Trois couples de citadins trentenaires se retrouvent en forêt pour passer la soirée le temps d’un barbecue, loin de la ville. Sous ses allures régénératrices, ce barbecue va peu à peu révéler les travers de chacun, l’insouciance collective. Au milieu de la nuit un incendie dévastateur éclate faisant naître un théâtre tragique. Dans la forêt incandescente se jouent alors plusieurs traversées infernales.
Entre déni et culpabilité cette pièce nous questionne sur les capacités de l’homme, face à une solitude nouvelle, à envisager une éventuelle issue.
Tristesse animal noir est une pièce à l’architecture formelle. Il est donc essentiel de rendre compte dans la mise en scène et par le biais du travail du son et de la lumière de cette construction particulière.
Le traitement de la lumière et du son est alors conçu en duo comme une partition en trois mouvements pour accentuer la structure ternaire du texte et révéler le geste de la pièce, son élan. La lumière est pensée avec la scénographie et rythme son évolution.
Intégrées au dispositif scénique, les sources lumineuses sont visibles par le spectateur, dénoncées, comme pour appuyer cette idée de plateau de tournage. La lumière est traitée dans une évolution à mesure que le récit avance, une continuité, d’un espace chaleureux, accueillant dans la première partie pour sombrer dans l’incendie et enfin dans l’espace plus cérébral de la dernière partie où tout semble plus étouffé et les personnages privés de leur singularité.
Le son dans Tristesse animal noir est très présent. On peut noter la musicalité de la langue et les nombreuses références de l’autrice aux grands standards – Elvis, Kate Bush – mais aussi le son de la nature, de la forêt, de la faune, de la flore, le crépitement du feu, l’explosion... Une matière dense et incroyablement intéressante à exploiter.
Par ailleurs, le caractère cinématographique qui teinte l’écriture d’Anja Hilling nous pousse à interroger la partition sonore presque à la manière d’une bande originale de film ainsi que dans son aspect immersif, comme un appel aux sens, afin d’englober le spectateur, le plongeant intimement au coeur de la tragédie, entre le calme de la forêt de contes apaisante et le caractère hostile de la forêt meurtrière, lieu de crispation.
10, place Charles Dullin 75018 Paris