raffinés et cultivés ». Dario Fo est, selon ses propres termes, « un peintre qui a mal tourné ». Formé à l’Académie des beaux-arts de Brera, il se destinait d’abord à l’enseignement artistique. C’est le besoin de transmettre et de partager – véritables moteurs de son art – qui vont le conduire, au début des années 1950, sur les planches. Cependant pas un seul de ses spectacles, de ses solos – où il donne si souvent l’impression d’improviser – n’a d’abord fait l’objet d’une série précise de croquis, de dessins. C’est sur cela que repose son art d’acteur.
Il est d’abord artiste de Varietà, de théâtre satirique plus exactement, puis acteur à la radio et au cinéma. Lui à qui, au moment de la remise du prix Nobel en 1997, on put reprocher de « n’être qu’un saltimbanque » commence sa carrière d’auteur dès 1952, en écrivant des émissions pour la radio italienne, des scénarios de films, des textes pour diverses revues satiriques, et enfin, des émissions de télévision. Toujours, chez Dario Fo, l’écriture va de paire avec le jeu théâtral – jeu nourri de la commedia dell’arte mais aussi de son expérience d’acteur de revue, de cinéma et de télévision – tout en répondant à la double exigence d’un « rétablissement de la vérité à usage populaire » et d’une prise directe sur l’actualité. Nombre de ses pièces ont connu un nombre infini de versions. Il y eu des périodes où les textes « de transition » de son célèbre Mystère bouffe (présenté pour la première fois en 1968 et dont le corpus n’a cessé de s’enrichir depuis) variait chaque soir en fonction des événements politiques et sociaux qui secouaient l’Italie ou les pays dans lesquels il tournait.
Les années qui ont suivi les révoltes de Mai 68 ont transformé Dario Fo « artiste critique de toutes les formes d’abus de pouvoir » en « jongleur au service du peuple ». C’est de cette période que datent ses pièces et ses textes les plus engagés – créés avec le collectif, La Comune, qu’il gère avec sa femme et muse de toujours Franca Rame ; Mort accidentelle d’un anarchiste, Faut pas payer !, Feddayn, Pan ! Pan ! Qui c’est ? La police !, ou encore L’ouvrier connaît 300 mots, le patron 1000, c’est pour ça qu’il est le patron. Dario Fo est, selon la belle formule de José Guinot, son éditeur en France, un « acteur créateur de langage ». Ce langage de Dario Fo se sert d’armes d’une efficacité redoutable, sources de sa renommée mondiale : la satire. Le rire et l’ironie sont, pour lui, le meilleur moyen pour le public de prendre conscience de la réalité des choses et de démystifier les discours hypocrites. Ils imprègnent tous ses « fabulages » (Le Tumulte à Bologne, La Parpaillole souricette), toutes ses « histoires » (celle du tigre, celle de Johann Padan, celle de saint François le divin jongleur), tous ses « contrastes », tous ses « récits »…
Cette rage de démystification lui a valu, sa vie durant, bien des démêlés avec la censure. Censure réelle lorsque son émission satirique du début des années 1960, Canzonissima(regardée par l’Italie entière) est interdite, censure plus subtile quand il lui faut contourner - avec joie au demeurant - de nombreuses années durant les refus plus ou moins polis des teatri stabili (les théâtres d’État italiens) de programmer ses spectacles. Dario Fo n’a jamais hésité à affronter les malversations du pouvoir à quelque niveau que ce soit, et de quelque bord qu’il s’exerce. Cela n’a pas toujours été sans danger (dans les années 1970 sa femme Franca fut même enlevée par un groupuscule néo-fasciste). Il a depuis quelques années un adversaire de choix, source inépuisable de satire et de critiques virulente de sa part : un certain Silvio Berlusconi. Mais, à 83 ans, l’engagement de Dario Fo ne se limite pas à une dénonciation des pratiques abusives de la politique contemporaine ; rares sont les causes liées aux droits de l’homme, à l’environnement, au refus des guerres qu’il ne soutient pas.
Sur le plan artistique, Dario Fo est revenu à ses premières amours : la peinture. Mais comme le virus du jeu et des planches est loin de l’avoir quitté, on peut le voir encore, deux à trois fois par an, arpenter les scènes du Piccolo Teatro ou les parvis des églises, lors de spectacles conférences sur l’histoire de l’art où - avec force dessins de sa main à l’appui - il réinvente, avec la fougue irrévérencieuse qui le caractérise, l’histoire du Caravage, de Giotto, de Léonard de Vinci, de Mantegna, ou encore celle de saint François d’Assise ou de saint Ambroise, le saint patron de Milan, sa ville (à la mairie de laquelle il s’était même présenté en 2006).
Dario Fo est un homme et un artiste infatigable. Et quand il parle, on dirait qu’il a vécu trois vies.
Laurent Muhleisen, conseiller littéraire de la Comédie-Française, janvier 2010
En 1997, Dario Fo obtient le Prix Nobel de Littérature. C’est la première fois qu’un homme de théâtre acteur-auteur-metteur en scène reçoit une telle distinction.
Il gagne également un Molière, à Paris, en 2000 pour Mort accidentelle d'un anarchiste puis devient l'un des premiers satrapes étrangers du Collège de ’Pataphysique en 2001 avec notamment Umberto Eco.
Dans les années 2000, il écrit des charges contre Silvio Berlusconi et ses démêlées judiciaires dans Ubu roi, Ubu bas, et L'anomalo bicefalo. Il participe au film Zero : enquête sur le 11 septembre du journaliste et député européen italien Giulietto Chiesa.
Engagé politiquement depuis longtemps, il se présente aux élections du 29 janvier 2006 à la mairie de Milan et obtient plus de 23 % des voix, contre Bruno Ferrante. Il est aujourd'hui conseiller municipal.
En 2006, il est nommé docteur honoris causa de la prestigieuse université de Rome « La Sapienza », comme avant lui Luigi Pirandello et Eduardo De Filippo.
En 2010, l’œuvre de Dario Fo est particulièrement reconnue en France : sa pièce Mystère bouffe et fabulages fait son entrée au répertoire de la Comédie-Française (mise en scène par Muriel Mayette), où il a été lui même un metteur en scène apprécié autrefois, et ses pièces sont inscrites au programme du concours de l'agrégation d'italien.
Il est mort le 13 octobre 2016.
« Le dessin m’a toujours aidé à réfléchir, à résoudre les problèmes de trame. Préciser sa pensée non seulement avec des mots mais avec des images est un excellent système. » Le Monde selon Fo (Fayard), p.55.
« Mouvoir le tronc et les membres, avec élégance et à-propos, sans affectation, c’est par là que commence le théâtre. La clé de voûte de notre métier, ce devrait être l’apprentissage de la technique respiratoire, du mouvement jusqu’à l’acrobatie, avant même le placement de la voix. » Le Gai Savoir de l’acteur (L’Arche éditeur), p.63
« Faire du théâtre signifie avant tout savoir communiquer, faire en sorte que ce que vous dites arrive à ceux qui sont devant vous. Sans exception aucune, sans jamais lasser leur attention… Pour établir ce contact extraordinaire, il faut savoir déclencher la curiosité et la complicité, stimuler l’imagination et puis laisser l’autre entrer dans votre propos, en l’incitant à participer, à compléter avec vous. Le bon comédien et le bon enseignant ont beaucoup en commun. Ni l’un ni l’autre ne doivent rester en chaire, prétendre qu’ils ont raison. Pontifier, c’est bon pour les papes. » Le Monde selon Fo, p.39
« Aucun historien du christianisme ne peut faire abstraction des évangiles apocryphes. Ils sont très nombreux. Contrairement aux quatre textes adoptés par l’Eglise, qui ont subi des modifications et des adaptations en fonction des situations historiques, les évangiles apocryphes n’ont jamais été altérés et ont gardé intacts personnages et situations. » Le monde selon Fo, p.84
« À propos du fait de plaisanter sur des choses très sérieuses, dramatiques ; ce que nous voulions, c’est faire comprendre que c’est [le rire] qui permet et qui permettait (car c’est bien dans la tradition du jongleur) à l’acteur du peuple de toucher les consciences, d’y laisser quelque chose d’amer et de brûlant… Si je me contentais de raconter les ennuis des gens sur le mode tragique, en me plaçant d’un point de vue rhétorique, ou mélancolique, ou dramatique, j’amènerais les spectateurs à s’indigner, un point c’est tout ; et tout cela glisserait sur eux, immanquablement (..) il n’en resterait rien. » Mystère bouffe (Dramaturgie), p. 42
« Il ne faut jamais laisser aller jusqu’au bout ni les applaudissements, ni les rires, surtout quand ils sont fondés sur l’émotivité : il faut alors dominer le public, pour garder le rythme, absolument. Il faut se rappeler que souvent, seule une partie du public essaie de vous entraîner, les autres se contentent peut-être de deux pauvres battements de mains, sans compter ceux qui, toute la soirée, restent là, emplâtrés, immobiles, ahuris, à se demander : " Mais où suis-je tombé ? " Le Gai Savoir de l’acteur, p.186
« On administre [aux gens] des overdoses de faits divers… Un catalogue de l’horreur de plus en plus sinistre, de plus en plus kitsch qui supplée à quelque chose de très important : les émotions, dont nous avons besoin, et que beaucoup de gens ne savent plus éprouver… Nous sommes encore et toujours dans les mêmes arènes païennes. L’époque change, mais le problème de l’homme semble rester le même : chasser l’ennui. » Le Monde selon Fo, p.64
« Existe-t-il une culture populaire ? Cette question m’a toujours laissé comme deux ronds de flan : comment douter qu’une telle richesse d’expression créatrice existe ?» Le Monde selon Fo, p.103
« Je ne suis pas un modéré. » Slogan de Dario Fo lors de la campagne pour les élections municipales de Milan en 2006
« Si l’humanité n’avait pas en son sein [un] bon pourcentage de fous, elle ne serait plus là depuis longtemps. Quelqu’un comme le Christ qui bouleverse son époque en portant une parole nouvelle et se fait tuer pour sa foi était fou, sans l’ombre d’un doute. Mais le pauvre type qui toute sa vie poursuit un défi est fou aussi. Les artistes, les inventeurs, les explorateurs de terres et d’idées, ceux qui osent changer les règles, envoyer valser l’ordre constitué, le sens commun, les logiques aristotéliciennes et tout le saint-frusquin ont été, sont et seront tous fous. » Le Monde selon Fo, p.193
« Le jeu, le courage et l’ironie sont les trois éléments qui seuls peuvent rendre supportable l’idée de la fin. » Le Monde selon Fo, p.61
Espace Marcel Carné, Saint-Michel-sur-Orge
Une réalité sombre dépeinte dans une fresque burlesque, voilà la comédie qu'adapte Bernard Levy d'après un texte de Dario Fo et Franca Rame.
Avant-Seine, Colombes
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Théâtre de Corbeil-Essonnes, Corbeil-Essonne
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Théâtre Sénart, Lieusaint
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Cartoucherie - Théâtre de la Tempête, Paris
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Théâtre Suresnes - Jean Vilar, Suresnes
Essaïon, Paris
Théâtre de l'Œuvre, Paris
Théâtre Darius Milhaud, Paris
Comédie Saint-Michel, Paris
Guichet Montparnasse, Paris
Théâtre du Marais, Paris
Lucernaire, Paris