On peut s’accuser de s’être exposé au soleil, de ne pas avoir aider quelqu’un dans le besoin, d’avoir trop mangé et puis on peut s’accuser d’avoir participé à un crime... « Je » énonce ce qui l’a constitué, ce qui a fait de lui un animal social, décline son parcours, ses fautes, les violences qu’il a subit, celles qu’il a perpétrées, expose le Bien, le Mal, le langage. « Je » tente de se dire, en avançant dans la langue qui l’a forgé. « Je » se veut glacial, sans concession, universel. « Je » est prosaïque, contradictoire, singulier.
Avec humour et sans complaisance, un homme s’accuse de tous les maux du monde pendant 50 minutes. L’obstination de l'homme à se considérer coupable devient peu à peu une folie du langage. L’effet miroir est garanti : le texte est corrosif, enlevé, vertigineux. « Je suis devenu à moi-même une question. J’ai perdu mon temps. Je ne me suis pas réveillé à temps. J’ai voulu retenir le temps. J’ai voulu faire avancer le temps. Je me suis retrouvé en contradiction avec le temps. Je n’ai pas voulu grandir. Je n’ai pas voulu mourir. Je n’ai pas laissé les choses venir à moi ».
« J'ai vu le spectacle en sortie de résidence aux Lilas. J'ai été fasciné par le travail de Xavier Legrand. Je le connaissais... Il a joué Treplev dans la Mouette et Touzenbach dans Trois Soeurs. J'ai joué dans son court-métrage récompensé aux Césars : Avant que de tout perdre. Oui, je connais Xavier ou du moins je croyais le connaitre. Ce spectacle ouvre des perspectives inouïes sur ses capacités d'acteurs, surveillées attentivement et précautionneusement par Félicité Chaton... Eh oui... Maintenant à vous de le découvrir. »
Christian Benedetti
« On est pris, on est scié, on rit, on est choqué, et surtout, on s’interroge au bout du compte, sur ce que c’est qu’être un homme. » Marie Plantin, Pariscope
Notre spectacle est indissociable du texte : c’est ce qui advient de son énonciation que je mets en lumière. Rien ne doit nous en distraire. Pour porter cette énumération abyssale, il faut de l’humour, de la légèreté et de la vivacité. L’acteur est en lien permanent avec le public, sur le fil, sa parole est adressée et incarnée. Pour autant, il n’y a aucun naturalisme dans cette prise de parole : le texte est comme une mise en exposition de l’Homme. Pour l’accentuer, nous mettons en exposition ce que serait le corps de « l'animal social », dont il est question. Des petits gestes quotidiens que tous reconnaissent (les mains dans les poches, une main sur la bouche, la tête baissée) mais aussi des gestes plus fondamentaux (se coucher, marcher, etc.) viennent accompagner ou créer un contre point au texte. Ainsi, l’acteur joue deux partitions, simultanément, l’une parlée, l’autre physique, jusqu’à s’en libérer. Nous assistons à une machine humaine qui se questionne, se détraque et explose.
En s’accusant lui-même, l’acteur tend un miroir. On entend à la fois la culpabilité abyssale d’un enfant de l’Histoire autrichienne et celle de tout un chacun. Le spectateur sera amené à penser : « Oui j’ai dévisagé un étranger, non je n’ai pas détourné les yeux, oui je ne suis pas devenu ce que j’aurais pu devenir ». Ce n’est donc pas toujours agréable à entendre, mais c’est un moment dont je souhaite qu’on se dise : il a été nécessaire.
16, rue Marcelin Berthelot 94140 Alfortville
Voiture : périphérique Porte de Bercy / autoroute A4 direction Metz-Nancy sortie Alfortville.