Kingdom est le dernier volet de la trilogie qu’Anne-Cécile Vandalem a choisi de consacrer, avec une vitalité théâtrale réjouissante, à « l’échec de notre monde ». Après Tristesses et Arctique, ce spectacle est inspiré de Braguino, un documentaire étrange de Clément Cogitore.
Kingdom est le dernier volet de la trilogie qu’Anne-Cécile Vandalem a choisi de consacrer, avec une vitalité théâtrale réjouissante, à « l’échec de notre monde ». Dans Tristesses et Arctique, elle a raconté la faillite politique et le naufrage climatique de nos sociétés. L’impossibilité de l’avenir étant son sujet majeur, les enfants et leur regard ont toujours une place essentielle dans son théâtre. Ils sont ici au premier plan, d’autant plus lumineux que le propos est délibérément sombre. Kingdom est inspiré de Braguino, un documentaire étrange de Clément Cogitore. Le jeune réalisateur y a filmé une petite communauté de vieux-croyants repliée depuis plusieurs générations au fin fond de la taïga sibérienne, et que l’arrivée d’un autre groupe, lui aussi minuscule à l’échelle du paysage, a jeté dans la guerre...
Anne-Cécile Vandalem en tire l’histoire d’une famille qui a décidé depuis les années 1970, par choix écologique, de vivre en pleine nature – et qui se fera rattraper par la violence et par la haine. Raconter sur scène une immersion dans la taïga semble un défi : son théâtre le relève en conjuguant de saisissants moments de vérité et une conception plastique, cinématographique et sonore raffinée et captivante. Kingdom nous embarque dans une histoire qui tient à la fois du thriller familial, du conte et de la parabole. Retrouver à la scène le plaisir de la fiction, sa capacité à nous faire penser, c’est le pari d’Anne-Cécile Vandalem. Dans un monde que le progrès ne sauvera pas, il est urgent pour elle de redonner toute sa place à l’imaginaire.
« Une fiction épique qui nous embarque aux confins de la Taïga sibérienne pour assister au délitement d'une petite communauté animiste. Un spectacle troublant à voir aux Ateliers Berthier. » Philippe Chevilley, Les Echos
Comme dans la plupart de mes spectacles, la musique, composée par Pierre Kissling et Vincent Cahay, a un rôle très important. Elle est composée à partir d’éléments concrets de la scénographie qui sont sonorisés (eau qui goutte, volet qui claque, mobile entrainé par le vent, bruissement des arbres, instruments détournés...) qui sont traités et réinterprétés en direct par un musicien en salle. Cela répond à la nécessité de faire exister l’environnement dans lequel s’inscrit Kingdom, la forêt primaire, comme un protagoniste à part entière.
Alors que les zones de forêts dites primaires sont de plus en plus rares et délictuelles, cette forêt millénaire pourrait être la rémanence d’une nature vierge, préservée de l’empreinte moderne. Mais, il ne s’agit pas d’une Nature telle que nous la concevons, vivifiante et doucereuse, une sorte d’avatar de la nature créatrice ou de la nature cosmographique. Il s’agit d’une nature sauvage, riche de diversité, mais aussi hostile et dangereuse pour celui qui ne sait pas l’écouter.
Entre les éléments qui indiquent le temps qu’il fait, le chant des canards sauvages ou le cri des chiens qui annoncent une menace, le son de l’hélicoptère qui la confirme, un membre défunt de la famille, celui que l’on nomme le Sioux, semble aussi transmettre des signes à interpréter. Dans ce royaume, les morts, invisibles, existent pour ceux qui veulent bien les entendre. Un pouls battant ne cesse de s’amplifier, le cœur du Sioux ou la pulsation de la sève des arbres, pensent les membres de la famille.
Anne-Cécile Vandalem
8, boulevard Berthier 75017 Paris
Entrée du public : angle de la rue André Suarès et du Bd Berthier.