Originaire du Sud-Ouest, Thierry Roisin allait parfois se promener en famille aux abords du château de Montaigne. Au collège, il a étudié Les Essais. Adulte et metteur en scène, il s’est profondément attaché à cet homme pour qui : « La parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui écoute ». Une invitation au théâtre, en somme. D’où, en 1992, un premier spectacle, et quinze ans plus tard, à nouveau le besoin de revenir vers cet être multiple, qui, après une chute de cheval a frôlé la mort de suffisamment près pour poser toutes sortes de questions sur le monde et les autres, et lui parmi les autres.
« Montaigne ne s’aime pas. Il se sent écrasé par son père, homme brillant, force de la nature, alors que lui est plutôt petit, pas très beau, maladroit de ses mains en un temps où rien ne se résout d’un clic ! Mais ses parents lui donnent une éducation exceptionnellement riche, il apprend le grec et le latin, grandit dans un cocon culturel, essentiel à l’évolution de sa pensée. Plus il avance, et plus, derrière l’univers du savoir et des concepts, surgit la question : qui suis-je ?
Montaigne ne pense pas en dehors de son corps, lien permanent entre expérience vécue et pensée. Cet homme qui n’a jamais cessé de mettre en doute les vérités évidentes, ne cherche pas à établir le grand échafaudage cohérent d’un système intellectuel, mais une philosophie qui aide à vivre. Pour moi, il ne s’agit pas d’inventer un personnage Montaigne à travers ses caractères psychologiques ou physiques, mais de trouver l’incarnation la plus physique de sa pensée en perpétuel mouvement. »
Alors accompagnés de deux musiciens, défilent sur un tapis roulant quantité d’objets, de mobiliers, de dispositifs, qui déclenchent sa réflexion. Il nous parle, dans son langage qui n’est pas « modernisé » mais adapté à nos oreilles.
« L’histoire pourrait être la suivante : au jugement dernier, nous sommes convoqués et, en un temps donné, devons répondre à des stimulations visuelles, musicales. A quoi ça vous fait penser ? Et c’est, avec Montaigne, une perpétuelle surprise. »
D'après Les Essais de Montaigne. Adaptation Thierry Roisin.
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