Après Peer Gynt, Les Revenants et Brand, Stéphane Braunschweig poursuit sa confrontation avec l'œuvre d’Ibsen, en montant en miroir Une maison de poupée et Rosmersholm. Qu’ont en commun la demeure rigoriste du pasteur Rosmer, où les morts viennent hanter les vivants de leurs reproches, et celle de Nora, où semble s’épanouir un projet réussi de bonheur familial ? Entre autres, la façon dont les personnages s’y trouvent précipités dans l’urgence d’un choix décisif, radical : la percée qui s’ouvre devant eux - l’espoir d’une vie autre, hors d’un monde normé - comporte une part considérable de destruction...
Alors que cette radicalité surgit peu à peu, de façon totalement inattendue, dans l’univers pacifié d’Une maison de poupée, elle s’impose d’entrée dans Rosmersholm, sous une forme politique autant qu’intime, comme le seul moyen d’accéder au bonheur : la mystérieuse Rebekka West, prête à tout pour arracher Rosmer au destin de sa lignée, incarne cette violence salvatrice.
Mais - ironie d’Ibsen - c’est Nora, celle qui semblait avoir tout parié sur le compromis, qui passera à l’acte, tandis que Rebekka et Rosmer, brisés par les transgressions, rendront les armes. Ces parcours inverses ouvrent pourtant sur une même brûlure : jetés dans le vide, obligés de renoncer à tout ce qu’ils croyaient être, privés des valeurs sur lesquelles ils avaient construit leur vie, les personnages d’Ibsen doivent s’inventer un autre chemin, se frayer à tout prix une sortie pour renaître à eux-mêmes, coûte que coûte.
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