L'âme d'un mort
La mise en scène de Daniel Mesguich
Khonen, un étudiant de la yeshiva de Brynitz, affairé de Kabbale et entêté de l’idée de s’élever jusqu’au nom suprême, meurt en apprenant que le riche Sender a fiancé sa fille unique Léa.
Le jour de la noce, Léa, après avoir dansé avec les femmes et partagé le repas des pauvres confie à sa grand-mère que, depuis sa mort Khonen lui rend visite toutes les nuits en songe. Il a instillé dans son cœur une grande inquiétude relative au sort des âmes de ceux qui sont morts trop tôt. De retour au cimetière, où elle a rendu visite à la tombe de sa mère, Léa refuse Ménashé, son fiancé : l’âme d’un mort - un dibbouk - a pris possession de son corps.
L’affaire est portée devant rabbi Azriel, le Tsaddik de Miropol, qui en appelle au rabbin Samson, lequel lui révèle avoir reçu en songe une plainte lui demandant d’assigner au tribunal le vieux Sender. Celui-ci, autrefois, avait en effet promis sa fille pour son fils au père de Khonen. Or, le dibbouk a été identifié à sa voix : c’est en effet l’âme de Khonen qui est entrée en Léa.
Pour sa défense, Sender déclare qu’il ignorait que Khonen était le fils de son ami, disparu depuis longtemps. Le jugement est rendu par rabbi Azriel, mais il apparaît que le père mort de Khonen n’accepte pas le verdict qui lui demande de pardonner à Sender, et d’ordonner à l’âme de son fils de quitter le corps de Léa. En effet lorsque, fort de ce jugement, le rabbi conjure le dibbouk de se retirer, celui-ci ne le fait qu’en entraînant la jeune fille avec lui dans la mort.
La pièce fut présentée pour la première fois en 1920. Elle connut un immense succès de Varsovie à New York. L’adaptation cinématographique (1937) de Michal Wasynski sous le nom de Der Dibik est considérée comme un chef-d’œuvre du cinéma yiddish.
Traduite pour nous en français, par Xavier Maurel dans une langue superbe de pétillance et de vertige, cette pièce presque oubliée, devrait être, à mon sens, aussi célèbre que telle ou telle des plus grandes pièces de Tchékhov, ou de Claudel.
Mais si représenter ce diamant de notre mémoire littéraire et théâtrale reste une urgence, nous n'avons pas voulu n'être tournés, pourtant, que vers le passé, et c'est la raison pour laquelle (en fait, c'est la principale, mais il y en a mille autres) nous avons voulu lancé un projet en deux volets, comme les deux ailes d'un seul oiseau-théâtre : le patrimoine avec le Dibbouk, la création avec Tohu-Bohu. Le monde juif et le théâtre ont encore beaucoup à se dire.
Le thème du roman est à la fois la description des rites et des traditions qui précèdent le mariage, et l’exorcisme pratiqué par le rabbin pour arracher le Dibbouk du corps de la mariée.
Le personnage le plus significatif, le plus énigmatique de la pièce est le Messager. Il est le moteur de l’action. Il représente le destin et il donne à l’histoire une atmosphère mystique. L’auteur An-Ski a voulu montrer les limites d’un univers clos comme le Shtetl, il souhaitait vivement que le judaïsme se sécularise et s’ouvre aux idéologies révolutionnaires naissantes.
La mise en scène de Daniel Mesguich mettra en lumière l’histoire d’amour impossible entre deux êtres appartenant à un monde clos. La pièce de théâtre, adaptée par Daniel Mesguich, soulignera donc une histoire d’amour emblématique de cette Europe du XIXème siècle, refermée sur elle-même, sur ses nationalismes et ses ethnies, étouffée par la superstition et éloignée d’une réelle spiritualité.
La pièce fut présentée pour la première fois dans la traduction française à paris en 1928 sous la direction du célèbre Gaston Baty.
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