Spectacle en italien surtitré en français.
On a peut-être oublié qu’à quelques coudées du héros de la légende arthurienne et très au sud de son noble avatar wagnérien se tenait une autre version de Lohengrin, “Chevalier qui s’avance sur les mers, mélodieux de bravoure, franc comme les cimes”, “Avalanche faite cygne” : celle, passablement ironique qu’en a donné Jules Lafargue en 1887 dans ses Moralités légendaires. “Le voici ! Que c’est Lui !”, s’y exclame sa promise Elsa, “vestale assermentée, gardienne des Mystères, des philtres, des formules et du froment des brioches nuptiales”, avant de convoler vers une atterrante lune de miel…
C’est de cette lecture d’un mythe passablement dégarni que le compositeur Salvatore Sciarrino a tiré, en 1982, une “action invisible pour soliste, instrument et voix”. Un voyage où le récit, les mots et la musique sont resserrés jusqu’à devenir les fragments d’un paysage.
Une unique voix devient tour à tour celles d’Elsa et de Lohengrin, celle de la foule déchaînée, celles des oiseaux et des insectes. Est-elle un songe, une hallucination, le flux et le reflux d’une conscience égarée ?
“Parfois, le mouvement de l’œuvre m’est inspiré par les différentes phases que la conscience traverse au cours d’une nuit, explique Sciarrino. Il y a le moment non pas du sommeil, mais où la conscience est assoupie, c’est un point mort, un blanc et parfois des moments de tension, où la vigilance est à son paroxysme, où les moindres sons prennent tout leur relief. Puis il y a les chutes de la conscience, instants indispensables… pour se réveiller !”
Volant dans les plumes du mythe, Lohengrin est un moment intense de théâtre musical, méditation mouvementée où “il n’y a pas de moments de relâchement, et s’il y en a, ce sont des moments fictionnels où l’on écoute encore davantage.”
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