Les enfants

Paris 18e
du 8 au 16 juin 2007
1h50

Les enfants

Tout public à partir de 12 ans. Pièce créée avec un groupe d'adolescents de la région. Joe, un jeune adolescent, vit avec sa mère. Un jour, elle lui demande d’aller brûler une maison dans le quartier voisin et refuse de lui donner la moindre explication. Soutenu par ses copains, après avoir mis le feu à la maison, il part en cavale. Commence un long voyage dans un monde désolé...

Tout public à partir de 12 ans.

Un monde désolé
L'architecture du projet
Pourquoi les enfants ?
L’auteur et la pièce
Notes de mise en scène
Note sur la création

  • Un monde désolé

« Pas de voiture ni de camions. Routes vides.
Pas de chiens. Même morts.
Pas de linge sur les fils.
Tout le monde a disparu.
Etrange.
J’ai peur. »

Joe, un jeune adolescent, vit avec sa mère. Un jour, à son retour de l’école, elle lui demande d’aller brûler une maison dans le quartier voisin (la maison avec la porte mauve) et refuse de lui donner la moindre explication sur cette demande. L’enfant veut comprendre. La mère s’obstine à taire ses raisons, se fâche, menace. Désemparé, Joe va rejoindre ses copains. Au cours d’un rituel brutal, les enfants jurent de soutenir Joe et de garder son histoire secrète.

La nuit suivante, rentré chez lui, il annonce à sa mère qu’il a mis le feu à la maison. Mais sa mère nie lui avoir demandé de le faire. Une amie de Joe vient leur annoncer qu’un jeune garçon, prisonnier de la maison en feu, est mort. Cette nouvelle entraîne la mère dans un déni encore plus violent. Joe décide de s’enfuir. Au matin, il retrouve ses copains qui choisissent de l’accompagner dans sa cavale. Surgit alors un homme, l’air hagard, totalement épuisé, qui s’effondre à leurs pieds. Joe et ses copains décident de s’occuper de lui et l’emmènent. Commence alors pour les enfants et l’homme un long voyage dans un monde désolé, un monde qui s’effondre…

Texte français de Jérôme Hankins. L’Arche est éditeur et agent théâtral du texte représenté.
Par la compagnie Point de rupture. Avec 15 adolescents du 18ème, du 17ème arrondissement de Paris et de la Ville de Saint-Ouen.

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  • L'architecture du projet

Une équipe artistique : deux comédiens, un metteur en scène, un scénographe, un concepteur son et une costumière, crée la pièce avec un groupe de treize à quinze adolescents, âgés de 11 à 16 ans, sur une quinzaine de répétitions qui aboutissent à une courte série de représentations publiques (3 à 6).

Cette expérience (spectacle initial) est renouvelée dans plusieurs villes (spectacles satellites) : dans chaque ville, un nouveau groupe d’adolescents « du cru » recrée la pièce avec une partie de l’équipe artistique : les deux comédiens, le metteur en scène et la costumière. Ce principe de re-création permet à un plus grand nombre d’adolescents de participer à l’aventure.

La proximité des spectateurs avec les adolescents-comédiens qui vivent dans la même ville, le même quartier qu’eux ou fréquentent la même école, permet de développer le lien entre la cité et le théâtre. La création de la pièce dans plusieurs villes permet également de moduler le projet, de le réévaluer, de l’approfondir. Chaque ville est le terrain d’une expérience unique et singulière : Les Enfants de Mantes la Jolie, Les Enfants de Palaiseau, ...

La durée volontairement restreinte du stage de création (une douzaine de séances) correspond à la singularité du projet. Rappelons qu’il ne s’agit pas de former des comédiens, mais qu’il s’agit de susciter chez les adolescents une démarche de création et d’initier un autre rapport aux artistes et à un texte de théâtre en leur proposant l’aventure d’un spectacle professionnel, à travers lequel chacun se nourrit de la spontanéité et de l’expérience, de la fougue et de la rigueur, des uns et des autres.

Au-delà du stage de création, le spectacle propose de découvrir un texte du théâtre contemporain qui s’adresse à tous et, en particulier, à la jeunesse (à partir de 12 ans).

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  • Pourquoi les enfants ?

Réunir le geste pédagogique et le geste artistique
Au départ de ce projet, il y a le parcours de ces sept dernières années pendant lesquelles j’ai mis en scène des textes d’auteurs contemporains et parallèlement animé des ateliers hebdomadaires de pratique amateur de théâtre avec des enfants, des adolescents et des adultes. Tout au long de ces années, les questions Pour qui ? et Pour quoi faire du théâtre ? m’ont accompagné. Les Enfants d’Edward Bond répond à l’envie de réunir en un seul mouvement le geste pédagogique et le geste artistique pour prolonger cette réflexion. Il ne s’agit pas seulement de rendre compte du monde contemporain, pas seulement de donner à voir et à entendre, mais bien de proposer à des jeunes gens de venir sur le plateau avec nous : auteur, metteur en scène, comédiens… questionner le monde.

Un regard sur le monde contemporain
Les Enfants répond aussi avec force à ce que j’attends du théâtre pour la jeunesse : exigence du texte, stimulation de l’imaginaire, éveil de la conscience citoyenne, regard sur le monde dans lequel nous vivons… L’auteur n’aborde pas seulement les préoccupations quotidiennes de l’adolescence, il élargit la réflexion aux choix auxquels le monde nous confronte : l’avenir écologique de la planète, la transmission de la violence de génération en génération, questions qui me semblent essentielles pour vivre dans le monde de demain.

Une aventure humaine
Les adolescents occupent une place centrale dans ce projet : ils sont non seulement les principaux protagonistes de la pièce, mais sont également conviés - c’est ce qui fait la singularité du projet - à y participer de façon active, imaginative et intime. Une place importante est faite à l’improvisation, ce qui donne aux adolescents la possibilité de s’approprier la représentation et donc de se confronter d’une manière purement empirique aux thèmes centraux de la pièce : connaissance de soi et responsabilité quant à l’évolution du monde. Il ne s’agit pas ici de former des comédiens, mais plutôt d’emmener des adolescents dans une aventure artistique et humaine qui met en jeu et en question l’être humain en devenir qu’ils sont et le monde dans lequel ils voudraient vivre.

Une pièce forte, pertinente et utile
Et si je choisis aujourd’hui de mettre en scène Les Enfants, c’est avant tout parce qu’il s’agit d’un grand texte de théâtre. Edward Bond, sans jamais céder à une tentation de simplification ou de vulgarisation, prolonge avec cette pièce la réflexion qu’il développe depuis une trentaine d’années dans toute son œuvre. Dans une maîtrise de la langue et de la dramaturgie parfaitement accomplie, il nous offre un texte destiné à la jeunesse des plus forts, des plus pertinents et des plus utiles.

Gilles Martin, février 2005.

" Ce monde est le vôtre. Un temps viendra où les gens qui vous disent ce qui est vôtre ou ce qui ne l’est pas ne seront plus de ce monde. Mais vous, vous y serez - et il vous faudra en faire un lieu de bienveillance et de paix. Pour prendre la responsabilité du monde, il faut être courageux, généreux et prévoyant. Jouer Les Enfants est une manière de vous y préparer. Vous devez faire que la pièce soit la vôtre, afin que le public puisse comprendre ce que vous voulez leur dire. Et plus tard il vous faudra faire de même pour le monde, quand vous ne serez plus Les Enfants mais Les Adultes. "

Edward Bond, Lettre aux jeunes acteurs qui jouent Les Enfants, 17 mars 2002

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  • L’auteur et la pièce

Un auteur contemporain
Edward Bond, né en 1934 dans la banlieue nord de Londres, a écrit une quarantaine de pièces jouées dans le monde : il est considéré aujourd’hui comme l’un des plus importants auteurs du théâtre contemporain. Il met en lumière dans son œuvre l’inhumanité de notre société, sa violence, ses failles, et développe, parallèlement à l’écriture, une importante réflexion théorique sur la fonction culturelle, politique et morale du théâtre qu’il met en pratique dans ses mises en scènes et des ateliers.

Concilier les enjeux de la création artistique et de l’action culturelle
Après Onze débardeurs (1995) et Auprès de la mer intérieure (1995) pièces destinées à la jeunesse, Edward Bond prolonge avec Les Enfants en 2000, sa réflexion sur l’art dramatique et l’adolescence en proposant un outil théâtral tout à fait singulier. Ecrite pour être jouée par une quinzaine d’adolescents et deux adultes, Les Enfants offre de manière exemplaire les moyens d’associer les enjeux de la création artistique à ceux de l’action culturelle.

Un laboratoire pour l’imagination
La pièce est composée de douze scènes écrites dans une langue qui échappe au réalisme, une langue sèche, qui s’en tient à l’essentiel, avec ses moments fulgurants de poésie dramatique. Cinq scènes sur les douze ont été écrites pour être jouées telles que l’auteur les a mises en mots. Les sept autres scènes peuvent ne pas être jouées en l’état : ce sont des situations qui constituent un cadre dans lequel les jeunes acteurs sont invités à improviser.

Cette position en retrait de l’auteur est constitutive du projet de mise en scène : elle place les adolescents, de façon concrète et vivante, dans une prise en charge responsable et créative de la représentation ; elle ouvre une voie pour laisser s’infiltrer sur le plateau l’énergie et la mise en question du monde propre à l’adolescence.

La construction de la pièce, mélange de texte-à-jouer et de scènes-à-improviser, la volonté obstinée d’Edward Bond à questionner le monde, laissant sa part de travail à l’acteur comme au spectateur, sa proposition d’envisager sous un jour nouveau la pratique du théâtre (en associant débutants/professionnels et adolescents/adultes) font de la pièce Les Enfants, un véritable laboratoire pour l’imagination.

Une dimension symbolique et poétique
Edward Bond ancre Les Enfants dans la réalité sociale et développe, à partir de cette réalité, des thèmes qui s’inscrivent tant dans la sphère de l’intime que du politique : la violence et sa transmission de génération en génération, notre capacité à détruire par amour, les notions de partage et d’entraide qui sont à l’origine de la cohésion sociale, la logique consumériste et l’avenir écologique de la planète.

Par sa forme épique, sa langue épurée, l’aspect énigmatique de certaines scènes (la transformation brutale du monde), l’irruption du fantastique (l’apparition d’un fantôme), le texte s’affranchit du réalisme pour atteindre une dimension symbolique et poétique.

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  • Notes de mise en scène

Le personnage de La Mère dans la pièce rappelle la figure mythologique de Médée, femme répudiée, blessée, trahie et dont l’implacable vengeance entraînera la mort de sa rivale, consumée par le feu, et le meurtre de ses propres enfants. Mais la Médée de Bond n’est plus tout à fait la magicienne orientale qui commandait aux éléments dans la tragédie d’Euripide. Elle a perdu ce qui constituait dans le mythe originel la science de Médée : son lien sacré avec la nature. Les Enfants est l’histoire de l’humanité aux prises avec sa propre violence. Une violence qui prend naissance entre les quatre murs d’une maison (celle de Joe et de sa mère) pour s’étendre à l’ensemble de la planète.

La deuxième partie de la pièce, le Voyage des Enfants, se passe dans un monde désolé. S’agit-il d’une catastrophe écologique ou militaire ? Edward Bond laisse la question en suspens et nous rappelle seulement que, depuis le 20ème siècle, l’humanité est devenue capable de se détruire directement par la guerre nucléaire ou indirectement par l’altération des conditions nécessaires à sa vie.

Tel un ciel prêt à nous tomber sur la tête, un vaste plafond de toile claire est tendu au-dessus du plateau et sert d’écran à des images vidéo. La projection agit également comme source de lumière pour créer sur la scène l’étrangeté du monde du Voyage des Enfants. Le montage vidéo et la bande sonore du spectacle sont inspirés par les 4 éléments : terre, air, eau et feu. L’aspect monumental de ce plafond trapézoïdal (8m x 5m x 1,5m) donne la mesure des menaces climatiques qui nous guettent et permet de donner corps à un autre mythe qui traverse la pièce : l’Apocalypse. Ce mythe est notre destin, semble dire Edward Bond, mais un destin qui n’est tel que parce que nous n’y reconnaissons pas les conséquences de nos actes.

Le Voyage des Enfants (environ 40 jours, comme celui de Noé) à travers un monde qui se meurt n’est pas seulement une vision prophétique. C’est aussi un voyage intérieur, un parcours initiatique qui mène de l’adolescence à l’âge adulte. A la fin de la pièce, Joe, confiant, démarre une vie nouvelle.

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  • Note sur la création

à Mantes-la-Jolie et à Palaiseau

Deux principes constituent l’une des singularités de la mise en scène de la pièce Les Enfants : un temps de répétition de courte durée (12 séances de travail) et la juxtaposition de scènes apprises et de scènes improvisées.

Le principe d’un travail préparatoire concentré dans le temps a permis aux jeunes comédiens de garder sur l’ensemble des répétitions toute leur énergie et leur attention, et pour moi de déjouer la tentation de trop « policer » le jeu qui a pu conserver ainsi une certaine fragilité. Quant au principe d’improviser certaines scènes, cette proposition les a d’emblée emballée et a stimulé l’appropriation du texte. Cette façon de travailler impose de comprendre les articulations et les enjeux de chaque scène avant d’en restituer la situation. Le jeu n’est plus seulement reproduction, mais imagination cadrée par l’entendement.

A travers ce texte, le champ de réflexion ouvert par Edward Bond est impressionnant par sa profondeur et par l’ampleur des questions qu’il soulève : comment donner un sens à sa vie ? Comment s’en sentir responsable et se montrer solidaire de la vie des autres ? Quel avenir pour l’humanité si nous ne parvenons pas à imaginer une vision du politique écologique, citoyenne et planétaire, qui place au centre la justice ?

En choisissant après avoir lu la pièce de s’engager dans cette aventure, voilà 13 adolescents de Mantes-la-Jolie et 14 adolescents de Palaiseau qui, par la qualité de leur investissement et leur enthousiasme durant les répétitions, nous confirment, s’il en était besoin, qu’une pièce de théâtre qui aborde de manière radicale les questions politiques et philosophiques de son temps, les concerne vraiment. Ni histoire d’adultes pour des enfants, ni histoire d’enfants pour des enfants, la pièce d’Edward Bond s’adresse au désir d’humanité qui est en tout être.

Gilles Martin

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Spectacle terminé depuis le samedi 16 juin 2007

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