Dans un Alaska d'opérette, quatre improbables soeurs jumelles camées comme pas possible et délurées, c'est rien de le dire. Copi n'a pas froid aux yeux ! Chez lui, l'imagination règne dans sa version la plus débridée.
Empruntant les cadres du boulevard, il les dynamite gaiement en allumant une mèche surréaliste. Sur la banquise, c'est en majorettes qu'elles ondulent, ces folles-dingues. Elles ne tiennent pas en place. Et flinguent à tout va. D'où le sang sur la neige. Et la mort à tout bout de champ. Dans ce monde subversif à souhait où tout est possible, surtout le pire et le plus drôle, Jean-Michel Rabeux est particulièrement à son aise.
Ces quatre jumelles n'ont pas leur langue dans leur poche. Les répliques fusent ; tout comme les balles de revolver. On meurt beaucoup, donc. Mais pourquoi s'inquiéter quand tout est factice ? Quand la pacotille, le carton-pâte, le fantastique de cabaret sont autant de stimulants d'où surgit, dans une gerbe d'étincelles et de confettis, la poésie.
La pacotille, le carton-pâte, le fantastique de cabaret sont autant de stimulants d'où surgit, dans une gerbe d'étincelles et de confettis, la poésie.
Copi ou l’excès. « Arrêtez d’aboyer saloperie de chiens ! Je vais vous tuer tous ! Regardez ce qu’ils ont fait de ma robe cette bande d’ordures ! Oh merde, ils m’ont déchiré le bras. Je vais me faire une piqûre d’héroïne. Où est la seringue ? » Ce qui s’appelle démarrer fort.
Dès les premiers mots de cette première scène, l’agitation est à son comble. C’est par une irruption à tous les sens du mot que Copi ouvre Les Quatre Jumelles. Il y a de l’électricité dans l’air. Ce qui est d’autant plus drôle que la scène est censée avoir lieu en Alaska. Mais toute vraisemblance est bannie dans cet univers délirant où Copi donne libre cours à une fantaisie aussi débridée que subversive. Car rien n’arrête les quatre jumelles en question. Elles volent, elles tuent, elles s’enfilent toutes sortes de drogues et sont perpétuellement en fuite, cherchant à attraper on ne sait quel train censé les emporter ailleurs.
Copi concentre dans une même pièce atmosphère de western, polar, vaudeville à la Feydeau le tout transposé dans une dimension qui relève du film d’horreur. « C’est un cocktail explosif, analyse Jean-Michel Rabeux. On est dans un monde à la Genet, mais traité dans le style de Sacha Guitry. Copi reprend les schémas du vaudeville. Mais s’il s’inspire de Feydeau, c’est pour le torpiller. Il s’empare d’un genre et il le pervertit. La forme est à la fois superficielle et brillante. Son écriture est resserrée, elle est musicale ; ça avance, ça fonce comme chez Feydeau. Il y a aussi dans sa langue ces délicieux déplacements poétiques liés à ses origines argentines. »
Mais cet espace où les genres entrent en collision les uns avec les autres, où toutes les folies sont autorisées, surtout les pires, n’est-ce pas au fond celui du cabaret ou du music-hall ? Un cabaret subversif dans l’esprit mordant d’un Karl Valentin, tempéré par l’imaginaire surréelle et l’humour excentrique du plus attachant des Argentins écrivant en français. « Il y a incontestablement une dimension politique dans ce théâtre où il s’agit de remettre en cause toutes les valeurs absolues – la psychologie, la raison, la morale – en instaurant le règne d’un désordre général. Copi est un politique. Il remet en question l’ordre social. Il pose la question du crime et ce pas seulement pour faire rire. En même temps, on est dans la liberté absolue du rêve. Quelque chose qui renvoie à l’enfance dans une certaine mesure, à la cruauté de l’enfance.
Au fond, ces jumelles, ce sont des super héros ou des dieux. Elles meurent souvent, mais elles renaissent toujours comme dans les comics américains. » Comme une formidable gigantomachie transposée dans un univers d’opérette. Une banquise où il neigerait des paillettes de toutes les couleurs. Le contraire du réalisme. L’horreur dans un immense éclat de rire. « Rire du pire », dit Jean-Michel Rabeux, qui précise : « Cette pièce, je la vois comme un défoulement, une pure fantaisie cathartique. Copi déchire le déchirement, il le multiplie. Son théâtre n’est pas un miroir du réel, c’est un questionnement sur le réel. »
Hugues Le Tanneur
« La mise en scène de Rabeux est magnifiquement foutraque, volontairement bordélique. (…) C’est du grand, du magnifique n’importe quoi. C’est tout simplement génial. Les quatre comédiens n’ont peur de rien dans cette farce grandiose. » Un Fauteuil pour l’orchestre
« Aidés par une magnifique scénographie, les comédiens impliquent progressivement les spectateurs au centre de la farce, au plus prêt des rebondissements délirants. Un spectacle vivement applaudi et chaudement recommandable pour découvrir l’œuvre du détonant Copi. » Les Trois Coups
« La performance du quartet de choc formé par Claude Degliame, Georges Edmont, Marc Mérigot et Christophe Sauger sublimes en clowns tragiques et pathétiques transcende cette farce morbide. » Froggy's Delight
« Une excellente façon de (re)trouver Copi. » Culturopoing
« Spectacle surréaliste et décapant que celui de Copi (...) Si l'on ne connaît pas encore l'univers du dramaturge argentin, c'est l'occasion de découvrir cet original ! » ELLE
« On sort sonné, pas très sûr de ce qu'on a vu, sinon qu'il s'agit de théâtre - du vrai, du remuant, dont on ne sort pas indemne. » Les Echos
« Formidablement pathétiques. » Médiapart
« Une comédie trash et un écho à l'état du monde. » Beaux Arts
76, rue de la Roquette 75011 Paris