Vert,
couleur de lhabit à lAcadémie française
Texte du metteur en scène
Vert comme lHabit
La presse
Hubert de Latour Latour sera til le nouvel amant de la Duchesse ? ou le candidat dont rêve le Duc pour lAcadémie ? Brigitte, jeune provinciale, épousera telle Hubert ? Autour deux sagite dans un engrenage comique implacable une galerie de pantins.
Vert, couleur de lhabit à lAcadémie française
Le Duc de Maulévrier, homme dancienne noblesse, sénateur et conseiller général siège aussi à la Coupole. Cest chez lui, dans un manoir en Normandie que commence la comédie. Je me porte bien. Il ne se passe rien : les deux répliques résument à peu près sa vision du monde en 1912. Pour lui, lHistoire sest arrêtée en 1830 avec la chute de Charles X.
Son épouse, la Duchesse de Maulévrier est une riche héritière venue dAmérique qui lui assure une rente mensuelle de 400 000 francs.
Femme dâge mûr, pétulante et généreuse, elle aime lamour et les hommes. Son dernier amant vient de se marier. Comme tous les précédents dailleurs. Pour elle, cest un jour de deuil. Toute la petite société, en villégiature dans les environs, vient aux nouvelles ; ça distrait !
Parmeline, son ancien amant est là, qui continue à se prendre pour un pianiste de génie. Hubert de Latour-Latour laccompagne. Il na pour lui, célibataire de 40 ans, que sa platitude et sa vanité.
Un nouvel amant pour la Duchesse ? Le candidat dont rêve le Duc pour lAcadémie ? Et Durand, le président de la République pourra-t-il faire quelque chose pour eux ? Peut-être faudra-t-il faire appel à lhuissier ? On se croirait dans le film Hellzapopin...
Oui, lunivers peint par de Flers et Caillavet na aucune épaisseur. Et si cétait là son charme et son intérêt ? Leurs personnages ne travaillent pas, ne pensent pas, naiment pas. Ils parlent.
Des pantins, des fantôches ? Plutôt les masques dun carnaval grotesque. Est-on chez Grosz ou chez Ensor ? Les répliques et les bons mots fusent de toutes parts, les portes claquent, les situations sont cocasses et le mouvement vif comme un engrenage implacable qui saccélère pour cacher la mort.
Parmi ces masques, deux individus se distinguent. Deux femmes : la Duchesse qui souffre ; lautre, la jeune secrétaire provinciale qui sobstine à réaliser ses désirs. Toutes deux rompent avec le piège de machine à broyer du vide.
De lénergie pour lavenir ? Michel Cournot, à propos dun vaudeville, parlait dans une critique de théâtre pour rire.
Pour rire, certes, lefficacité comique du genre nest plus à démontrer.
Pour rire, voire : sous les masques, le tragique peut rôder.
Pour rire ; non, sil sagit de voir en lui une bulle de savon qui meurt avec le temps.
La distance permet au contraire den reconsidérer le sens, dinterroger et de réévaluer la vanité du sujet et des personnages.
Oh, monsieur ! aurait répondu à Robert de Flers, son valet de chambre après que celui-ci ait vu une de ses comédies, Jai bien ri ! Cétait encore plus idiot que la dernière fois ! Remarque plus pertinente quimpertinente ! Et si dans cette " idiotie " qui fait jaillir les rires, affleuraient le néant et la mort dun monde ?
1912 : Deux ans séparent LHabit vert du déclenchement de la Grande Guerre qui fait entrer le monde avec fracas dans linconnu du XXème siècle.
Cest le ton de la Nation ; si les Français perdent une bataille, une épigramme les console ; si un nouvel impôt les charge, un vaudeville les dédommage.
Carlo Goldoni : Mémoires (3ème partie, chap. 37)
On attribue généralement au tragique le pouvoir dinterroger lhomme et sa destinée.
Mais la farce qui dénonce, la satire qui critique, le rire qui sinsurge ?
Henri Bergson, philosophe " sérieux " publie son étude sur Le Rire, en 1900, au moment où commence cette Belle Epoque qui apparaîtra dans le théâtre de Flers et Caillavet dans toute la splendeur de sa bêtise, de son lucre et de sa frivolité.
Il y a dabord un " ton " Flers et Caillavet : lesprit acéré, lentrain ravageur, lhumeur joyeuse mais satirique. Un ton, certes badin, mais qui égratigne et met à nu ; le ton de qui sait parfaitement que " le tact de laudace, cest de savoir jusquoù on peut aller trop loin " comme lécrit plaisamment Jean Cocteau. Sous lamabilité, perce une noirceur plus inquiétante : on brocarde férocement les institutions, les plus hautes autorités de lEtat avec une belle liberté desprit. Moralistes sans prétention ? Sans doute, mais la qualité de leur observation, leur regard frondeur sur les murs de leur temps sont saisissants.
Leur théâtre est lhéritier direct des vaudevilles de Labiche et de Feydeau et comme chez eux, le langage brillant, les mots desprit acerbes constituent lexistence même des personnages. Cest la parole qui agit et le personnage est là tout entier dans linstant de sa réplique, incapable de maîtriser son destin.
Flers et Caillavet vont concilier dans leur théâtre le vaudeville satirique et la comédie de murs. On pourrait parler dun " vaudeville humanisé " qui voit évoluer le genre vers une comédie dintrigue doù la critique sociale est loin dêtre absente. Robert de Flers voyait dans le théâtre une " grande chronique " qui permet de critiquer les murs du temps et de dénoncer les craquements dune société.
1912 : Ils écrivent LHabit vert, fantaisie satirique sur les travers du grand monde et les ridicules des académiciens (Flers sera lun dentre eux quelques années plus tard). Mais au delà des bons mots et dun mécanisme comique parfaitement huilé, émerge la vision " surréaliste " de leur temps qui apparaît dans son vide, sa fatuité, son inconscience. La pièce prend alors la dimension dune métaphore de la Belle Epoque qui en 1912, ne sait pas encore quelle court à la catastrophe. Ces années sont celles des paradoxes et des contradictions.
" Il ne se passe rien " répète sans cesse le Duc de Maulévrier dans LHabit vert. Rien, vraiment ?
Anne-Marie Lazarini
Nous allons, si vous le permettez, examiner un instant cet habit, dun oeil froid, avec la plus stricte impartialité, sans prétendre le mettre aux nues ni lui entamer son procès surtout sans nous hâter den rire, bien quil ait parfois fait pleurer ! Il na jamais joui dune complète réputation décorative. On saccorde généralement à le trouver rigoureux, maussade et sans allégresse. Je crois que cette mauvaise opinion lui vient de la couleur de son plumage qui na pas été comprise. Cette couleur, je nai pas à vous lapprendre, cest le vert, puisquil faut lappeler par son nom... Mais un vert particulier qui ne se rencontre quici sur nos épaules et à nos flancs, le vert de la Maison, ce vert choisi, prémédité, semble-t-til, un vert savant, pédagogique, acide et rigide, un vert de cabinet de travail et détude davoué, un vert de portefeuille et dabat-jour, de drap de bureau et de reliure de dictionnaire.
Eh bien, ce vert, même si la raison ne le comprend pas, avait cependant ses raisons il était indiqué, symbolique, fatal. Nous ne pouvions pas y échapper.
Quelle autre couleur en effet eût conçu laudace de lui disputer la palme ? Le rouge était dune humeur violente et guerrière incompatible avec nos honnêtes travaux. Le bleu ? par galanterie anticipée, on le réservait aux dames, porteuses de bas de cette même nuance, pour le jour où elles deviendraient, elles aussi, membres de lInstitut. Le blanc, si salissant, sentait dailleurs trop son roi. Le violet était trop déglise, lorangé dun vaniteux fracas et le jaune eût fait sourire. Alors ? Il ne restait donc que le vert de vraiment qualifié pour un habit qui déchaîne à la fois tant de convoitises, de dédains, de sarcasmes, dambitions et de rêves, le vert qui est justement la couleur de labsinthe, de la bile et de lespérance... Et fallait-il, étant donné linévitable vert que ce fût un vert " artiste " et poétique, le vert frivole et vain de lémeraude ou de la feuille deau ? ou le vert montagnard et gai du Tyrolien ? ou le vert exotique, ce vert glorieux de létendard du Prophète, ou celui, plein de volupté, des voiles de Scheherazade ? Non, tous ces verts-là nétaient pas pour nous. Le seul qui simposait, se justifiait, le seul définitif était bien celui qui sut nous échoir, le vert sérieux, le vert académique.
Henri Lavedan
(extrait de LAcadémie française 1989).
Lorsque deux ans après la suppression des académies dAncien Régime, lInstitut National fut créé par la Convention de 1795, il ne reçut pas de costume particulier. Ce sont les membres eux-mêmes qui demandèrent à porter un signe distinctif de reconnaissance et de ralliement.
Après bien des tergiversations sur la couleur du drap (dabord brun, puis noir) puis celles des broderies (dabord souci, puis aurore pour finalement adopter la nuance du feuillage dolivier), un arrêté signé du Premier Consul, Bonaparte, le 23 floréal an IX fixe la règle encore suivie aujourdhui : un habit, gilet ou veste, culotte ou pantalon noirs brodés en plein dune branche dolivier en soie vert foncé, chapeau à la française
Quant à lépée qui indiquait à lorigine que les gens de lettres faisaient partie de la Maison du Roi, elle devint, au cours du XIXème siècle lemblème des corps officiels de lEtat.
Mais le symbole nest pas comme pour les officiers, les ambassadeurs, les préfets, les inspecteurs des finances, dautorité et de dignité.
Lépée des académiciens nexprime pas leurs fonctions mais traduit avec beaucoup de liberté la personnalité dun artiste, dun savant, dun penseur que son oeuvre a distingué parmi les grands créateurs.
Daprès http//www.académie-française.fr/immortels/habit_vert.htlm
"Anne-Marie Lazarini nous offre une délicieuse adaptation du chef doeuvre LHabit vert.(...) Effrontée, toxique, dune ironie au vitriol, cette comédie allègrement interpretée fustige les autorités avec une verve quon noserait guère aujourdhui." Fabienne Pascaud, Télérama
"Dans un décor à transformations tout simple, et sur fond de succès musicaux de lépoque, Anne-Marie Lazarini dirige allègrement de bons comédiens nous font rire aux éclats. La soirée... pétille." Annie Coppermann, Les Echos
"Cest gagné, on samuse !" Marion Thébaud, Madame Figaro
"Claude Guedj, Philippe Lebas, Jacques Bondoux, Marc Schapira, Irène Chauve et Andréa Retz-Rouyet en délicieuse duchesse, nous offrent un véritable feu dartifice, tous les comédiens sont à lunisson. Une excellente soirée." Marie-Cécile Nivière, Pariscope
"Anne-Marie Lazarini accompagne avec une ironie contenue le jeu du vaudeville et du rire. Interprétation dune belle unité. Spectacle dune joyeuse et persiflante teneur." J. Chollet, AS.
"On rit, la soirée est plaisante, illuminée par un comédien : cest Philippe Lebas, qui y va de son énergie et de sa merveilleuse aptitude au comique." A. Héliot, Le Quotidien du médecin
"Les éclats de rire fusent mais il y a dans tout cela une émotion, une tendresse, une finesse danalyse qui rend heureux et même intelligent. Linterprétation dAndréa Retz-Rouyet atteint à la poésie, Jacques Bondoux a des instants magnifiques. Anne-Marie Lazarini a le don de ces distributions dexcellents comédiens." Jean-Luc Jeener, Figaro Magazine
"Entrecoupés par des airs de lépoque, les quatre actes passent comme un charme. Très bonne interprétation." Annie Chénieux, Le Journal du Dimanche
"Du vaudeville dans toute sa splendeur..." Aden
"Une dinguerie de polka piquée absolument hilarante." Le Nouvel Observateur
"On passe une soirée des plus suaves" Jacques Nerson, Valeurs actuelles
"Somptueux costumes de Dominique Bourde, dans le style de lépoque. Spectacle qui fait grandement honneur au Théâtre Artistic Athévains." Raymond Finet, Itinéraires Wallons
"La soirée se met à filer comme la plus hilarante des charges de cavalerie." G. Costaz, Politis
"Du théâtre comme on laime : fin et enlevé avec Philippe Lebas irrésistible de drôlerie. Une réussite." Figaroscope
"Anne-MarieLazarini a monté avec intelligence cette pièce fort drôle." Pierre David, Réforme
"Les comédiens évoluent brillament dans une mise en scène à la fois posée et vive, élégante et perspicace signée Anne-Marie Lazarini. Bref, un régal." Caroline Faure, Paris BB
"Cest un monde étrange qui se découvre. Pas loin de Labiche ou Feydeau. Plus proche encore de Proust. On rit. Beaucoup. Ce qui est rendu ici, cest ce sentiment de dernière danse sur un volcan. Une danse menée tambour battant." Didier Méreuze, La Croix
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