C’est une histoire de dictature et de résistance qui serait racontée comme une légende ancienne ou un conte de fées : un dragon, ayant sauvé une ville atteinte du choléra, écrase d’autorité son peuple et exige comme tribut annuel le sacrifice d’une jeune fille. La terreur règne, sous l’apparence d’un ordre satisfaisant. Jusqu’au jour où un valeureux chevalier, épris de liberté et empli d’amour pour la malheureuse promise, décide de tuer le monstre…
Inspiré du Dragon d’Evgueni Schwartz, L’Opéra du dragon est le seul livret d’opéra qu’écrivit le grand dramaturge berlinois Heiner Müller. Son style épuré, ciselé, offre un écrin magnifique à ce spectacle, qui, s’il n’est pas un opéra, est pourtant à la croisée de plusieurs formes artistiques : théâtre, marionnettes, musique, théâtre d’objets.
Sur un plateau surélevé au centre de la scène, les marionnettes sont manipulées à vue par trois comédiens, pendant qu’une quatrième actrice incarne au micro tous les personnages. Ils donnent vie à des dizaines d’êtres étranges, aux visages ronds mangés de grands yeux et aux corps floutés dans de longs tissus noirs. Le musicien, véritable homme-orchestre, joue en direct de l’orgue de barbarie, du saxophone, du thérémine. Tout dans cet ensemble est fluide, précis, accordé. Quelques ruptures surviennent, par le truchement de séquences filmées délirantes.
Et c’est bien la réussite de ce spectacle : mêler subtilement les genres, les émotions, les styles littéraires, les matériaux, pour délivrer un message universel : les têtes de dragons, elles aussi, finissent par tomber.
« Johanny Bert et sa troupe d’acteurs-manipulateurs revisitent cet « Opéra du Dragon » avec ingéniosité et talent dans un spectacle où la musique originale et inventive de Thomas Quinart tient un rôle important. L’utilisation astucieuse de la vidéo, le détournement d’objets et de jouets, la poésie et l’humour décalé de certains passages allègent le propos sans atténuer la force du message. Effacés derrières les marionnettes qu’ils manipulent à vue, guidés par Maïa Le Fourn qui met en voit l’essentiel du texte, les protagonistes s’écartent du naturalisme théâtral pour composer un ouvrage à la fois simple et complexe, drôle et grave. » Antonio Mafra, Le Progrès, 27 novembre 2010
« Une vision engagée et inventive de ce formidable conte. (...) La véritable force de cette création, c’est l’impression que le spectacle se fabrique sous nos yeux avec trois fois rien, des petites inventions astucieuses et drôles. » Marion Figarelle, Les Trois coups
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