Jaz

Avignon (84)
du 16 au 22 juillet 2016
50 minutes

Jaz

Jaz est le monologue d’une femme qui semble ne pas parler en son nom propre. C’est une pièce qui a pour thématique principale la question de la violence faite aux femmes. Jaz est une fille seule qui vit dans une cité laissée à l’abandon. Au milieu de cette décrépitude, Jaz est un pilier pour son entourage, jusqu’au jour où l’un de ses voisins, qui l’observait depuis un certain temps, la viole.
  • Parole post-traumatique

Jaz est le monologue d’une femme qui semble ne pas parler en son nom propre. C’est une pièce qui a pour thématique principale la question de la violence faite aux femmes. Jaz est une fille seule qui vit dans une cité laissée à l’abandon. Au milieu de cette décrépitude, Jaz est un pilier pour son entourage, jusqu’au jour où l’un de ses voisins, qui l’observait depuis un certain temps, la viole.

La parole post-traumatique est ici vibrante. La structure versifiée proche de la rythmique du jazz, faite de contretemps et de syncopes, semble être la voix même de la psyché fissurée, le chant du cauchemar que l’on retraverse. Dire les maux, les dénoncer, en les exposant sans demi-mesure. Comme une catharsis.

  • Note de mise en scène

En 2010, Astrid Bayiha m’a fait découvrir ce texte qu’elle souhaitait interpréter. Son désir de comédienne rencontrait un questionnement humain et artistique dans lequel je me suis également reconnu.

Je porte depuis longtemps une profonde envie d’interroger l’impression que j’ai que vivre dans cette société en étant une femme n’expose pas aux mêmes menaces, réelles ou fantasmées, que lorsque l’on est un homme.

L’agression d’un homme n’est bien entendu pas moins grave que celle d’une femme, mais elle est bien plus surprenante. Les femmes apprennent à vivre avec la possibilité de leur agression par les hommes. Beaucoup parmi elles en viennent à développer des stratégies au quotidien pour se protéger de l’expression du désir des hommes. Elles sont sur la défensive. Sans relâche. Ce positionnement influe nécessairement sur la construction de soi : il ne faut pas être trop ceci, ni trop cela pour ne pas provoquer. Malgré tous ces efforts, la violence s’impose parfois. Comment peut-on se reconstruire après avoir éprouvé la matérialisation de cette violence au préalable latente, anticipée, pressentie ? Comment se vivre dans l’après coup d’un viol qui, outre l’horreur propre engendrée par cet acte, semble révéler le fond d’une violence socialement admise ? Une femme est seule en scène. Elle semble répondre à un interrogatoire, mais elle n’a pas d’interlocuteur direct.

« Je ne suis pas ici pour parler de moi mais de Jaz »

Cette distance laisse planer un doute quant à l’identité de la narratrice. D’où parle-t-elle ? Au nom de qui ? Les différents événements qu’elle évoque sont-ils une stricte transcription de la réalité ou une métaphore, voire une déformation cauchemardesque de celle-ci (Ces toilettes bouchées qui débordent au point de maculer tout l’immeuble ; la tendre relation de Jaz avec Oridée et sa mort tragique étouffée par le masque derrière lequel elle avait choisi de cacher sa beauté ; la coutume de la Cité d’enterrer les morts avec leurs objets) ? Et, plus radicalement, cette Jaz au nom de laquelle on parle et la narratrice sont-elles une seule et même personne ?

Des indices vont en ce sens, et on pressent alors comme une disjonction chez cette femme dont l’inconscient tente d’enterrer la trop grande douleur par le truchement inopiné de souvenirs prosaïques. La mise en scène s’attachera à déployer toutes ces fissures.

La parole post traumatique est ici vibrante. L’oeuvre de Koffi Kwahulé, et probablement Jaz plus qu’aucune autre, prend sa source d’inspiration dans le Jazz. Ici, la structure versifiée proche de la rythmique propre au Jazz, faite de contretemps et de syncopes, semble être la voix même de la psyché fissurée, le chant du cauchemar que l’on retraverse. Comment traduire le souffle de cette écriture sur scène ?

La mise en exergue de la musicalité du texte sera couplée à un travail directement musical. Pour cela, le choix est fait d’accompagner la parole par une voix chantée dont les interventions feront résonner une autre dimension du Jazz : l’improvisation. Cette voix, tantôt en soutien, tantôt en contrepoint de la parole, agira comme une émanation de cette dernière mettant en exergue les faces conscientes et/ou inconscientes de Jaz face à son récit. Ce souci de la musique et de la musicalité est également corrélé à cette quête de beauté qui rejaillit tout au long du texte et qui semble constamment poser cette question : la beauté peut-elle trouver sa place, exister et s’imposer au milieu des ténèbres ? La mise en scène s’attachera à faire vivre cette interrogation.

Ce sont donc deux femmes, deux comédiennes qui incarneront Jaz dans son entièreté, prenant en charge le texte et le chant. L’une dans toute sa dimension psychique, inconsciente voire cauchemardesque. L’autre dans sa chair et dans la décision irréversible qui s’impose à elle. Ces deux comédiennes sont de couleurs de peau différente. Ce choix s’impose dans un souci de symboliser l’universalité de la cause féminine. Cette dichotomie servira également à éclaircir et à matérialiser la dualité temporelle avec laquelle joue le récit. Ici, un temps à la troisième personne et le temps d’un énoncé à la première s’entrechoquent dans une temporalité déconstruite et énigmatique mue par la quête de sa propre cohérence.

La présence de tout élément de décor pouvant rattacher à une réalité concrète doit être réduite au minimum. Ainsi, couplée à un jeu de lumière spécifique, elle traduira scéniquement la défragmentation de l’espace mental.

Ayouba Ali

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Informations pratiques

La Parenthèse

18 rue des Etudes 84000 Avignon

Accès handicapé (sous conditions)
Spectacle terminé depuis le vendredi 22 juillet 2016

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