Douze aveugles en pleine nature attendent le retour d’un prêtre qui les a guidés jusque là. Mais ce prêtre est mort parmi eux. Le dénouement est donné d’emblée au spectateur voyant, à l’insu des protagonistes aveugles : ils sont perdus, ils ne le savent pas encore.
Dans ce poème presque immobile, la seule action réside dans la lente découverte, par un groupe disparate de personnes traversées par les mêmes sensations, de leur solitude dans un monde qu’ils ne comprennent pas et de l’imminence de leur disparition. Le texte est un entrelacs de motifs simples, une partition précise de silences et de mots, de répétitions, de cris confus et de respirations.
Il ne raconte rien, mais il produit de l’espace, du froid, du temps, un monde de visions affectant les sens. Il appelle une mise en oeuvre chorale de la parole, avec une attention particulière aux questions du son, de la spatialité des voix, des tessitures. Plus qu’une scénographie, il exige la constitution d’un véritable paysage de la voix, à travers l’expérience d’une perception de l’espace qui ne passe plus exclusivement par le visible.
De quoi regarder ce qui nous entoure autrement et reconsidérer le prix de chaque chose. De quoi, peut-être, repenser la communauté. Avec ce spectacle, Daniel Jeanneteau choisit de ne rien traiter du visible : ni costumes, ni décor, ni lumières. Son dispositif mêle public et acteurs en un groupe indifférencié. Les voix, anonymes, qui en émanent, et le travail du son d’Alain Mahé (en collaboration avec l’Ircam) évoquent pour le spectateur (les yeux fermés ?) une humanité ordinaire, sans histoire et sans identité, le mouvement du monde, de la nature, et l’infini travail des forces qui agissent sur les vies.
« Daniel Jeanneteau, qui fut longtemps scénographe de Claude Régy, s’impose depuis quelques années comme un metteur en scène sensible et exigeant. » Fabienne Darge, Le Monde, 29 janvier 2014
« La scénographie joue très habilement de la spatialité des adresses, de la tessiture et du rythme des voix et de la mélodie poétique du texte. Les comédiens sont époustouflants de justesse et de précision, et forcent, par leurs talents conjugués, à une écoute recueillie. L’ensemble compose un spectacle intelligent et sensible, humble et audacieux, qui fait entendre, avec une rare acuité, le texte de Maurice Maeterlinck. » Catherine Robert, La Terrasse, 24 janvier 2014
« On ne voit presque rien, puisque le spectateur est plongé dans la brume, et on éprouve le trouble des « Aveugles », et la beauté simple et vibrante de la pièce de Maurice Maeterlinck que met en scène Daniel Jeanneteau avec une infinie délicatesse. On ne voit rien et on voit tout, derrière les apparences. Au mot spectateur, on peut substituer celui de participant, immobile, consentant, captivé mais pas captif. « Les Aveugles » n’ont rien d’une cérémonie secrète pour initiés, et beaucoup de la très belle expérience humaine, avec et sous la peau du réel et des mots. » Odile Quirot, Le Nouvel Observateur
« Sensation fugitive qui nous frôle avec le frémissement d’une aile de chauve-souris. » Les Inrockuptibles
« Cette création originale et troublante permet de renouer avec un auteur majeur en maintenant les sens et l’imaginaire en éveil. » Webthéâtre
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