Synopsis
À l’origine de la création
Travail de matières vivantes - L’écriture / Immersion dans les années d’occupation
L’insondable quelque part au plus profond de soi - La mise en scène / L’individu face à lui-même…
Adaptation d ’après les archives de l’Occupation et Déposition», journal de guerre 1940 – 1944 de Léon Werth
1940-44. Plongée au cœur de la France de Vichy. Moments volés. Vies déchirées.
Les êtres vacillent entre aliénation et liberté, peurs et courages, individualité et solidarité. Le spectacle dévoile l’intimité des français sous l’occupation et nous questionne. Quel engagement pour la réalisation d’un idéal humain ?
En 1940, abasourdie puis docile, souvent aveuglée par la puissance de l’occupant, la population se soumet au pouvoir d’une autorité. Parce que, comme ils disent : « Qu’est-ce qu’on peut faire ? »… Plongée dans les années d’occupation.
Une loupe posée sur les individus confrontés à ce que la guerre révèle d’eux-mêmes, d’humain et d’inhumain ; sources sourdes, inconnues jusqu’alors où ils puisent le meilleur comme le pire. Les êtres vacillent entre aliénation et liberté, peurs et courages, individualité et solidarité.
La guerre est le catalyseur tragique des comportements humains. Mon coeur caresse un espoir ou des histoires de gens ordinaires ; morceaux déchirés de vies prises dans l’étau de la dictature et de l’occupation.
Ceux qui ont résisté. Ceux qui ont collaboré. Et l’immense majorité qui a attendu. Chacun, au quotidien, construit le monde.
Le texte est publié aux Editions Viviane Hamy.
A l’origine, deux photos découvertes en feuilletant le Progrès de Lyon en 2005, année du 60e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale.
La première exhibe une jeune femme de 20 ans incarcérée dans un camp de travail en Allemagne pour acte de résistance. J’apprends qu’elle sera décapitée peu après pour avoir poursuivi le sabotage sur la chaîne de production. Sur la seconde photo, la même femme que l’on reconnaît à peine. Le regard est volontaire, elle a un petit air de Louise Brooks. Elle semble avoir toute la vie devant elle. Brutal retour en arrière avant la guerre. Son regard semblait se poser sur moi. Il me renvoyait au désenchantement de notre monde actuel, à son apathie ; à nos existences monopolisées par l’avoir et non pas par l’être. Cette rencontre a été le début d’un long cheminement à travers les années d’occupation. Un jour, en sortant du Musée de la Résistance et de la Déportation de Besançon, j’ai éprouvé une sensation inattendue… d’appartenance au monde. Des lettres d’adieu de résistants condamnés à mort, émanaient une force vive, une foi inaliénable en l’Humanité. Mais le sentiment de trahison devenu alors plus ardent persiste encore aujourd’hui.
Plus de 60 ans plus tard, le chemin semble tout tracé. Mais dans le monde actuel, quelle est notre responsabilité personnelle si ce n'est à générer, du moins à cautionner implicitement ce qui se passe autour de nous ? Le spectacle interroge l'attente ; une attente qui induit la complaisance, la résignation, l’approbation muette, la complicité et par conséquent une collaboration tacite.
N’avons-nous pas besoin de nous souvenir que la détermination a valeur de force et qu’il y a un sens commun à trouver à l’ensemble de l’humanité ? L’action concrète, à partir de soi, autour de soi, engage dans la réalisation d’un idéal humain. Elle porte en elle la puissance d’exister.
Valérie Antonijevich
« La Résistance est la victoire de l’homme qui arrache quelque chose à la mort, où il nie le néant et la fatalité de sa condition. » André Malraux
Valérie Antonijevich découvre le témoignage juste et poignant de Léon Werth dans son journal de guerre Déposition – journal de guerre 1940-1944 (Editions Viviane Hamy). Conscient, avant la guerre, du danger qui menaçait les Juifs, Léon Werth est obligé de se réfugier dans sa maison de campagne du Jura, en zone sud, « à l’abri » ou presque. Ce brillant intellectuel, ami d’Antoine de Saint- Exupéry, trompe sa tristesse en tenant son journal. Dans un isolement presque complet, il écrit un des témoignages les plus lucides sur ses concitoyens, une analyse politique et philosophique étonnante sur l’époque et sur Vichy dont il hume dès le début les relents fascistes.
L’exploration des années noires la plonge dans des centaines de documents d’archives (lettres, journaux de guerre, rapports administratifs, documents secrets de la résistance). Ces témoignages directs des événements, vecteurs de l’histoire, ne permettent ni jugement, ni complaisance, ni angélisme et surtout aucune censure. L’occupation est démystifiée, on entre dans l’intimité des individus. Les détails de la vie quotidienne, les contradictions des esprits, la complexité des mentalités révèlent la topologie d’une société en pleine décomposition ; le poids des secrets obligés et des non-dits portent à la suspicion, ce à quoi s’ajoutent la violence des rapports sociaux et une parole troublante de l’Etat.
L’écriture des scènes, symptomatiques de la déchirure de la population française, s’est centrée sur le récit de l’occupation par des fragments de vie, de l’éphémère qui construit ce temps hors du temps.
Mon coeur caresse un espoir parcourt les années d’occupation sous une forme fragmentée à la manière d’un collage où l’on croise quelques 85 Figures archétypales. Si le texte plonge dans les années d’occupation, la mise en scène met à distance la reconstitution d’une réalité historique, exclue tout naturalisme et s’appuie sur une métaphore de la mémoire. Le théâtre est mis à nu pour retrouver l'atmosphère d’un d’entrepôt. Le plateau est dépouillé, pour exhausser l’éphémère et la fragilité de l’humain, pour renforcer le sentiment d’isolement, de solitude. Les objets sont traités comme une trace tangible d’existences disparues. Les comédiens se saisissent de ces dépouilles et font revivre, par bribes, des Figures du passé. Les scènes se succèdent suivant un rythme soutenu et demandent une grande mobilité dans le jeu des acteurs. La lumière ouvre ou étrangle l’espace. Le spectacle se construit ainsi. Par surgissements, télescopages, changements d’espace, de rythmes… Un renvoi incessant entre l’individu et le monde extérieur.
L’intensité de la lumière joue sur la sensation d’oppression, d’absence de repères, de mal-être. Les sons (musique, voix, sons quotidiens…) sont détournés et agencés afin de créer des sensations organiques.
Un écran est le symbole de l’horizon avec ce qu’il voile mais qui peut cependant se distinguer : disparition, emprisonnement, exécutions (travail sur les corps en transparence) et ce qu’il ferme (temps de guerre figés, interminables…). Il est la perspective de l’après, de l’Histoire : s’y gravent les mots de « Vichy » qui poussent toujours plus avant la collaboration. Les événements inscrivent dans les corps des traces visibles et invisibles. Yano Iatridès, chorégraphe, cherche à dévoiler l’inexprimable. Par cassures, mouvements, rythmiques, les « états » de corps créent une narration physique symptomatique de situations dramatiques : la violence n’est pas posée dans l’acte mais dans la potentialité de l’acte.
Cartoucherie - Route du Champ de Manœuvre 75012 Paris
Navette : Sortir en tête de ligne de métro, puis prendre soit la navette Cartoucherie (gratuite) garée sur la chaussée devant la station de taxis (départ toutes les quinze minutes, premier voyage 1h avant le début du spectacle) soit le bus 112, arrêt Cartoucherie.
En voiture : A partir de l'esplanade du château de Vincennes, longer le Parc Floral de Paris sur la droite par la route de la Pyramide. Au rond-point, tourner à gauche (parcours fléché).
Parking : Cartoucherie, 2ème portail sur la gauche.