A partir de 14 ans. A IVT, version bilingue français / LSF.
Deux collègues bibliothécaires, l’une sourde, l’autre entendante, de retour d’un voyage au Sénégal, nous livrent un conte qu’elles ont écrit et traduit en langue des signes. L’une comme l’autre, en toute naïveté, déballent préjugés et stéréotypes raciaux enracinés dans l’inconscient collectif, mélange d’émerveillement, de paternalisme et d’apitoiement. À cet ethnocentrisme occidental s’ajoutent les clichés qui existent bien souvent dans les rapports entre sourds et entendants.
Chacune des deux comédiennes s’adressant à son public, les sourds et les entendants partagent et vivent les mêmes émotions, parfois au même moment, parfois avec un léger décalage qui accentue le rapport comique entre les deux personnages. Par un jeu de miroir à double face entre les deux femmes et le public, c’est nous tous qu’elles interrogent sur nos différences.
Adaptation LSF Delphine Saint-Raymond.
C’est dans la plus pure tradition des contes africains qu’Anne-Sybille a écrit « Attifa de Yambolé ». Si elle s’adresse cette fois à nous, les adultes, on retrouve dans cette fable africaine l’enthousiasme et la générosité qu’on lui connaît dans ses contes pour enfants.
Par le biais de cette fable, Anne-Sybille nous fait partager ses passions toutes récentes pour l’art du conte et pour cette Afrique, « si pittoresque, si chaleureuse, si déroutante ». «…j’ai voulu créer un pont entre nos deux cultures et inviter le public à traverser ce pont en ma compagnie. Il y a tant à dire sur ce pays. C’est tellement riche l’Afrique… Enfin, façon de parler. »
« J'adooore l’Afrique et les africains », elle a passé 10 jours dans un club de vacances au Sénégal l’année précédente et il lui semble depuis qu’elle a découvert un peuple et sa culture.… Enthousiasme et générosité ?… ou naïveté et bonne conscience ?… Cette parodie de conte africain ou plutôt de conteuse récemment piquée d’Afrique, évoque, avec humour, les préjugés raciaux incrustés dans l’inconscient collectif, mélanges de paternalisme et d’apitoiement ; la bonne conscience à bon compte ; en bref l’ethnocentrisme occidental.
Production les 26000 couverts. Par La Soi-Disante compagnie.
Il m’est arrivé d’aller en Afrique à plusieurs reprises et bien souvent, lors de ces voyages, je ne pouvais me départir d’une sensation de malaise, qui me prenait en de nombreuses occasions et qui accompagnait les sentiments les plus divers : appréhension, peur, incompréhension, désarroi, déroute, dégoût...
Peur de me retrouver la seule blanche parmi tous les noirs, dans une foule de ville Africaine ; désarroi de ne pas comprendre comment « ça marche », comment il faut faire ; appréhension sans cesse de me faire « arnaquer », dans les taxis, ou sur les marchés ; dégoût
evant la saleté de certains lieux ; incompréhension constante devant un mode de vie tellement éloigné du mien… Ressentir la culpabilité et la honte d’éprouver ces sentiments-là et de ne pouvoir me départir de ces réactions caricaturales de touriste français. Culpabilité et honte aussi de ne pas reconnaître certaines personnes et d’avoir la sensation « qu’ils se ressemblent tous » comme j’avais pu l’entendre dire par les pires racistes ; ou bien encore de me retrouver à photographier telle tribu Africaine, tellement pittoresque, comme de vulgaires animaux de zoo…
Culpabilité et honte enfin de ne pas pouvoir me départir d’une certaine notion de jugement, en maintes occasions, tout en ayant conscience que je me trouvais face à d’autres cultures, d’autres façons de faire et d’appréhender les rapports socioculturels et que je n’aurais donc pas du porter de jugement. D’où ce sentiment de culpabilité car le jugement s’imposait alors à mon esprit, plus fort que le raisonnement.
Moi qui me targuais, et qui me targue toujours, de ne pas être raciste… Je ne suis pas sociologue, je n’ai pas fait d’études sur les différences entre les
cultures Africaines et Occidentales, j’ai même passé très peu de temps à réfléchir à ce sujet. Je voulais juste faire « quelque chose » de ce malaise, de cette déroute, de cette incompréhension, et des sentiments de honte et de culpabilité qui allaient avec et qui m’ont tant pesé, et qui pèsent je crois sur beaucoup d’entres nous. Le fil est ténu entre le ressenti et le jugement, l’incompréhension et le mépris, la conscience de la différence et le racisme, la naïveté et la bêtise…
Anne-Sybille, le personnage du spectacle, se pose beaucoup moins de questions, même si elle fait mine de s'en poser parfois, et elle va donc passer ce fil, cette frontière entre l'acceptable et le non-acceptable sans en avoir conscience. J’ai voulu créer un spectacle sur les préjugés et les stéréotypes raciaux incrustés dans l'inconscient collectif, ainsi que sur le comportement ethnocentrique du touriste français en Afrique.
J’ai voulu faire un spectacle drôle, qui ne soit pas « que » drôle mais peut-être aussi une sorte de miroir pour le spectateur, et l’interpelle sur son propre vécu.
Valérie Véril, septembre 2011
« [...] C’était un homme très imposant : il était très grand, très noir, avec les cheveux blancs et crépus. Il avait de vilaines cicatrices sur le visage que ses parents lui avaient fait exprès quand il était petit, soi-disant, pour lui donner force et virilité. [C’est une coutume africaine]. On lui prêtait de grands pouvoirs et il pouvait résoudre toutes sortes de problèmes, juste en lançant des coquillages par terre ou en égorgeant des poules et en se badigeonnant les mains et le visage de leur sang. C’était un homme très puissant.
– Nangadèf, Hamadou Souyaké Macky Tall Konaté Diop Coulibally, lui dit Attifa. Te portes-tu bien ? Ta santé est-elle bonne ? Et ta femme Fatouma, va-t-elle bien ? Et tes enfants sont-ils en forme ? etc.
[Oui là-bas en Afrique, les salutations d’usage sont toujours très longues. C’est leur façon de faire : ça fait partie de la politesse africaine. Ça peut surprendre au début quand on n’est pas habitué. C’est particulier. On peut trouver ça un peu pénible même parfois. Mais c’est comme ça, il faut s’y habituer. C’est comme pour les cicatrices sur le visage : ça peut choquer, mais, c’est leur coutume. Il ne faut pas juger. Ils sont différents.]
« Oh, Hamadou Souyaké Macky Tall Konaté Diop Coulibally, toi qui connais le chemin qui conduit au royaume des ancêtres, aide-moi à me délivrer du grand chagrin qui pèse sur mon coeur :
Celui de n’avoir pu donner
À ma mère un dernier baiser
Le jour où dans la grand’ forêt
Elle disparut à tout jamais
– Attifa, lui répondit Hamadou Souyak… lui répondit le grand sage du village de Yambolé [pour simplifier nous l’appellerons le grand sage du village de Yambolé plutôt que Hamadou Souyaké Macky Tall Konaté Diop Coulibally] [...] »
7, cité Chaptal 75009 Paris