Un Roméo et Juliette avec fin heureuse
Note de mise en scène
Note du chef d'orchestre
Opéra-bouffe en deux actes
Carolina et Paolino se sont mariés en secret et se préparent à l’avouer car ils ont trouvé, pour Elisetta, la sœur aînée de Carolina, un noble prétendant. Trois obstacles se dressent sur leur route : un père qui croit savoir mieux que ses filles où réside leur bien, un comte qui vibre davantage pour la cadette que pour celle qu’on lui destine, une tante qui se prend de vouloir épouser l’amant de sa nièce. S’en suit une série d’événements qui auraient dû envoyer Carolina au couvent si l’auteur du livret ne l’avait promise à une « fin » heureuse.
Après La Traviata pour la Scène nationale L’Apostrophe, Anne-Marie Lazarini monte en mars 2007 à l’Artistic Athévains (transformé en salle d’opéra pour plusieurs mois, avec sa fosse d’orchestre investie par Andrée-Claude Brayer et ses musiciens de l’Orchestre-Studio de Cergy-Pontoise) Le Mariage secret, opéra bouffe (melodrama giocoso) pour six chanteurs de Domenico Cimarosa, à la musique que Stendhal qualifiait d’enchanteresse.
Le livret du très célèbre Giovanni Bertati (1792) est une comédie aux minuscules aspérités, évoquant le meilleur de Goldoni ou Sheridan. Il raconte avec brio, dans un tourbillon joyeux d’événements et de quiproquos, que la contrainte a longtemps servi de système éducatif dont les jeunes gens ne parvenaient parfois à se libérer que par une union clandestine. Mais contrairement à Roméo et Juliette, le « happy end » sera préservé…
C’est au mois de mai 2005 que, répondant à l’invitation de L’Apostrophe, Scène nationale de Cergy-Pontoise, j’ai eu la joie de mettre en scène un premier opéra : La Traviata de Verdi.
Pas à pas, grâce à la complicité tissée au fil des répétitions avec Andrée-Claude Brayer, j’ai pu appréhender cet univers avec François Cabanat (scénographe) et Dominique Bourde (costumière), mes compagnons de création : de la petite salle du théâtre Artistic Athévains, où nous avons dans un premier temps travaillé avec les solistes, sur un plateau nu, de façon très intimiste, jusqu’à l’immense scène de L’Apostrophe où ils ont retrouvé choristes, instrumentistes…
L’« envie » précédait bien sûr cette invitation et l’aventure de La Traviata n’a fait que la réaffirmer : dès les premiers jours de travail il nous a semblé tout naturel que l’expérience se poursuivrait dès que possible en nos murs. Pas dans cette dimension, bien sûr, notre plateau ne pouvant accueillir une telle assemblée de chanteurs et de musiciens, mais dans une forme qui, même sur un espace plus réduit, laisserait à chacun – chef d’orchestre et metteur en scène – une liberté de création.
Andrée-Claude Brayer m’a confié le livret du Mariage secret de Cimarosa en février 2006 et il m’a tout de suite semblé que cet opéra répondait pour de multiples raisons à cette aspiration.
On n’a pas oublié que la première représentation du Mariage Secret fut un triomphe. Il n’y a pas d’autre exemple dans toute l’histoire de l’Opéra d’un bis qui reprend (sans autre repos que celui du temps d’un souper) la totalité de l’œuvre à la demande du commanditaire empereur. On ne sait aujourd’hui qui admirer le plus, des convives du Prince mélomane qui passèrent la nuit sous le charme incomparable de la musique de Domenico Cimarosa ou des chanteurs qui ne craignirent pas l’effort demandé à leurs voix !
Le livret très théâtral de Giovanni Bertati est sans doute pour beaucoup dans cet immense succès de l’année 1792 (cent dix représentations en cinq mois !). Il prend ses distances avec la forme un peu rigide des farces de la commedia dell’arte pour se rapprocher des meilleures comédies de Goldoni ou de Sheridan. L’opera seria mettait sur la scène des héros superficiels aux passions stéréotypées. L’opera buffa redescend sur terre et se rapproche de la réalité des humains, d’une vérité des sentiments et de la vie. Les spectateurs de l’époque seront subjugués par ce melodrama giocoso et s’enthousiasmeront de voir représenté quelque chose qui commence à ressembler à leur quotidien, des personnages et une intrigue moins prévisibles, même si la musique ravissante ne les incite pas à remarquer outre mesure les aspérités du texte.
Et c’est pourtant là que le metteur en scène de théâtre, s’emparant de cette mécanique parfaite et joyeuse, découvre les petits grains de sable qui vont rendre un peu plus rugueux qu’il n’y paraît au premier abord ce tourbillon d’événements et de quiproquos. Il est ici, contrairement à ce que suggère la musique si délicieuse à écouter, beaucoup plus question de contrats, de négociations et d’argent, d’autorité et de sujétion que d’amour, de passion ou de liberté.
On voit bien alors que cet opéra n’idéalise plus la nature dès lors qu’on prête attention au chagrin qui peine à s’exprimer, aux déceptions silencieuses que la société réserve aux femmes, enjeu de l’argent qui s’échange. Et c’est un jeu subtil entre la nécessaire fin heureuse (happy end !) que l’on attend (et que l’on aura !) et la dureté entr’aperçue d’une vie gouvernée par les intérêts et non par les sentiments.
Le travail de mise en scène prend sa place à cette intersection entre la somptueuse beauté de l’écriture musicale et les discordances que tente d’introduire, par touches minuscules, le dramaturge.
Anne-Marie Lazarini
Pourquoi cet opéra…Il n’est pas étonnant que notre choix, à Anne-Marie Lazarini et moi même, se soit porté sur cette œuvre remplie d’un humour tant théâtral que musical… Notre goût partagé pour une recherche d’authenticité trouve ici matière à s’exercer : il en sortira une version forte mais intime, laissant libre cours à l’improvisation et l’expressivité des chanteurs, aidés par une orchestration légère, aérienne, à l’écoute des situations scéniques les plus désopilantes… et du tableau virulent qu’elles dressent d’une époque « désenchantée ».
Une histoire exceptionnelle. Le 7 février 1792 est une date spéciale dans l’histoire du théâtre lyrique : deux mois après la mort de Mozart, au Burgtheater de Vienne, la création de l’opéra bouffe de Cimarosa Il Matrimonio segreto enthousiasma à ce point le public et l’empereur Léopold II, qui avait commandé l’œuvre, qu’après un souper servi aux artistes et au compositeur, on dut sur l’ordre exprès de Sa Majesté rejouer immédiatement l’opéra en entier… ! Le succès premier de cette œuvre ne se démentit jamais, puisque Le Mariage secret, seul opéra bouffe authentiquement italien qui survécut à son époque, n’a jamais quitté l’affiche depuis sa création…
Un double intérêt. Ce petit bijou porte le genre comique napolitain à un très haut niveau, s’apparentant ainsi davantage à Rossini qu’à Mozart. La mélodie pleine de charme, les vocalises très bien tournées, la jubilation des ensembles vocaux, le rythme endiablé du finale, la somptuosité des timbres, tous ces éléments contribuent à procurer au spectateur un plaisir inégalé et immédiat. La musique du Mariage secret, ainsi que pouvait l’écrire Stendhal au XIX e siècle, provoque, dès la première note, une réelle jouissance et emporte l’auditeur. La mécanique mise en place produit son effet, d’emblée nous séduit…
Lorsque Bertati sollicité par Cimarosa écrit le livret du Mariage secret, il est, ainsi que Cimarosa, au faîte de sa carrière, et s’est déjà rendu célèbre par de fort nombreux livrets d’opéras. Cet italien connaît les principes de l’opera buffa par cœur, il mettra son talent au service d’une série de quiproquos et d’événements « à la Goldoni » ; on y trouve une représentation piquante de la société de cette époque de la fin du XVIII e siècle, avec ses codes : six personnages sans arrêt en mouvement, le père, sa sœur, le jeune couple (fille aînée et commis du père) secrètement marié, le Comte et la fille cadette du père… un jeu permanent d’interactions, une succession de couples qui se font et se défont à toute vitesse, un chassé-croisé d’aventures burlesques… bref une mine d’or pour un metteur en scène de théâtre…
L’aventure d’une troupe…Chanteurs et instrumentistes seront quinze (six sur le plateau, neuf dans la fosse) mus par la même volonté de restituer l’ambiance d’une troupe, avec cette intimité si particulière qui naît de la fréquentation assidue d’un texte savoureux et d’une musique irrésistible sur une longue période de représentations. Prendre le temps de vivre l’aventure, et présenter ce défi au public, Anne-Marie Lazarini et le théâtre Artistic Athévains s’engagent à le faire, au milieu d’un monde surtout fait de productions éphémères et de grands spectacles uniques.
Une nouvelle naissance pour le chef d’œuvre de Cimarosa. La perspective d’en réaliser une version destinée à une formation de chambre qui soutiendrait les performances des six chanteurs est très enthousiasmante. Il s’agit certes d’adapter une partition écrite pour une formation Mozart traditionnelle (bois par deux, deux cors, deux trompettes, timbales et cordes) à un ensemble composé d’un quintette à cordes, d’un hautbois et d’un cor naturel, mais surtout de mettre en valeur une mise en scène incisive du livret de Bertati : la musique et le texte sont relus par deux regards croisés de notre temps portés sur une création du XVIII e siècle finissant.
Andrée-Claude Brayer
Acte I (Dans la maison de Geronimo, riche marchand de Bologne)
Scène 1 : Carolina, fille de Geronimo, supplie Paolino, jeune commis du marchand, d’avouer à son père qu'ils se sont mariés en secret. Paolino y consent car il vient de trouver un prétendant noble pour la sœur aînée de Carolina, Elisetta.
Scène 2 : Quand Geronimo arrive, Paolino lui donne la lettre de demande en mariage que le comte Robinson a écrite à une prétendante qu’il n’a pas encore vue. Fou de joie et de vanité, Geronimo lui dit espérer un mariage aussi avantageux pour sa fille cadette.
Scène 3 : Il annonce la nouvelle à ses filles et à sa sœur, Fidalma.
Scène 4 : Elisetta, pleine d'orgueil à l'idée de ce beau mariage, raille Carolina.
Scène 5 :Fidalma confie à Elisetta qu'elle compte elle aussi se remarier mais ne veut pas lui révéler encore le nom de celui qu'elle a choisi et qui n’est autre que Paolino.
Scène 6 : Geronimo annonce à Carolina qu’il lui a trouvé un chevalier et qu’il compte conclure le mariage le même jour.
Scènes 7 et 8 : Entre le comte. Geronimo et son commis le laissent en compagnie des trois femmes. En apprenant que sa promise est Elisetta, il ne peut cacher sa déception.
Scène 9 : Pressé par Carolina, Paolino se décide à parler à Geronimo.
Scène 10 : C’est alors que Robinson révèle au jeune homme qu'il est tombé amoureux de la sœur cadette et qu’il veut l'épouser.
Scène 11 : Il avoue ses sentiments à Carolina qui le repousse.
Scène 12 : Persuadé qu'elle a un amant, il décide de la surveiller.
Scène 13 : Elisetta se plaint à son père du manque d'empressement du comte à son égard. Geronimo lui recommande la patience…
Scènes 14 et 15 : …mais la jeune fille surprend Robinson faisant la cour à sa sœur et crie au scandale.
Scène 1 : Robinson rejoint le marchand et lui apprend qu'il ne veut pas d'Elisetta mais qu’il est prêt, pour sauver l’honneur, à épouser Carolina. Geronimo accepte.
Scènes 2 et 3 : En apprenant cela, Paolino, désespéré, cherche de l'aide auprès de Fidalma. Se méprenant sur ses intentions et croyant qu'il partage ses sentiments, celle-ci lui accorde sa main. Sous ce nouveau coup, Paolino s'évanouit.
Scène 4 : Arrive Carolina. Fidalma lui apprend son mariage avec Paolino.
Scènes 5 et 6 : Une fois sa tante partie, Carolina accable le jeune homme de reproches. Paolino parvient à dissiper le malentendu et lui propose de s'enfuir avec lui. Carolina hésite : ce serait couvrir de honte sa famille.
Scène 7 : Elisetta reproche à Robinson de se désintéresser d’elle.
Scène 8 : Furieuse contre lui, elle demande l'aide de sa tante… qui accepte car elle soupçonne les sentiments de Carolina pour Paolino.
Scène 9 : Lorsque Geronimo lui demande de renoncer à son mariage, Elisetta refuse, soutenue par Fidalma qui menace de partir avec tous ses biens.
Scènes 10 et 11 : Le père, par intérêt, se laisse convaincre de plutôt envoyer la cadette au couvent.
Scènes 12 et 13 : Bouleversée, Carolina demande au comte son appui. Par amour, il lui est totalement acquis.
Scène 14 : Mais au moment où elle va lui révéler son secret, sa famille survient et Geronimo ordonne au comte de tenir ses engagements.
Scène 15 : Fidalma et Elisetta se persuadent mutuellement que leur salut viendra de l’éloignement de Carolina, cet « objet de tous les désirs ».
Scène 16 : Geronimo ordonne à Paolino d’adresser une lettre au couvent et de commander les chevaux pour le lendemain.
Scène 17 : Le soir, Paolino va retrouver Carolina et parvient à la convaincre de fuir. Mais Elisetta, soupçonneuse, les entend chuchoter dans la chambre et croit le comte avec sa sœur.
Scène dernière : Elle alerte sa tante et son père qui font un tel bruit que Robinson sort de sa chambre, semant le doute… pourtant Elisetta soutient avoir entendu quelqu'un dans la chambre de sa sœur.
Découverts, Paolino et Carolina avouent à Geronimo qu'ils sont mariés depuis deux mois. Geronimo, appuyé par Fidalma furieuse et jalouse, veut les chasser. Le comte promet alors d’épouser Elisetta si Geronimo leur pardonne. Ce que fait Geronimo en ordonnant qu’on prépare les noces en grande pompe.
Je confirme entièrement les avis précédents : on ne s'ennuie pas une minute tant l'intrigue est est bien menée; le surtitrage permet aux non-italianophones de ne rien perdre de l'action; toutes les scènes s'enchainent allègrement; et le tout est servi par 8 musiciens excellents. Bref 2 heures de détente.
les chanteuses sont délicieusement douées, drôles, complices. Les chanteurs sont convaincants aussi. Vocalement, ce sont des petits bijoux qui s'enchaînent. L'orchestre épuré est exposé comme rarement, par le fait. Cet opéra est mis en voix et en scène avec finesse. Le silence a aussi sa place (aucune surcharge ou complication) dans cette tonique interprétation, d'un goût très sûr. Alors que le drame de certains duos ou trios se déroule, et avec justesse, la salle éclate de rire. Bravo vraiment !
Précipitez-vous !! Deux heures de grand bonheur !!Orchestre et chanteurs servent à merveille cette partition. De plus les chanteurs se révèlent aussi de très bons comédiens . Le sous-titrage permet de suivre plus aisément le déroulement de l'action. Si vs aimez l'art lyrique, ne manquez pas ce spectacle
Je confirme entièrement les avis précédents : on ne s'ennuie pas une minute tant l'intrigue est est bien menée; le surtitrage permet aux non-italianophones de ne rien perdre de l'action; toutes les scènes s'enchainent allègrement; et le tout est servi par 8 musiciens excellents. Bref 2 heures de détente.
les chanteuses sont délicieusement douées, drôles, complices. Les chanteurs sont convaincants aussi. Vocalement, ce sont des petits bijoux qui s'enchaînent. L'orchestre épuré est exposé comme rarement, par le fait. Cet opéra est mis en voix et en scène avec finesse. Le silence a aussi sa place (aucune surcharge ou complication) dans cette tonique interprétation, d'un goût très sûr. Alors que le drame de certains duos ou trios se déroule, et avec justesse, la salle éclate de rire. Bravo vraiment !
Précipitez-vous !! Deux heures de grand bonheur !!Orchestre et chanteurs servent à merveille cette partition. De plus les chanteurs se révèlent aussi de très bons comédiens . Le sous-titrage permet de suivre plus aisément le déroulement de l'action. Si vs aimez l'art lyrique, ne manquez pas ce spectacle
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