The Powerbook

du 17 au 27 septembre 2003
1H45

The Powerbook

Spectacle en anglais surtitré en français. Au cœur d’une cité tentaculaire, deux femmes se défient dans un jeu amoureux et électronique, semé de souris et de virus. Les contes merveilleux jalonnent l’idylle des héroïnes, secourues providentiellement par les armes du virtuel quand la réalité leur fait défaut.

Spectacle anglais surtitré en français

Idylle féminine et informatique
Les mots inventés

Un projet expérimental

La presse britannique

Au cœur d’une cité tentaculaire, deux femmes se défient dans un jeu amoureux et électronique, semé de souris et de virus. Les contes merveilleux jalonnent l'idylle des héroïnes, secourues providentiellement par les armes du virtuel quand la réalité leur fait défaut. 

The PowerBook mêle les récits fantastiques de Lancelot et Guenièvre, et les aventures de l’alpiniste George Mallory autour de l’histoire d’un couple interprétée par la comédienne fétiche de Deborah Warner, Fiona Shaw, et par l’actrice de cinéma Saffron Burrows (Enigma, Hotel, Lovelife, Deep blue sea, ou Mademoiselle Julie dans l’adaptation signée Mike Figgis). 

Publiés dans plus d’une trentaine de pays, les écrits de Jeanette Winterson lui ont bâti une notoriété aussi considérable que controversée. Sa première œuvre Les Oranges ne sont pas les seuls fruits reçoit au milieu des années quatre-vingt le prix Whitbread, et joue déjà du mélange des genres, associant plusieurs registres, aphorismes, considérations philosophiques, journal intime, dialogues… «Je me bats avec le langage pour le faire sortir de ses démarcations usuelles, dit-elle, pour obtenir quelque chose de fort et de contemporain.» «A travers le XXe siècle, les auteurs les plus intéressants ont travaillé à abolir les catégories traditionnelles qui séparent la fiction de la non-fiction, la réalité de l’invention. Pensez à Joyce, Woolf, Borges, Calvino, Perec » 

Vivement impressionnée par le travail de Deborah Warner et de Fiona Shaw sur The Waste Land, d’après T.S. Eliot, elle déclare : «C’est un grand privilège pour moi de travailler avec elles. Au théâtre, les règles sont très visibles pour les acteurs, les metteurs en scène et les auteurs. Respectez les règles, et vous pourrez produire un bon travail. Brisez-les, et vous pourrez peut-être obtenir quelque chose d’inouï, ou alors vous devrez fermer le théâtre. Deborah Warner et Fiona Shaw ont constamment cassé les règles du théâtre. Leur génie a été de faire en sorte que ça marche »

« Qui êtes-vous ?
- Appelez-moi Ali.
- Est-ce votre vrai nom ?
- Il fait l’affaire.
- Au masculin ou au féminin ?
- Quelle importance ?
- C’est un paramètre.
- Nous sommes dans un monde virtuel.
- D’accord… mais, par pure curiosité, masculin ou féminin ?
- Demandez à la princesse. »

Dans ce roman où le réel et le virtuel jouent à cache-cache, Jeanette Winterson déroule une histoire d’amour entrecoupée de contes merveilleux. Avec ses récits nocturnes et ses « turqueries », The PowerBook est peut-être l’ultime version des Mille et Une nuits.

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Les gens parlent du Réalisme - mais que veulent-ils dire au juste ? Généralement, la vie de tous les jours - le train-train quotidien. Les gens parlent de l’expérience personnelle, et c’est à l’autobiographie qu’ils font allusion. La mode actuelle pour le soap opera et les reality-shows fait partie de cet engouement pour le Réalisme.
Mais quelle est la part de réel ?
Ce qui m’importe à moi c’est la réalité totale - qui prend en compte le monde intérieur aussi bien que le monde extérieur. Ce dont nous rêvons autant que ce qui nous arrive. Pour moi, l’expérience personnelle va bien au-delà de l’autobiographie ; l’expérience personnelle questionne aussi l’imaginaire. Tout ce que j’ai écrit est une quête - une quête de soi, une quête pour comprendre, une quête d’intégrité émotionnelle. Lorsqu’on me questionne sur mes livres, je ne peux que dire qu’ils sont des façons de chercher autant que des façons de voir.
Je raconte une histoire - d’accord. Je parle du monde que nous connaissons - d’accord. Mais je vais aussi plus loin, car l’art ne décrit pas simplement le monde, il le transforme.
De quelle façon ?

Prenons une pomme de Cézanne. La pomme peinte est et n’est pas celle du compotier, celle que vous mangerez demain matin. Une pomme de Cézanne n’est pas une représentation d’une pomme, c’est une façon de nous re-présenter la pomme pour que nous puissions la voir. Nous la voyons comme pour la première fois. Comme si c’était la seule pomme au monde. Nous la voyons comme Eve a dû la voir il y a bien longtemps dans le jardin d’Eden. 
Il nous est très difficile de regarder les choses. La vie défile dans un brouillard. Nous ne savons voir l’objet en soi tel qu’il est réellement, parce que notre propre réalité subjective ne cesse d’interférer, et que nous ne sommes pas suffisamment maîtres de nous-mêmes pour repérer la façon dont sujet et objet ne cessent de se mêler et de former de nouveaux ensembles. Notre expérience est fragmentée et partielle.
L’art rassemble nos réalités disparates et donne cohérence à notre expérience. La satisfaction émotionnelle face à l’art est la satisfaction de la plénitude.

Toute ma vie j’ai cherché à dévoiler les chemins du cœur. On a beau être sophistiqué, nos sentiments ne le sont pas. On a beau contrôler nos vies, on tombe pourtant encore amoureux.
On sait tout et rien de l’amour.
Mon travail se situe davantage dans la tradition européenne de Borges et de Calvino qu’il n’a à voir avec la tradition réaliste et narrative anglo-américaine. J’aime utiliser des mondes inventés. Je parcours des continents d’histoire et des géographies de temps pour arriver dans une vallée boisée où là, je déterre une histoire. Il y a toujours des histoires - des histoires sans fin - mais pas enfermées dans un temps ni un lieu. 

L’art parle de liberté. Je veux une immense liberté dans mon travail. Je veux vous donner cette liberté.
Quant à la forme, je tiens à souder les qualités narratives de la fiction avec la densité poétique. Le langage est plus que le sens - il est rythme, flamboiement et transformation. Trouvez les mots justes, mais vous ne trouverez pas pour autant le sens, vous pourrez atteindre l’être par-delà le sens. C’est ce que fait la vraie poésie. C’est ce challenge que je me propose.
Nous vivons l’âge du multimédia, des tribunes croisées. Les vieilles formes s’effondrent. Des catégories telles que fiction et non-fiction, poésie et roman, mise en scène et texte, ne nous servent pratiquement plus à rien. Le travail intéressant naît des décombres de cet effondrement. On se doit de construire de nouvelles formes, de trouver de nouvelles façons de travailler.

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Lorsque Deborah Warner est venue me trouver pour me demander les droits de représentation de PowerBook, elle m’a dit qu’elle souhaitait faire un théâtre d’un genre nouveau. J’ai été soulagée. Ce vieux territoire que constitue l’adaptation pour la scène ou pour l’écran est actuellement tari. Il nous faut de nouvelles sources, de nouveaux liens où boire. Des risques y sont inhérents, mais ce que vous risquez est à la hauteur de vos prétentions.

Ce projet expérimental autour de PowerBook consiste à prendre le texte - comme Deborah et Fiona ont fait avec The Waste Land - et à laisser la situation dramatique percer au travers. Le texte devient un prisme au travers duquel on peut laisser passer la lumière. Lorsque la lumière filtre au travers - (improvisation, mise en scène, jeu des acteurs, musique, scénographie, c’est ce qu’on appellerait ici lumière) - des formes, des ombres et des couleurs apparaissent et certaines images sont magnifiées tandis que d’autres s’estompent. La forme se développe de façon organique, ce n’est qu’à l’ultime seconde que nous fixons. Par-dessus tout nous faisons confiance au texte et c’est ce qui nous différencie d’un workshop ou d’une improvisation. Il y a des limites formelles, et nous nous étions mis d’accord dès le début que si le PowerBook s’effondrait sous les contraintes, nous abandonnerions le projet.

Expérimenter me passionne. C’est la seule façon d’avancer et c’est curieux de constater que tandis que nous acceptons les expérimentations scientifiques, cela nous déplaît en art. Nous sommes d’instinct conservateurs, nous préférons avoir à faire avec ce que nous connaissons. Pourtant l’art doit se renouveler. Ce n’est qu’en se renouvelant qu’il reste en relation avec ce qui a eu lieu avant. L’art du passé et l’art du présent font partie intégrante de la chaîne ininterrompue de la créativité humaine et nous devons tolérer cela. 

Je suis également passionnée par la forme. Le manque de forme conduit au chaos. J’outrepasse les règles et je les brise quand je peux mais je sais bien ce que sont les règles.
Au théâtre, les règles sont très visibles, pour les acteurs, les metteurs en scène et les dramaturges. Tenez-vous en aux règles et vous ferez du bon travail, un bon divertissement. Brisez-les et soit vous ferez quelque chose de sensationnel, soit vous pourrez baisser le rideau. Deborah Warner et Fiona Shaw n’ont eu de cesse de briser les règles du théâtre. Elles y sont génialement parvenues, autant dans la construction que dans le parcours émotionnel.
C’est un grand privilège pour moi de travailler avec elles.

Pour éviter de découvrir, je poursuis mon chemin. Pour faire des découvertes, je poursuis mon chemin. 

Jeanette Winterson, avril 2002

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The Guardian, Michael Billington, lundi 20 mai 2002
"
Une pièce somptueusement espiègle sur l’amour, l’art de raconter des histoires, le sexe et la puissance de métamorphose de la fiction.

Le spectacle imaginé par Winterson, Deborah Warner et Fiona Shaw est une méditation libre sur la force dévastatrice de la passion et sur la capacité qu’ont les mondes fictionnels à remettre de l’ordre dans la réalité. La mise en scène de Warner, la scénographie et les vidéos de Tom Pye, allient la gaieté libératrice de l’Orlando de Virginia Woolf à l’intensité émotionnelle d’un film d’Antonioni des années soixante.

Le récit de Winterson profite de la nature physique, concrète du théâtre et combine avec jubilation érotisme et humour.

Sous les doigts de Warner, l’espace scénique est autant dédié à l’imaginaire qu’à la fiction. Shaw évoque avec beaucoup de brio l’écrivain à la mémoire infaillible tiraillé entre les impératifs de la fiction et les réalités désordonnées de la vie, et Burrows, l’épouse-amante, est allumeuse autant qu’insaisissable. Une pièce adulte, divertissante, pleine d’astuce."

The Times, Benedict Nightingale, lundi 20 mai 2002
"
La nouvelle production du Lyttelton est aussi peu conventionnelle que le lieu lui-même ? Mais c’est loin d’être un scoop puisque c’est Deborah Warner qui signe la mise en scène, Fiona Shaw qui joue, et toutes les deux ont participé à l’adaptation du PowerBook, une œuvre de Jeanette Winterson.

Fiona Shaw est assise devant l’ordinateur portable et tapote tous azimuts des histoires dans le cyberspace tandis, qu’avec une ironie désabusée, elle est justement impliquée passionnément dans l’une d’elle, qui va durer toute la soirée. Ce qui la conduit à tomber amoureuse en ligne mais également hors-ligne, d’une très belle femme, fuyante et non nommée, très élégamment jouée par Saffron Burrows.

Comme le dit Shaw elle-même, il s’agit d’un monde où le sexe est banal mais l’amour tabou. Et l’amour « perce les mains et les pieds » sans compter les cœurs et la moelle.
C’est absolument charmant, intelligent, passionné, raffiné…"

Evening Standard, Nicolas de Jong, lundi 20 mai 2002
J’ai été charmé, ému, vivifié par le PowerBook de Deborah Warner : Fiona Shaw et Saffron Burrows (celle-ci faisait des débuts remarqués, cette fois au centre de Londres) y jouent deux lesbiennes en dérive dans la réalité virtuelle qui ne parviennent pas à installer une relation durable entre elles.

Deborah Warner fait vibrer Lyttleton d’une superbe étrangeté. La scène est régulièrement illuminée de vidéos projections, tandis que, venus de droite et de gauche, des signes ésotériques défilent sur un immense écran noir et s’impriment sur le plateau . Le monde virtuel bondit, s’écoule librement, tout droit sorti des rêves pleins de malice et d’invention de Jeanette Winterson.

Cette adaptation fidèle capte la rhétorique rare, étrange, lyrique de Winterson. Elle crée merveilleusement un cyber monde sur scène, et ses personnages nous entraînent dans un espace-temps virtuel, dans le Paris, le Capri, d’aujourd’hui ou de jadis.

Un motif unique sous-tend cependant le rythme des séquences. The PowerBook est en proie aux peines et aux angoisses de l’amour obsessionnel.

Une Burrows sophistiquée et plutôt pète-sec, tout aussi splendide et naturelle sur scène qu’à l’écran, déambule, séductrice, dans des chambres multiples, surgit du cyber espace, pour offrir l’extase, mais seulement pour une nuit.

La musique délicate et hypnotique de Mel Mercier, qui communique une sensation mélancolique d’extase et de solitude, aide à brusquer les amantes lors de leur dernière rencontre à la gare de Paddington : dans la vision envoûtante imaginée par Deborah Warner, la scène apparaît soudain immense dans la lumière aveuglante des trains, et un sentiment de perte nous étreint.

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Spectacle terminé depuis le samedi 27 septembre 2003

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