La jalousie du passé
L’art de faire du scandale
Révolution esthétique
Tango sicilien
Le bourdon et la croix
Note d’intention sur le projet musical
La presse en parle
"Depuis bien des années (mais c'est comme si c'était hier) une petite servante très délurée et néanmoins toujours novice dans le métier s'est mise au service de mon art. Elle se nomme Imagination. Elle s'amuse à ramener chez moi, afin que j'en tire des nouvelles, des romans et des pièces, les gens les plus mécontents du monde : des hommes, des femmes, des enfants empêtrés dans des situations inextricables dont ils ne savent comment se tirer; des êtres contrariés dans leurs projets, d'autres trompés dans leurs espérances; bref, des personnes qu'il n'est souvent pas bien agréable de fréquenter." Pirandello, préface à Six Personnages en quête d'auteur
Quelques uns de ces "êtres contrariés" qui hantent Pirandello, se sont invités dans Ce soir on improvise. Ils constituent une troupe de théâtre dirigée par un metteur en scène démiurge qui a décidé de faire improviser les acteurs en prenant pour canevas une nouvelle de… Pirandello, Leonora, addio. L'action se situe en Sicile et relate un drame de la jalousie, un type de jalousie implacable, irrémédiable : la jalousie du passé.
Une foule de personnages passionnés, exubérants, exaltés, va surgir pour raconter le théâtre - et les affres de la création - mais aussi le monde avec ses tragédies et ses comédies. C'est ainsi que l'on verra sur scène une procession religieuse sicilienne, une dispute dans un cabaret glauque, un scandale à l'Opéra où se jouent des œuvres de Verdi, un terrain d'aviation sur lequel fait irruption une chanteuse désespérée, la mort violente d'un ingénieur des mines au milieu de sa famille napolitaine, et, en apothéose, les crises de jalousie d'un mari sicilien qui finira, à force de harcèlement, par causer la mort de sa femme.
Traduction d' Adel Hakim, musiques et arrangements Philippe Boivin, chorégraphies Silvina Valz.
Ce soir on improvise est une pièce où l’on fait plus semblant d’improviser que l’on improvise réellement dans la mesure où tous les « dérapages » de la représentation sont prévus et contrôlés par Pirandello. Ce sont précisément ces dérapages qui semblent l’intéresser et l’amuser. Dérapages qui vont générer comédie aussi bien que tragédie, dérapages qui vont permettre le développement d’un large éventail de comportements psychologiques et sociaux et la description de tout un monde, ou plutôt deux : celui du théâtre et celui de l’Italie du début du XXè siècle, avec ses clans régionaux, ses façons d’être contrastées, sa xénophobie, ses passions exacerbées, ses fanatismes, son puritanisme et son esprit provocateur.
Il y a dans la pièce une grande jubilation à faire du scandale. Le ressort du spectacle avec ses innombrables coups de théâtres, consiste en une succession de scandales. Pour cela, Pirandello choisit de porter à la scène une famille napolitaine, la famille La Croce, composée d’une mère et de trois filles exubérantes, et d’un père falot. Cette famille sans complexes, ouverte au monde et aux plaisirs, revendiquant son appartenance au « Continent », vit en Sicile, cette île où, on le sait - ou du moins telle est l’image que souhaite en donner l’auteur - les codes sociaux sont austères, restrictifs et normatifs. Confrontation de deux modes de vie, deux visions du monde, à l’origine de toute une série de scandales : scandale dans la rue, scandale dans un cabaret, scandale à l’opéra, scandale à l’intérieur de la maison, que ce soit à l’occasion d’une rage de dent, d’une scène de jalousie ou de la mort du père de famille ; et bien sûr, puisque dans la pièce il s’agit beaucoup de théâtre dans le théâtre, scandales autour des répétitions et des représentations, scandales provoqués aussi bien par le metteur en scène Hinkfuss (qui dans notre spectacle sera « une » metteur en scène) que par les acteurs, scandales que font aussi les spectateurs au cours de la représentation.
Bref le scandale est partout, le scandale est roi. Il agit comme une force vitale qui anime les passions, qu’elles s’appellent désir, amour, haine, jalousie, ou tout simplement passion du théâtre. On sent chez Pirandello une folle passion de la représentation et des questions qu’elle soulève. Une folle passion à partager avec le public. Loin de toute recherche de consensus ou de désir de plaire à tout prix, l’art de Pirandello est avant tout un art de la provocation. C’est sans doute ce qui a fait de lui un des géants de l’art du XXè siècle.
Contemporaine des recherches de Stanislavski, de Freud et de Proust, la pièce Ce soir on improvise a été écrite dans la fin des années 20. Elle fait partie, avec Six personnages en quête d'auteur et Chacun à sa manière d'une trilogie sur le "théâtre dans le théâtre" et a largement contribué à faire de Pirandello un révolutionnaire de l'art théâtral… Elle reste d'une exemplaire actualité pour les questions qu'elle pose sur l'art et sur la société. Pirandello y déconstruit le rapport entre illusion et réalité, exprime des idées théoriques à l'intérieur même de la pièce, tout en racontant avec une maîtrise spectaculaire une histoire de jalousie à la sicilienne, drôle, tragique et pathétique.
Dans les années vingt, la surprise des spectateurs des premières représentations devait être extrême devant l’originalité du propos. D’autant plus que Pirandello, dans ses didascalies, fait appel à la projection d’un film pour la scène de l’opéra : « théâtre dans le théâtre » donc, mais déjà « cinéma et théâtre ». Pirandello, on le voit, utilise toutes les ressources de la représentation scénique. La surprise du spectateur du XXIè siècle ne peut être, évidemment, du même ordre. Les multiples mises en miroir qui, dans Ce soir on improvise, brouillent les limites entre la vie et le théâtre, n’en demeurent pas moins vertigineuses. C’est dans la production de ce vertige que réside encore aujourd’hui l’enjeu d’une représentation de cette pièce.
Précurseur du Fellini de Huit et demi, de Ginger et Fred, de Prova d'Orchestra (un orchestre ou une troupe de théâtre comme modèle réduit de la société), Pirandello marque de manière durable l’art théâtral tout en interrogeant les formes possibles de la représentation, et la relation qui existe entre l’œuvre écrite et ce qu’il en est donné à voir sur le plateau. Le rapport entre les acteurs et le metteur en scène est toujours passionnel et souvent conflictuel. Mais aussi le rapport entre chaque acteur et le personnage qu’il joue. La frontière qui fait passer des motivations du personnage à celles de l’acteur est perméable et les caractères finissent par se confondre même si les enjeux ne sont pas de même nature.
A l’exception d’Elisabeth Chailloux qui interprète Hinkfuss le metteur en scène, et de Marie-Sohna Condé qui interprète Madame Ignazia, la distribution de Ce soir on improvise est la même que celle des Jumeaux Vénitiens. Il s’agit donc pour une « troupe » de re-plonger dans l'univers de l'Italie. Imagination, délires, tendresse et humanité, le tout en chants et chorégraphies, où le tango côtoie l'opéra.
Dans toute son œuvre, Pirandello, le sicilien, né à Agrigente en 1867 au lieu-dit "villa du Chaos", dépeint les images farouches qu'il rencontre partout sur son île : chez les hommes, la violence contenue et la cruauté, chez les femmes, l'infinie patience du renoncement silencieux. En ce sens, Rico Verri, le protagoniste de Ce soir on improvise, réussira à faire de Mommina-la-napolitaine, une vraie sicilienne. C'est l'histoire de cette transformation "idéologique" qui constitue le fil narratif de la pièce. Par saccades, les passions se déchaînent, provoquant le scandale. Les disputes éclatent pour libérer les rancunes accumulées. Et la mort rôde, suggérée par l'exubérance même de la vie. Il est impossible d'échapper à l'île. Même en prenant la fuite, les coutumes, les traditions, les usages sont les plus forts.
C'est pour cela que nous avons choisi le tango (sous la direction de la chorégraphe argentine Silvina Valz) comme un des éléments constitutifs du spectacle. Inventé par les marins de Buenos Aires irrévocablement relégués à leur solitude et à leur ineffable mélancolie, le tango rappelle la tristesse des siciliens et leur sens tragique de la vie. Percevant le contraste qui existe entre leur âme fermée et la nature tout autour d'eux ouverte, illuminée de soleil, ils se replient sur eux-mêmes car de tous côtés, la mer les entoure ; elle les isole de ces horizons largement ouverts ; elle les retranche du monde et les voue à la solitude; aussi chacun d'eux est-il une île, orgueilleusement replié sur lui-même.
Incapables d'échapper à leur tempérament, les siciliens de Pirandello savent qu'ils sont marqués par un destin qui les empêche de profiter pleinement des plaisirs de la vie et qui, de culpabilité en frustration, les conduira à commettre l'irréparable et à sombrer, d'une manière ou d'une autre, dans la folie.
Au tango, s’oppose l’opéra. L’opéra de Verdi. Même dans ce qu’elles ont de plus tragiques, les œuvres de Verdi explosent de vie. Elles sont exubérantes, ouvertes, comme doivent l’être les voix des chanteurs. Par sa passion pour l’opéra de Verdi, la famille La Croce s’oppose au tempérament sicilien. En cela, tout autant que par son mode de vie, elle choque, elle provoque d’abord le scandale puis la tragédie.
Philippe Boivin, qui compose les musiques originales et assure les arrangements des airs du Trouvère, a relevé les concordances qui existent entre la musique de Verdi et le tango, en particulier celui d’Astor Piazzola. C’est à partir de cette constatation qu’il a décidé que la musique du spectacle se déclinerait suivant des variations des sept airs du Trouvère cités par Pirandello dans le texte même de Ce soir on improvise. Ces musiques sont jouées par trois musiciens au violoncelle, au violon, à l’accordéon et au bandonéon.
Pirandello est un grand analyste des sentiments humains. Ses pièces - et Ce soir on improvise en donne la preuve - sont constituées de tout un réseau d'associations qui établissent un univers mental extrêmement élaboré.
Un exemple en est cet épisode de son enfance raconté par Rico Verri, lorsqu'il voit un bourdon butiner une fleur. La peur qu'il ressent, parce qu'il pense que ce bourdon est en train de dévorer et de détruire la fleur, sera à l'origine de son aversion pour la sexualité dans laquelle il ne voit rien d'autre que l'attaque brutale du mâle sur la femelle. Et c'est au nom de ce principe - préserver la femme de l'assaut des hommes - qu'il va élaborer toute une morale répressive qui se révèlera en fait désastreuse pour lui-même - en tant que source de frustrations le menant au bord de la folie - aussi bien que pour les femmes qu'il prétend protéger alors qu'il ne cherche qu'à les annihiler, en niant leur sexualité et en voulant les en expurger.
Ce sentiment lié à un souvenir d’enfance de Rico Verri, procède évidemment d'un malentendu, puisque l'on sait que le bourdon, loin de détruire les fleurs qu'il butine, contribue au contraire, à leur reproduction. Il en résulte que la peur, mais aussi ses conséquences morales destructrices, procèdent du même tragique malentendu.
Cette pathologie, loin d'être une pathologie individuelle, est une maladie sociale. Pirandello construit sa dramaturgie autour de ce thème : la sexualité en rapport avec sa répression dans une société puritaine intégriste placée sous le signe de la croix. La pièce, juste après le prologue, s’ouvre sur la procession sicilienne où l’on sent le poids et la sévérité de la religion catholique. Et, dans la continuité, cette procession se transforme en scène de cabaret, lieu de débauche, de violence et de mort. Ensuite, au début du troisième acte, la tentative de guérison de la rage de dents chez la famille La Croce (La Croix) se noue autour de l’image de la Vierge et de la récitation de l’Ave Maria. Enfin, ce que Rico Verri, en bon intégriste, ne supporte pas, c’est non seulement la licence des jeunes filles La Croce, mais le déguisement de Mommina pour chanter l’Azucena du « Trouvère », qui est une représentation profane, païenne ou, en tout cas, contraire à une idée rigoureuse de la religion chrétienne. Dans sa folie intégriste, il n’y a pas d’autre solution, pour la suppression du mal, que la suppression de la personne, d’abord dans sa volonté, puis dans son inconscient, enfin dans sa vie.
Adel Hakim
…comme dans beaucoup de musiques de l’Amérique latine, l’intérêt du tango réside dans la manière dont l’orchestre exécute la musique. Ce qui fait sens, c’est précisément ce que les musiciens vont faire du standard et non la musique elle-même qui est, en général, connue de tous. La pertinence musicale dépend davantage des musiciens et des arrangeurs que du texte lui-même. Parfois, l’arrangeur peut faire prendre à la mélodie un détour qui peut s’éloigner considérablement du texte original, tout en sachant qu’il faudra bien que l’orchestre revienne tôt ou tard au noyau dur de la mélodie…
Dans Ce soir on improvise, Giuseppe Verdi et particulièrement le Trouvère (dont des bribes sont évoquées voire chantées tout au long de la pièce de Pirandello) est omniprésent. Ces références à l’opéra, nécessairement périlleuses pour des comédiens soudain confrontés au grand répertoire lyrique, ne peuvent rester anecdotiques dans un projet articulant de manière aussi dramatiquement imbriquée texte et musique.
Le problème est que tout est faux dans ce spectacle, du début à la fin. L’action du Trouvère, opéra italien du XIXème siècle se situe dans le nord de l’Espagne au XVème siècle alors que la Sicile de Pirandello est transposée par Adel Hakim dans les faubourgs métissés du Buenos Aires du début du XXème siècle. D’ou l’idée d’interroger, amplifier, détourner le matériau musical cité par Pirandello lui-même, et pourquoi pas, créer de toutes pièces l’issue du voyage. Ainsi, lorsque l’auteur convie ses acteurs à la fête (et nos trois musiciens parfaitement intégrés à la troupe) il ne s’agit, en apparence, que de simples arrangements tentant de faire sonner au mieux l’original pour orchestre (chœur des gitans, stride la vampa), à moins qu’une oreille attentive n’y décèle d’étranges incrustations de chœurs ou de superpositions thématiques bien étrangères à Verdi. De même, lorsque l’une des sœurs, martyrisée par un mari jaloux de son pseudo passé, rassemble ses dernières forces pour tenter de chanter quelques lambeaux du célèbre opéra (Tacea la notte placida, Deserto sulla terra, a che la morte ognora), peut-être nous souvenons-nous encore de quelques vrais faux tangos ayant soutenu l’action à un moment ou à un autre de la pièce : que ce soit la targentelle de l’ouverture (improbable tarentelle argentine) ou la triple scène du cabaret dont l’original verdien se perd un peu plus tard dans un terrain d’aviation désert; à moins qu’il ne s’agisse effectivement d’authentiques tangos accompagnant quelques chorégraphies (prologue involontaire, entrées des filles et des aviateurs), le plus célèbre d’entre-eux étant certainement signé, avant la lettre, de Georges Bizet… Il est vrai qu’à l’époque, le tango s’appelait encore Habanera !
Enfin, il arrive inévitablement que monologues et dialogues se transforment en véritables morceaux de bravoure lorsque les acteurs, confrontés à la précision du temps musical, doivent se livrer à d’éprouvantes joutes vocales avec les musiciens.
Philippe Boivin
Compositeur en résidence au conservatoire municipal d’Ivry-sur-Seine
" Sur un air de tango. D'emblée, on est dans deux mondes. Celui de la famille La Croce, famille sicilienne tapageuse, et celui du théâtre articulé autour du conflit entre les acteurs et le metteur en scène. D'un côté, on suit les aventures d'une mère, Marie-Sohna Condé, saisissante, flanquée de ses deux filles, recevant chez elle des officiers en garnison, et de l'autre on écoute les différends entre comédiens, public et metteur en scène. Adel Hakim souligne à propos l'humour de la situation. Ce n'est pas la moindre qualité du spectacle. Il réussit également à éclairer l'intrigue. S'il y a désordre chez Pirandello, il est ici énergie bariolée, passage réussi d'un monde à l'autre, d'une tonalité à l'autre, des airs de Verdi à la canzone de cabaret, des amours libertines à la jalousie la plus féroce débouchant sur la destruction. Frédéric Cherboeuf est cet homme qui souffre et détruit, avec rage et douleur. On sort intrigué une fois encore par la touche pirandellienne. Une note ici parfaitement tenue entre rire et tragique. " Marion Thébaud, Le Figaro
" Les clans du Sicilien. Dans Ce soir on improvise, Luigi Pirandello piochait, il y a près d’un siècle, dans le patrimoine social de la Sicile, pour bousculer une fois de plus la représentation théâtrale. Là, le drame féroce de la jalousie avec l’idée de l’improvisation pour mettre le théâtre en abîme avec tous les vrais faux dérapages vers le scandale que cela pourrait impliquer. Adel Hakim ne rate pas une telle occasion. Il entraîne la pièce sur les rives de la passion, entre tango et opéra (conceptions de Philippe Boivin), sous des lumières d’Yves Collet. Et tous les comédiens dérapent superbement. " Jean-Pierre Bourcier, La Tribune
" Déballage contrôlé. Moins connue que la fameuse Six personnages en quête d’auteur, la pièce que monte Adel Hakim avec une fantaisie allègrement désespérée, déploie une drôlerie pensante plus enjouée. On y voit un metteur en scène (ici joué par une femme, excellente Elisabeth Chailloux) demander à sa troupe de se moquer du texte et d’improviser. Résultat : une série de malentendus et de distorsions dans l’histoire originale et dans le mental des personnages. La soirée est un grand déballage (maîtrisé) de sentiments, de passions, de propos sur la vie et le théâtre. Pris en main par des acteurs qui font des incursions dans la danse et le chant, Pirandello retrouve ainsi sa furia méditerranéenne. " Gilles Costaz, Zurban
" Ce soir on improvise. Tout commence par un gigantesque chaos. Dans le brouhaha d’une pseudo-répétition, un metteur en scène impose à sa troupe d’improviser une pièce à partir d’une nouvelle de Pirandello. Dès le début tout se mélange. Les comédiens jouent leurs rôles de comédiens en même temps qu’ils incarnent leurs personnages. Scandales et coups de théâtre se succèdent. La réalité déborde la fiction. Et les questions surgissent : où commence la liberté, où finit l’écriture ? Est-ce que tout est improvisation ? Pirandello prend un malin plaisir à nous perdre dans les joies de la mise en abyme, du théâtre dans le théâtre. Et c’est avec plaisir que nous nous laissons faire ici, parce que nous sommes guidés par une main de maître transparente, celle d’Adel Hakim. Le metteur en scène, le véritable cette fois, nous porte et nous entraîne avec ravissement dans un jeu de miroirs étourdissant. Ses tableaux combinent l’humour et la tragédie, jouant sur l’excentricité des décors et une espèce de folie des personnages. Il nous fait entrer dans un univers particulier, esthète et plein de symbolisme, où la Sicile flirte avec le tango, où l’émotion et le drame se mélangent avec passion. Un très beau spectacle porté par le travail d’une troupe remarquable. " Lise de Rocquigny, Pariscope
" Cette pièce de Pirandello interroge le spectateur sur le jeu de l’acteur grâce à de subtiles mises en abyme. La mise en scène d’Adel Hakim, portée par des comédiens survoltés, glisse de la plus délirante des comédies à la tragédie la plus sombre. " 20 Minutes
" Tout ici explose. D’abord, le tempérament des personnages : une famille Napolitaine qui crée le scandale dans la Sicile pudibonde du début du siècle dernier. Les trois filles de la famille La Croce, éclatantes de vie, fricotent avec des officiers, ce qui finira en drame passionnel. Ensuite Pirandello corse l’affaire. Il mêle au récit les rodomontades de la troupe d’acteurs qui interprètent les rôles. Le spectacle est partout : sur scène mais aussi dans la salle. Les comédiens se mêlent au public pour mieux le déstabiliser. On ressort de cette expérience peu ordinaire avec l’impression de s’être glissé dans les coulisses ou les répétitions dont nous sommes d’ordinaire exclus. Et d’avoir entendu l’une des pièces majeures du XX° siècle, d’où jaillit l’infini des possibilités théâtrales impliquant les acteurs, les personnages, le metteur en scène et … vous, cher public. " Sandrine Martinez, Le Parisien
" Tohu-bohu sicilien. Un spectacle mené avec une grande sûreté dans sa complexité baroque. C'est un tohu-bohu maîtrisé qui est ici composé, un baroque aux accents quotidiens et triviaux, un charivari de classes sociales, où se défient les uniformes blancs des officiers et les robes bleues des sœurs bourgeoises. La scénographie d'Yves Collet multiplie les ouvertures dans le décor. Quand la scène d'opéra surgit, l'on est, avec des costumes comiquement volumineux, en pleine démesure grotesque et en pleine satire. L'émotion n'en surgit pas moins, de façon soudaine et violente, grâce à un silence, à un maquillage différent. C'est un spectacle sur le théâtre qui a su utiliser au plus noble les roueries, les ridicules, le grandiose et la simplicité du théâtre. " Gilles Costaz, Les Echos
" La famille La Croce, les comédiens qui l'interprètent et leur metteur en scène vous invitent non seulement à découvrir un pan de leur vie mais aussi à mettre en question les fondements de la théâtralité dans une pièce à la fois enjouée et tragique. La mise en scène d'Adel Hakim tire le meilleur parti de ce magnifique texte, en présentant la pièce comme un spectacle de marionnettes manipulées à vue, subjuguant le public par la vérité du théâtre qui se dévoile sous ses yeux, ses rires, ses applaudissements. Natacha Koutchoumov interprète avec justesse et dextérité le rôle torturé et flamboyant de Mommina, apportant beaucoup d'émotion à sa partition. " Lucie Abrahamse, Revue spectacle
" Si l'audace et l'imagination sans bornes de Pirandello n'étaient pas servies par une troupe aussi talentueuse, la démarche ne pourrait aboutir à ce paroxysme. Le rythme, les couleurs, les décors, la musique nourrissent une dynamique qui ne nous laisse jamais en dehors. La scénographie, splendide, exploite remarquablement toutes les ressources scéniques imaginables, et provoque un saisissant contraste avec l'imprévisibilité du scénario. … La mise en scène tient ses promesses, et les comédiens nous entraînent avec maestria dans cet univers délicieusement irrationnel. " Khoi Nguyen, Regarde en coulisse
" Une œuvre profonde et caustique, occasion kaléidoscopique d'interrogation des postures et des situations où la forme et le fond se mêlent en une valse échevelée. Comme toujours lorsque s'accélère le rythme de la danse, il faut que celui qui la mène tienne fermement son partenaire : tel est le cas d'Adel Hakim, cavalier élégant et aguerri, qui fait tournoyer le public d'un geste sûr dans cet étonnant bastringue. La fantaisie règne avec assez d'éclat pour que le drame qu'elle prépare soit d'autant plus terrifiant. Procession délirante de l'insupportable et grotesque catholicisme latin qui cautionne tous les sacrifices sociaux, notamment celui des femmes, désopilant ballet d'un Trouvère obèse et maladroit, insolente scène de la guérison d'une rage de dents par effet miraculeux d'une croix aérienne et lumineuse : Adel Hakim s'autorise une jouissive ironie et une plaisante satire des orthodoxies stupides, qu'elles soient esthétiques ou religieuses. Cette complaisance hilarante à la farce prépare d'autant mieux le drame final où Rico Verri provoque la mort de sa femme à force de frustration et d'humiliation, en la privant de la consolation du chant. Belle et intelligente parabole que cette pièce alors, aussi efficace quand elle dévoile ses conditions de possibilité pour de faux que quand elle les assume pour de vrai ! " Catherine Robert, Theatreonline.com
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