Préoccupée par ce sentiment collectif « d’impuissance à agir sur le monde et l’angoisse d’être agi par lui », Julie Deliquet se nourrit de deux pièces de Tchekhov, Les Trois Soeurs et Ivanov.
Un sentiment collectif
Préoccupée par ce sentiment collectif « d’impuissance à agir sur le monde et l’angoisse d’être agi par lui », Julie Deliquet, metteure en scène, se nourrit de deux pièces de Tchekhov, Les Trois Soeurs et Ivanov.
De mariage arrangé, en fratries mal recomposées, de mensonges en utopies, elle construit le portrait d’une génération des années 70 désenchantée, vieille à quarante ans, happée par la mélancolie, qui petit à petit les dessaisit de leur destin. Huit comédiens du collectif In Vitro s’approprient la dépression et l’imbroglio affectif des protagonistes de Tchekhov, et se jouent des porosités classiques entre acteur et personnage, entre scène et salle, repoussant les limites d’un théâtre capable d’agir sur le monde.
A partir des Trois Soeurs et d’Ivanov d’Anton Tchekhov.
Note d'intention
Voilà sept ans qu’In Vitro mène à travers ses créations une saga sur la thématique de l’héritage générationnel : La Noce de B. Brecht - Derniers remords avant l’oubli de J.-L. Lagarce - Nous sommes seuls maintenant, création collective - Catherine et Christian (fin de partie) - création collective.Nous avons souhaité raconter « notre histoire » de manière pudique à travers le legs idéologique que nous avions reçu de la génération dite 68, en partant d’un mariage dans les années 70 pour finir par un enterrement de nos jours.
Nous avons fait vieillir une génération, celle de nos parents, sur cinq décennies pour finalement « l’enterrer » avec le dernier volet et tomber dans la nôtre et dans celle de nos enfants. Notre processus a commencé avec les auteurs et ils nous ont guidés jusqu’à notre propre écriture de plateau : ici encore il a été question d’héritage, théâtral cette fois-ci. Contrairement à beaucoup de collectifs, In Vitro a débuté en montant des textes, et les auteurs restent très présents même dans le cadre de la création collective.
Recommencer la vie par le commencement - Ivanov
Je souhaite aller au bout de cette rencontre entre les auteurs et notre propre écriture pour l’ouverture de cette nouvelle ère. Centré sur l’acteur et l’instant présent de la représentation, notre théâtre tend à une démythification de la place de chacun et à une valorisation du statut de l’acteur en défendant l’idée d’un geste théâtral collectif, ce qui ne sous-entend aucunement l’absence de l’auteur ou du metteur en scène. Nous écrirons donc cette fois-ci à partir de deux œuvres et signerons une adaptation originale. L’auteur sera à l’origine, ce qui m’intéresse est le trajet que nous ferons pour aller jusqu’à lui… Mon point de départ fut : le théâtre et la société dans laquelle nous vivons. Et j’ai choisi Tchekhov pour guide…