L'art de la comédie

du 28 avril au 14 mai 2006
1h45

L'art de la comédie

Il y a quarante ans, la rencontre entre le directeur d'une troupe de théâtre et un préfet dans quelque chef-lieu de province. Eduardo de Filippo soulève des questions bien familières aujourd'hui, où s'impose une vision mercantile de l'art et du théâtre. Pourtant, Eduardo de Filippo n'est pas un auteur engagé. Son oeuvre est “une corde folle”, comme la qualifiait Giorgio Strehler, d'une vibration irrégulière. Le théâtre comme désir de déjouer la mort.
  • Le désir de tromper la mort

Lors de la création de L'Art de la Comédie, en 1965, on accusa Eduardo De Filippo d'outrage à l'État ! Avec une belle ironie, il proposait une critique radicale du pouvoir et de ses relations avec la société, artistes compris. En imaginant, il y a quarante ans, la rencontre entre le directeur d'une troupe de théâtre et un préfet fraîchement nommé dans un quelconque chef-lieu de province, Eduardo De Filippo soulevait déjà de drôles de questions... Elles restent aujourd'hui d'une brûlante actualité en des temps où s'impose une vision aussi mercantile que sacralisée de l'art en général, du théâtre en particulier.

Pourtant, s'il vivait encore, Eduardo De Filippo s'amuserait fort qu'on le prenne sans rire et seulement pour un auteur engagé. Son œuvre est toute d'aventure, “une corde folle” comme Strehler aimait la qualifier, d'une vibration particulière, irrégulière à l'image de l'art populaire et savant de ses origines napolitaines. En dépit des apparences, loin de la simple représentation “pirandellienne” du “théâtre dans le théâtre”, Eduardo De Filippo dans chacune de ses œuvres dit et redit probablement l'essentiel : le théâtre, c'est le désir de déjouer, de tromper la mort.

Marie Vayssière

Par La Compagnie du Singulier. Texte français de Huguette Hatem.

  • Le statut du théâtre dans la société

Il a l'air un peu perdu d'un petit garçon abandonné. Auprès de lui, son chef de cabinet s'efforce de le rassurer. On a du mal à croire que cet homme inquiet est un nouveau préfet récemment débarqué dans cette petite ville d'Italie où il doit prendre ses fonctions. C'est son premier jour et il n'en mène pas large. Il vient de passer une nuit épouvantable. Tandis qu'il boutonne maladroitement sa chemise et finit de nouer sa cravate, débarque un intrus qui n'a même pas pris rendez-vous. Il s'agit d'un directeur de troupe de théâtre venu présenter au nouvel arrivant une requête. C'est dans cette ambiance mi-figue mi-raisin que s'ouvre L'Art de la comédie du dramaturge, comédien et metteur en scène italien Eduardo De Filippo (1900-1984) dans la mise en scène qu'en donne Marie Vayssière.

Même si on a pu voir plusieurs de ses pièces en France, dont La Grande Magie magistralement montée par Giorgio Strehler, Eduardo De Filippo reste un auteur assez peu joué dans notre pays. « On l'a par erreur cantonné à Naples, sa ville natale, et considéré comme un auteur régional du fait que beaucoup de ses pièces sont écrites en dialecte napolitain, remarque Marie Vayssière. Pour ma part, je me souviens de l'avoir vu jouer dans des films de Toto, son visage m'avait séduite. Il avait une tête magnifique. Lors d'un atelier à l'école du Théâtre national de Bretagne, j'ai fait travailler les élèves sur ses textes. Du coup, j'ai eu très envie de m'attaquer à une mise en scène. »

L'Art de la comédie date de 1964, mais la pièce expose des préoccupations tout à fait contemporaines puisqu'elle aborde avec une ironie féroce la question du statut des comédiens, du théâtre dans la société, de son utilité et de ses rapports avec le pouvoir. « À cet égard, la pièce est d'une actualité presque gênante », commente Marie Vayssière. En effet, un dialogue s'instaure assez vite entre le préfet un peu constipé et le directeur de troupe. Cela non sans une certaine bienveillance de la part du représentant de l'état, lequel estime que, certes, « les acteurs en général sont des extravagants, des originaux un peu fous mais de braves gens, le temps qu'ils vous font perdre, ils vous le rendent en bonne humeur ». D'ailleurs, il a lui-même caressé dans sa jeunesse le rêve de devenir comédien.

Voilà donc, entre les deux hommes, débattue la vaste question de la crise du théâtre. Eduardo De Filippo ne peut s'empêcher de mettre dans la bouche du préfet une critique des auteurs contemporains qui n'ont, bien sûr, plus rien à dire... Argument savoureux de la part d'un écrivain prolixe né dans le milieu du théâtre. Son père n'était autre, en effet, que le grand Eduardo Scarpetta, comédien et chef de troupe célèbre en son temps, mais dont De Filippo était pour son malheur le fils illégitime. Dès l'adolescence, il fuit la maison paternelle pour chercher sa voie. Il exercera de nombreux petits métiers liés au spectacle et excellera bientôt dans l'art du Varietà - ces représentations très courtes souvent données dans des salles de cinéma en première partie des films et qui inspirèrent beaucoup Fellini, grand admirateur de De Filippo.

De cordiale, assez vite, la discussion devient tendue et même conflictuelle. Le préfet n'oublie pas qu'il est le représentant de l'ordre et du pouvoir. Mais le directeur de troupe malicieux le menace, alors qu'on le flanque dehors manu militari, d'envoyer au fonctionnaire ses propres comédiens au lieu des rendez-vous prévus dans son emploi du temps. L'autre, dont on a déjà pu remarquer la fragilité au début de la pièce, s'angoisse ferme. Et la suite de sa journée vire à la paranoïa aiguë. « La ruse, le mensonge, la duplicité, liés à l'art du théâtre, sont des ingrédients qui passionnent Eduardo De Filippo », analyse Marie Vayssière qui fait son miel de cette ironie ravageuse à même de déclencher une folie générale sur le plateau.

Comédienne, proche de Tadeusz Kantor, elle s'intéresse aussi depuis quelques années à la mise en scène en montant des textes souvent non dramatiques comme Le Pleure Misère d'après Flann O'Brien, En passant d'après Ainsi parlait Zarathoustra ou encore Il faut faire plaisir aux clients d'après Rabelais. Comme chez ce dernier, elle retrouve avec De Filippo cet esprit de dérision salvateur, sauf que chez l'Italien le rire prend parfois une tournure inquiétante : « J'ai énormément ri en lisant L'Art de la comédie. Mais, assez vite, sous ce rire franc affleure un trouble, une discordance. La fable, de drôle, devient tragique. Et ce qui est fascinant dans ce dérèglement, c'est la façon dont l'acteur ridicule, dangereux, fantastique, renverse les rôles, les codes, les identités, les sexes et l'ordre du temps. »

Sélection d’avis du public

on s'ennuie du début à la fin Par Patrick B. - 18 février 2016 à 16h29

Attiré par une crtique dithyrambique j'ai rapidement déchanté et me suis horriblement ennuyé à suivre ce spectacle mal mis en scène, triste et sombre. De plus c'est mal joué avec des excès (acteurs courant en tous sens, hemmoragie de marrons chauds) même pas comiques. A fuir absolument.

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on s'ennuie du début à la fin Par Patrick B. (3 avis) - 18 février 2016 à 16h29

Attiré par une crtique dithyrambique j'ai rapidement déchanté et me suis horriblement ennuyé à suivre ce spectacle mal mis en scène, triste et sombre. De plus c'est mal joué avec des excès (acteurs courant en tous sens, hemmoragie de marrons chauds) même pas comiques. A fuir absolument.

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Théâtre de la Bastille

76, rue de la Roquette 75011 Paris

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  • Bus : Commandant Lamy à 2 m, Basfroi à 243 m, Charonne - Keller à 244 m, Voltaire - Léon Blum à 384 m
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Théâtre de la Bastille
76, rue de la Roquette 75011 Paris
Spectacle terminé depuis le dimanche 14 mai 2006

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