Ce projet sonde avec délicatesse et humour, sensibilité et lyrisme, un certain dysfonctionnement relationnel féminin : la puissance de projection amoureuse face à une caractéristique souvent masculine, le silence.
Clyde Chabot travaille par strates et versions successives d’un même texte dans un processus de recherche et d’approfondissement qui se prolonge sur plusieurs années. La création cette année est la 4ème et dernière exploration du texte Christophe S.
L’écriture scénique se nourrit d’une étape à une autre, le projet est intériorisé par les acteurs dans un mouvement de maturation longue, les liens dans l’équipe se resserrent, de nouveaux collaborateurs rejoignent le projet, le sens du texte est renouvelé.
Les personnalités et parcours des artistes réunis ont permis à Clyde Chabot d’esquisser une écriture scénique performative : à la fois précise et intuitive, élaborée en commun en amont et donnant une part importante à la subjectivité de chaque artiste au présent.
Acteurs, vidéaste, créateur sonore et " interprète lumineux " sont les instrumentistes d’une interprétation multidisciplinaire et chorale du texte, d’un orchestre dont seuls les acteurs sont à vue mais qui comprend bien les quatre pôles de cette création.
« Sous ce titre énigmatique se blottit un texte magnifique, paysage intérieur d’un instant T, d’un évènement en marge de la vie telle qu’on la connaît, chronologique et ordinaire. (...) Christophe S. est la prière d’une femme romantique et cultivée, son incantation à l’homme volatilisé. Un bouleversant adieu. » Marie Plantin, Première, janvier 2014
Les faits sont les suivants. Le TGV partant de Bordeaux en direction de Paris, le 17 mai 2013, s'est arrêté en pleine voie. Après quelques minutes d'arrêt, le contrôleur a annoncé : Nous avons renversé quelqu'un.
A ce moment, j'ai cherché un lieu de recueillement. Une possibilité de partage. Le bar m'a semblé un lieu possible. Une femme de couleur noire portant une robe rouge vif s'y est rendue. Je lui ai emboîté le pas, pensant qu'elle se sentait peut-être aussi appelée par un besoin de deuil collectif. Alors que les autres passagers du wagon passaient déjà des coups de téléphone pour informer avec mauvaise humeur leurs correspondants de leur retard.
La femme de couleur noire à la robe rouge vif a seulement acheté un sandwich.
Un groupe d'hommes bruyants, que j'avais déjà vus deux heures auparavant buvant des bières, parlait à haute voix, heureux et fiers de leur humour de circonstance. Tendant leurs verres, ils ont dit : ah ! Il faut bien boire à la santé de quelqu'un ! ! Et un autre en faisant le geste d'un coup de volant sur la droite : Ben, le chauffeur, il aurait quand même pu l'éviter ! !
J'ai croisé votre regard. Je vous avais vu aussi deux heures auparavant. Barbu, presque roux, pas particulièrement grand, des vêtements marrons. J'ai esquissé un sourire. Je suis venue vous voir.
13, rue Pierre Sémard 94400 Vitry-sur-Seine