Trois femmes seules, à l’heure du bilan, rassemblent l’inventaire des hommes et des objets qui, au-delà des hasards et du désordre, auront donné un peu de sens à leur vie. La Compagnie L’Interlude, en résidence dans le Pas-de-Calais, a réuni trois comédiennes, un piano et une contrebasse pour interpréter cet oratorio populaire des temps modernes aux tonalités sensibles et enjouées.
Après notre travail sur des textes d’auteurs du XXe siècle (Dagerman, Navel, Calvino, Miller... ), nos diverses collaborations avec François Chaffin récemment en résidence à La Chartreuse, il s’agit d’une nouvelle rencontre avec une écriture contemporaine liée depuis longtemps au musical. Écoutons Robert Cantarella : «Philippe Minyana écrivait déjà des livrets. Pour acteurs. Ceux qui les jouent le savent. Il faut chercher la hauteur, la posture, le timbre, le rythme, l’attaque, le soubassement énergétique... À chaque fois, la matière textuelle, sa disposition, son «encrage» supposent une vision musicale. Pas besoin de se raconter d’histoires. Par contre, une étude scrupuleuse de la « partition» écrite est nécessaire.» Pourquoi Inventaires ? Pour son rapport à ce journal intime moderne et médiatisé qu’est le reality-show, pour cette parole individuelle collectivisée, pour cet étalage d’histoires radio-télévisées sur lesquelles le théâtre vient à distance poser un regard où se mêlent dureté et tendresse, rires et grincements. Inventaires, pour sa profonde mélancolie à l’égard d’une époque, à l’égard des femmes d’une époque ( celle d’après la Libération ), pour ces paroles qui sont encore les nôtres. Pour transcrire cet univers, il nous a semblé que la musique était l’élément d’irréalité nécessaire à cette confrontation avec la réalité dont parle dans les mêmes années le peintre Dubuffet, celle qui donne à une œuvre tout son relief, toute sa richesse d’interprétation, toute sa poésie, toute sa vie.
Eva Vallejo, Bruno Soulier
4, place du Général de Gaulle 59026 Lille