L’Annonce faite à Marie est un « opéra de chambre », d'après la pièce de Paul Claudel, composé pour six voix et un ensemble de musique mixte où les musiciens de l’Ensemble intercontemporain sont accompagnés par l’électronique. Par la musique autant que par la mise en scène, Philippe Leroux et Célie Pauthe ont remis l'auteur au cœur de ses écrits.
Résumer L’Annonce faite à Marie serait à la fois vain et dérisoire, car, pendant plus d’un demi-siècle, Paul Claudel a vécu avec ses propres personnages qu’il finit par désigner – dans un entretien au journal La Croix, en 1948 – comme « une poignée de locataires mécontents qui peuplent le sous-sol de [sa] conscience et ne [lui] laissent pas de repos. » Et, dès 1912, après plusieurs années d’écriture à la table de son atelier, l’auteur décrit déjà son œuvre comme « un opéra de parole », dans une lettre qu’il adresse à Lugné-Poe. L’Annonce faite à Marie est donc plus qu’un récit de miracle, plus qu’une histoire d’amour et plus qu’une étude de mœurs : si elle questionne à la fois les contradictions intimes de l’auteur, des personnages et des spectateurs, elle interroge aussi l’amoralité, car Paul Claudel aura démontré qu’être chrétien ne suffit pas pour être bon, dans un texte exaltant qui ne saurait laisser quiconque indifférent.
Par la musique autant que par la mise en scène, Philippe Leroux et Célie Pauthe ont remis l’auteur au cœur de ses écrits. Quand l’une joue sur les codes de l’enluminure médiévale en resituant le décor de l’opéra dans un univers qui mêle les sablonnières du Tardenois à l’atelier de l’écrivain, l’autre joue sur les voix en mêlant celle de Paul Claudel, synthétisée et diffusée par haut-parleur, à celles des chanteurs sur scène grâce à une partition qui rend au texte toute sa dimension autobiographique. L’Annonce faite à Marie est un « opéra de chambre » composé pour six voix et un ensemble de musique mixte où les musiciens de l’Ensemble intercontemporain sont accompagnés par l’électronique. Et ici encore, Paul Claudel n’est jamais loin : sa calligraphie a servi à générer le rythme et l’harmonie. Pour autant, et parce que le compositeur est aussi un amateur d’opéra, la musique vocale est, à chaque instant, au service de l’intelligibilité du texte.
1, place du Châtelet 75001 Paris