Figure majeure du théâtre flamand, Guy Cassiers choisit Racine pour sa deuxième mise en scène à la Comédie-Française, après Dostoïevski dont il a adapté Les Démons Salle Richelieu en 2022.
Bérénice ouvre de multiples voies de réflexion à cet artiste dont le théâtre interroge l’histoire européenne, la prégnance des discours politiques mais aussi la dimension humaine dans les affaires d’État et les résonances actuelles avec le répertoire. Dans cette intrigue réduite à sa plus simple expression, la beauté de la langue contraste avec la confusion des émotions d’un triangle amoureux. Titus, qui aime et est aimé de Bérénice, est face à un dilemme quand il devient empereur de Rome à la mort de son père, le Sénat réfutant toute union avec une reine étrangère. Guy Cassiers oppose une Bérénice forte à la lâcheté de Titus et de son ami Antiochus, également épris d’elle et qui tentera de retarder l’implacable échéance de son départ.
Racine voit sa Bérénice – créée à la Comédie-Française en 1680 – représentée dans une forme des plus novatrices, signant l’alliance d’un grand classicisme dans le texte et d’une remarquable modernité visuelle. Reconnu pour sa maîtrise des technologies de l’image et leur imbrication dans les enjeux dramaturgiques, Guy Cassiers imagine le lieu de l’intrigue – la chambre de Titus et celle de Bérénice, « antichambre où le temps semble suspendu » – en évolution permanente selon les états psychiques des personnages, grâce à des images projetées en ayant recours au mapping et à l’intelligence artificielle. La Troupe portera ainsi la langue de l’auteur au sein d’un environnement fluide, au cœur du conflit entre responsabilité politique et intimité, et en lien avec la question cruciale qu’il pose : « Comment se dire adieu ? »
Bérénice est l’histoire d’un trio amoureux, avec laquelle Racine pose cette question, fondamentale : qui suis-je ? La pièce parle de notre difficulté à intégrer l’amour dans nos vies, et de la façon dont nous cherchons le cadre idéal pour vivre une relation d’amitié ou d’amour, sans jamais y parvenir. Les dialogues sont majoritaires, mais les paroles semblent être adressées à soi-même, comme si chaque protagoniste, à la recherche de son identité, cherchait à se convaincre personnellement, à se situer dans son rapport au pouvoir et à ses désirs avec les doutes qui l’habitent depuis des années. Le langage y est à la fois un outil de compréhension et un système de défense, pour se protéger d’autrui et du monde. C’est un cadre passionnant théâtralement. Nous assistons – en temps réel car il n’y a pas d’ellipses – au climax d’une confrontation complexe avec soi. Et derrière l’incroyable beauté de la langue, il y a une véritable cruauté à déconstruire les caractères des autres pour composer sa propre image.
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Ce qui m’intéresse aussi, c’est d’approcher une universalité de l’amour : ce choix de distribution [faire incarner Titus et Antiocus par Jérémy Lopez, et leurs confidents respectifs, Paulin et Arsace, par Alexandre Pavloff] nous fait progressivement quitter le trio amoureux pour être dans l’échange entre deux êtres qui disent s’aimer. Au début, les deux membres du binôme sont clairement différenciés, grâce au jeu de l’acteur bien sûr, et un simple manteau. Pour les premières scènes où ils dialoguent ensemble, il s’agit de truchements élémentaires, tels que la voix de Jérémy Lopez préenregistrée, une silhouette dans l’ombre. Nous sommes là dans l’illusion d’une situation réaliste où deux personnages, interprétés par un seul acteur, se rencontrent physiquement. Puis, à Alexandre Pavloff, Jérémy Lopez, Clotilde de Bayser, Suliane Brahim force de passer de façon fluide d’un caractère à l’autre, c’est naturellement qu’ils forment une seule entité. De même pour les confidents. L’idée est d’opérer en magicien et d’induire dans l’esprit du public la possibilité de se rencontrer soi-même ! Ce choix ouvre également une réflexion passionnante sur la nature de l’adresse, qui est pour moi au fondement du théâtre : comment s’adresse-t-on sur scène à un autre personnage, quelle relation entretient-on avec le public pour réfléchir ensemble au sens du texte. C’est une grande aventure pour Jérémy Lopez et Alexandre Pavloff, mais aussi pour Suliane Brahim sur la façon de s’adresser à un partenaire double, selon des angles différents.
Guy Cassiers
TRÈS BONNE MISE EN SCÈNE ET INTERPRÉTATION !
Le metteur en scène, Guy Cassiers, a voulu être original à tout prix en confiant au même acteur 2 rôles, Titus et Antiochus. Je ne l'ai compris qu'après la fin de la représentation. Et je ne suis pas le seul à ne rien avoir compris, bien que connaissant bien la pièce. Il faut arrêter ces mises en scène hermétiques qui veulent être innovantes à tout prix. Quel gâchis avec de si excellents acteurs
Pour 2 Notes
TRÈS BONNE MISE EN SCÈNE ET INTERPRÉTATION !
Le metteur en scène, Guy Cassiers, a voulu être original à tout prix en confiant au même acteur 2 rôles, Titus et Antiochus. Je ne l'ai compris qu'après la fin de la représentation. Et je ne suis pas le seul à ne rien avoir compris, bien que connaissant bien la pièce. Il faut arrêter ces mises en scène hermétiques qui veulent être innovantes à tout prix. Quel gâchis avec de si excellents acteurs
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