Et jamais nous ne serons séparés

Trois voix dans la nuit, la nuit du théâtre
Qui sont-elles ?
Nous ne le savons pas
Où sont-elles ?
Ailleurs
Parlent-elles ?
Elles en doutent elles-mêmes
Sont-elles, même ?
C’est à peine probable, tout juste imaginable
Ici règne l’incertitude, ici le doute est la règle
Un espace intermédiaire s’est ouvert, un seuil a été franchi
Nous voici dans l’antichambre du Monde
Hors de la Vie mais pas non plus dans la Mort
Entre Vie et Mort donc…

Ces deux premières pièces (Et jamais nous ne serons séparés et Un jour en été) forment en quelque sorte un diptyque dont les thèmes centraux seraient la perte de l’être aimé et l’attente de son retour, Dors mon petit enfant constituant une sorte d’épilogue métaphysique.

Jon Fosse est surtout un maître du silence, mais sans didactisme. Ses pièces sont toutes des tragédies silencieuses dans lesquelles la langue ne sert plus à exprimer des pensées ou à formuler une demande. La parole devient au contraire une sorte de consolation de l’inutilité de vivre, d’agir et de comprendre. Il cherche une langue simple et artistique en même temps, mais il s’attache aussi à composer un rythme précis de parole et de silence. Il s’agit de mettre en valeur ces éléments paradoxaux en travaillant à une élaboration d’une partition scénique à partir d’actions physiques se développant dans une structure très précise. 

Fabrice Michel