L’enfance d’Alfredo Arias en Argentine coïncide avec le premier mandat présidentiel de Juan Perón, élu en 1946, figure autocrate à la tête d’un mouvement populiste, et qui sera chassé du pouvoir par les militaires en 1955 : « Nous vivions jusque-là dans une sorte de protection féerique, mais cet univers s’est révélé un opéra sinistre et angoissant. »
C’est donc dans cette patrie péroniste que s’était établie une patrie pétroniste, du nom d’une célèbre cuisinière, Doña Petrona de Gandulfo : personne ne manquait l’émission culte et kitsch qu’elle animait à la télévision et où elle confectionnait, en direct, ses extravagantes créations. Plat : Horloge, Chaussure, ou gâteau : Chapelle de mon village, La montre… le montage en accéléré donnait à la leçon un caractère absurde et désopilant.
La célèbre pâtissière n’a pas seulement offert aux plus modestes un rêve de luxe, d’invention, d’évasion : elle a aussi influencé Alfredo Arias qui, sous le nom de Al, dialogue ici en personne avec elle, évoquant les conflits de son enfance entre une mère intrusive et un père indifférent.
Portrait de l’Argentine des années 50 par un exilé qui transfigure son pays dans un prisme de fantaisie visible et de mélancolie invisible.
« Notre Argentin de Paris raconte tout en vrac et en chansons. Il vide la besace (bien chargée) de son enfance dans les années 50 à Buenos Aires comme il chanterait une comptine initiatique douce-amère et obsédante. Et le meneur de cette drôle de revue qui tente de faire le pont entre le passé enfoui et une vie d'adulte bien accomplie, c'est lui, Alfredo Arias. A 66 piges bien sonnées, il revêt perruque et redingote enfantine aux couleurs de l'Argentine, sans que cela ne soit ridicule : sa présence tendre envoûte. Entre les milongas sirupeuses de la chanteuse Andrea Ramirez, il dialogue avec le fantôme de Doña Petrona, insubmersible vedette d'une émission de cuisine qui faisait concurrence, dans son univers imaginaire, à Evita Perón, princesse « walt-disneyenne » et femme du dictateur... Autant de figures chez lui nécessaires pour barrer la route à la tyrannie maternelle. » Telerama Sortir
« Entre histoire familiale et histoire politique, Alfredo Arias réanime ses fantômes en les plongeant dans la pâte d’une fantaisie goûteuse à souhait, toute pétrie de savoureux dialogues, de jeux d’ombres et d’ironie, une friandise discrètement nappée de tendre mélancolie, le tout superbement enrubanné d’intermèdes chantés par Andrea Ramirez. » Webthéâtre
« C'est une véritable oeuvre d'art, servie par une mise en scène graphique aux couleurs de l'Argentine et rythmée par les pas de danses et autres allersretours entre ombre et lumière des comédiens. C'est un festival de saveurs mais sous le sucré, l'on découvre, grâce à l'ironie et aux bons mots des personnages, le piquant, l'amertume et l'acidité d'une enfance marquée par l'indifférence d'un père et l'obsession d'une mère désireuse de faire rentrer son fils dans le moule. » Reg'Arts
Les conflits d'Alfredo Arias avec sa famille ne pouvaient que resurgir sous forme transfigurée, avec douleur, mais aussi ironie, tendresse, fantaisie dans ses spectacles et dans la représentation qu’il pouvait se faire et donner aux autres des rapports familiaux et sexuels. L’origine argentine d’Alfredo signifie surtout la persistance de son enfance dans sa création artistique, au-delà des drames politiques qui l’ont conduit à choisir l’exil et à affirmer son talent dans un environnement culturel européen.
Alfredo circule entre les cultures et les genres, exactement comme il circule entre les continents, entre les langues et entre les classes sociales. De son expérience de plasticien à l’Instituto Di Tella, il conserve aussi une habitude de dialogue avec d’autres arts. Déjà, dans Mortadela, il avait évoqué sous une forme onirique et spectaculaire son enfance et tracé les fondements de son esthétique : son goût pour la magie, pour le music-hall, pour les chansons, pour la danse, la revue, la milonga, les boléros, la radio, le rêve, le fantastique, le comique naïf, le mélodrame, les incertitudes sexuelles. C’est argentin, mais c’est aussi universel.
René de Ceccatty
Route du Champ de Manœuvre 75012 Paris
Navette : Sortir en tête de ligne de métro, puis prendre soit la navette Cartoucherie (gratuite) garée sur la chaussée devant la station de taxis (départ toutes les quinze minutes, premier voyage 1h avant le début du spectacle) soit le bus 112, arrêt Cartoucherie.
En voiture : A partir de l'esplanade du château de Vincennes, longer le Parc Floral de Paris sur la droite par la route de la Pyramide. Au rond-point, tourner à gauche (parcours fléché).
Parking Cartoucherie, 2ème portail sur la gauche.