Amamonde

En se saisissant d'un matériau documentaire sur les entrepôts logistiques d'Amazon, Amamonde interroge au plateau la folle logique du capital qui mécanise nos gestes et distord notre rapport au temps.
  • Farce tragique

En se saisissant d'un matériau documentaire sur les entrepôts logistiques d'Amazon, Amamonde interroge au plateau la folle logique du capital qui mécanise nos gestes et distord notre rapport au temps.

Quatre comédiens-danseurs, une chanteuse électro et ses machines, une vidéaste, une architecture de sable et de cartons. Marion Delplancke en collaboration avec Jean-baptiste Malet mène un travail d’écriture au plateau.

« Il est des réalités si absurdes qu’elles en deviennent effroyablement théâtrales. La mécanisation des gestes et des rapports humains sévit dans les entrepôts d’Amazon. Ces zones de stockage sont le théâtre d’un monde bâti sur le capital. Dédale est réincarné par l’accumulation et les rayonnages créant un labyrinthe contemporain. Le monde est renversé. Dans cette usine à faire le vide qui ne produit plus rien que du déplacement, les hommes sont devenus livreurs de temps. Ils s’épuisent pour déplacer l’objet, se dépècent de leur humanité pour habiller les choses. Amamonde est l’épilogue de cette dystopie. » Marion Delplancke, metteure en scène / Beautiful Losers

Par Antisthène et la Compagnie Marlou Théâtre, Collectif beautiful losers.

  • Un triptyque sur la marchandise

Le spectacle se déploie dans un changement d’échelle, qui joue avec les différents degrés d’apparition de l’acteur.

De l’infiniment petit...
Prologue sur le fétichisme de la marchandise
Dans une forme brechtienne, très ouverte sur le public, les acteurs décortiquent le concept de marchandise en s’aventurant dans la lettre de Marx et les premiers chapitres du Capital. Cette introduction ludique ancre la base conceptuelle de tout le spectacle. Un combat sans merci se joue entre la valeur d’échange et la valeur d’usage. Les choses se vident de leur contenu sensible pour ne devenir que pure quantité de temps abstrait. La marchandise est un abîme, on a le vertige quand on se penche dessus. On s’amuse à loucher sur cette première brique du système capitaliste, au risque d’être ébloui et d’entrevoir en un faisceau, toute l’histoire de notre société marchande, avec au bout les entrepôts d’Amamonde qui en sont l’ultime extrapolation.

... à l’infiniment grand
Amamonde, l’entrepôt imaginaire
Dans le deuxième volet, le rapport au jeu devient plus masqué et physique. A l’intérieur de l’entrepôt s’est creusé une galerie de personnages, clowns contemporains, créatures sorties de la cuisse de la marchandise. Le public est invité à pousser les portes d Amamonde. C’est Hermès Bessos, le leader des leaders, sourire carnassier et voix langoureuse qui inaugure avec Miss Toyota, vestale des principes sacrés de son grand père cette journée porte ouverte ; un grand concours est lancé : qui sera de tous les employés d Amamonde le plus performant ? On ramasse, on emballe, on pick, on pack. Dans cette usine à faire le vide qui ne produit plus rien que du déplacement, les hommes sont devenus les esclaves des choses, leurs porteurs zélés. Les amamondiens piétinent, courent, s’épuisent pour déplacer l’objet. Ils se dépècent de leur humanité pour habiller les choses. Dans ce monde renversé, la parole se fait rare ou obstruée.

… et retour aux planches
Epilogue pirandellien
Au fil du jeu, la machinerie se détraque. Dans les interstices la vie se rebiffe et nos clowns s’octroient des effractions poétiques entre les rayonnages. La forêt métallique de l’entrepôt se repeuple de symboles. L’acteur venge l’agent logistique et se remet à jouer avec les objets en circulation, se laisse influencer par leur forme, leur couleur et la musique que les choses peuvent produire si on les prend pour ce qu’elles sont. Un réseau de correspondances se tisse en direct et l’espace de l’entrepôt bascule en zonage imaginaire. Terrain vague où se croisent des spectres oubliés, un papillon d’Amazonie, Alice à la poursuite de son chat Schrödinger, une star de karaoké, une dresseuse d’oiseaux en cartons, une diablerie circassienne. Mais cette course en avant dans le jeu ne manquera pas de se cogner contre l’écran de fer d’Amamonde et de questionner dans un ultime retournement pirandellien, les fondements et la fragilité de l’artisanat théâtral.

  • Origine du projet

Dans l’antre du monstre au sourire fléché
Le point de départ de ce nouveau projet de création est notre rencontre avec le journaliste Jean Baptiste Malet et son enquête d’investigation En Amazonie, infiltré dans « le meilleur des mondes ». Pénétrer dans les coulisses de ce géant du commerce en ligne, c’est s’engouffrer dans l’antre du fétichisme de la marchandise et découvrir le monde kafkaïen qui se joue de l’autre côté de l’écran.

Des marchandises s’amassent au hasard dans de gigantesques entrepôts. Les écrits de Blanqui coudoient un paquet de slips pour homme, un ours en peluche, des condiments pour grillade ou Métropolis de Fritz Lang. Femmes et hommes astreints au silence, hébétés par la fatigue se fraient un chemin dans la jungle froide des rayonnages. Leur travail est réduit aux gestes les plus primitifs : ramasser, emballer. Le dessin aléatoire de leurs déambulations nocturnes est tracé par un ordinateur central. Ultra surveillance, délation institutionnalisée : tout est savamment orchestré pour pulvériser le dialogue entre les travailleurs et laisser régner l’incessant flux et reflux des marchandises.

Mettre du jeu dans les rouages
« On ne pense pas les choses pour rencontrer la réalité mais pour comprendre les rouages. » Kafka

Ces zones de stockage sont pour nous la métaphore vivante d’un monde bâti sur le capital. Il est des réalités si absurdes qu’elles en deviennent effroyablement théâtrales. Nous voulons nous emparer par la fiction de cette matière documentaire, inventer des effractions poétiques et donner corps par le jeu à ce monde de carton.

L’engourdissement de la pensée, la mécanisation des gestes et des rapports humains qui sévit dans les entrepôts d’Amazon questionne plus largement notre relation intime à l’existence : comment garder un rapport vivant avec nous-mêmes, les gens, les choses, le monde qui nous entoure ?

Lutter contre la routine, l’informe musique du travail répétitif, créer des interstices d’où jaillit l’organique et la surprise ; c’est bien le propre du théâtre. Mais notre petit monde de bois, ses chimères et ses lunes en cartons, est fragile. Si les feux de la rampe vacillent sous l’ombre portée d’Amamonde, nous fourbissons encore nos épées en bois et nos armes d’histrion …

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Théâtre de Belleville
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Spectacle terminé depuis le vendredi 31 mai 2019

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