« Ma mère sniffait de la colle mais ce n’est pas héréditaire. »
Petit noyau dur d’une famille d’électrons nerveux. Une cuisine, un salon, une télé. Partout, des références aux séries des années quatre-vingts, aux chanteurs de charme et aux airs connus des pubs assénées. La mère espère le retour du fils, le père grossit, le trans se prépare pour jouer les reines de Broadway. Un enfant grandit comme il peut, apprivoise son ennemi intérieur, « seule personne essentielle ». Quatre dans un espace domestique, toujours au bord du gouffre et d’une schizophrénie ordinaire : vivre sa vie ou se fondre dans les modèles.
Kalashnikov est une bombe. Une explosion de sens, de signes, de drôleries grinçantes et de griffures tordantes. Chaque réplique fait mouche, et tue. C’est bête et méchant comme une baffe dans la tête d’un joli petit blond. Mais ça fait tant de bien. Cabaret trash, Kalashnikov passe en revue les folies des mythologies d’aujourd’hui, Cac 40, Marine Le Pen ou Lady Gaga opérées à foie ouvert et en chansons.
Élégant dandy de la débâcle, Stéphane Guérin est scénariste, auteur de chansons, poète. Il a signé pour Claire Nadeau, Micheline Presle, Sylvie Joly et autres des oeuvres noires et drôles : Messe basse, Les Soeurs cruelles, Playmobil carnage, ou La plage est très grande mais le sable est vieux et pas propre. Il trimballe une quarantaine nourrie aux cuisses bioniques de Super Jamie et à l’Ulysse de Joyce.
Son acolyte Pierre Notte, auteur de Moi aussi je suis Catherine Deneuve ou de J’existe (foutez-moi la paix) (au Rond-Point en 2009), se colle à la mise en scène d’un texte qu’il n’a pas écrit. À deux, ils s’emparent de la famille branque où tout part en vrille, les mots et les images, les coeurs et les têtes, les culs et les chemises.
Cauchemar claqué de couleurs vives, c’est une grenade à confettis, serpentins et bouts de peau. Gare aux éclats de tous genres et des plus mauvais.
« Évitant tout pathos ou excès, Pierre Notte transforme la boue en or, le trash en frisson, dans un espace presque nu, mais vibrant de lumières. Epousant les codes pour mieux les détourner, émaillant le drame de pointes d’humour noir, il apprivoise la violence avec des images chocs (le fils blessé à la guerre, rampant sur scène), mais sans sombrer dans le gore. La pièce est une claque ; la mise en scène de Pierre Notte, un petit miracle, et les quatre comédiens sur scène semblent en apesanteur. » Philippe Chevilley, Les Échos, le 3 juin 2013
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