"J'ai toujours vu des auteurs sans le sou mais un éditeur sous le pont, jamais."
La face cachée de Céline
Ce qu'ils en pensent
Extrait
Une volonté
Ferdinand est un auteur inlassablement attaqué pour ses prises de positions personnelles, et critiqué pour ses trouvailles stylistiques, qui ont bousculé le monde littéraire. Pour rompre avec cette image publique "d'auteur maudit" son éditeur, Gaston, lui demande de se faire interviewer par l'un de ses pairs, selon les méthodes publicitaires actuelles.
Après beaucoup d'hésitations, rendez-vous est donné dans le métro. Ferdinand jouera-t-il le jeu "publicitaire" ou une fois de plus, égal à lui-même, donnera-t-il son avis tranché sur les gens, la société, les choses, son travail, le monde de l'édition... En adaptant théâtralement, avec sa verve et son talent de dramaturge, cette œuvre peu connue, Igor Futterer nous fait découvrir la face cachée de l'auteur qui, aujourd'hui encore, demeure l'un des plus controversés.
La Nord-Sud est une adaptation de Entretien avec le professeur Y de Louis-Ferdinand Céline, réalisée lors d'une résidence d'écriture à la "La Chartreuse" (Centre National des Ecritures du Spectacle) de Villeneuve lez Avignon en mai 2003.
"Il est vilain, il n'ira pas au paradis celui qui décède sans avoir réglé tous ses comptes." Almanach des Bons-Enfants
"Sans nous imposer leur époque, les deux personnages nous plongent dans l’univers des aléas de l’édition et nous emportent dans le tourbillon de leurs contrariétés désopilantes." Myrto Reiss, ThéâtreOnline, 2006
"Nous avons manqué le Goncourt, nous ne raterons pas la correctionnelle." Robert Denoël (sur les virulentes critiques concernant Mort à crédit)
"Céline est le poète de l'abjection." Jean d'Ormesson de l'Académie Française
"Le père Céline, on lui doit tout. Sans lui, aucun auteur actuel n'écrirait ou alors comme Duhamel. Mais là-dessus, personne ne moufte jamais. On n'admet pas." Michel Audiard, Mon petit livre rouge
PROFESSEUR Y -. Comment vous est venue l'idée de votre soi-disant nouveau style ?
FERDINAND - . Par le métro, colonel... Par le métro !
PROFESSEUR Y -. Comment ?
FERDINAND -. J'avais des hésitations...
PROFESSEUR Y -. Ah !
FERDINAND -. Vous m'avez pas écouté, je vous l'ai déjà dit ! Au moment de le prendre !
PROFESSEUR Y -. Quoi, le métro ?
FERDINAND -. Pas le métro ! Le Nord-Sud ! C'était le Nord-Sud en ce temps-là !
PROFESSEUR Y -. Et alors ?
FERDINAND -. Professeur, voyons ! Mon style rendu émotif… Pour être qu'une petite trouvaille, c'est entendu ! Elle ébranle quand même le roman d'une façon qu'il s'en relèvera pas ! Le Roman existe plus !
PROFESSEUR Y -. Il existe plus ?
FERDINAND -. Je m'exprime mal ! Je veux dire que les autres existent plus ! Les autres romanciers ! Tous ceux qu'ont pas encore appris à écrire en style émotif. Y a plus eu de nageurs à la brasse une fois le crawl découvert ! Y a plus eu de jour d'atelier possible, plus de "Radeau de la Méduse" possible, une fois le Déjeuner sur l'herbe ! Vous saisissez, professeur ? Les attardés s’en défendent, bien sûr ! Mille convulsions, méchants atoniques pas approchables !
PROFESSEUR Y -. Tiens donc…
FERDINAND -. Parfaitement, car je suis autrement plus brutal, moi ! Je capture toute l'émotion, toute l'émotion de la surface, et d'un seul coup, je la fourre dans le métro, mon métro ! Tous les autres écrivains sont morts, et ils s'en doutent pas ! Ils pourrissent à la surface, enbandelés dans leurs chromos, momies ! Privés d'émotion, leur compte est bon ! Vous prenez plus de notes ! Vous voulez retourner faire pipi ? Vous vous en foutez alors ?
PROFESSEUR Y -. Non ! Vous disiez donc le métro !
FERDINAND -. Oui le métro ! Le rail Emotif dans le métro !
"Quand vous avez à la fois le tragique et le rire, vous avez gagné... " Louis-Ferdinand Céline (à propos de Shakespeare)
La pièce La Nord-Sud porte bien son nom. Elle traverse de part en part le plateau. Du haut vers le bas. De la tête aux pieds. Du bas vers le haut. De la poussière vers la lumière. Le professeur Y et Ferdinand, deux hommes, deux auteurs que tout sépare, à commencer par le talent…Mais qu’est-ce que le talent ? Deux êtres humains sur un quai du métro. Assis sur un banc. Ombres parmi les silhouettes qui vont du point A au point B. Le dos au mur, face au vide.
La pièce La Nord-Sud est une pièce sur l’attente. Trou à la profondeur insondable comblé par des mots, encore des mots, toujours des mots. A chacun son trou. Celui de Ferdinand est plus profond que celui du professeur Y… Mais là réside le talent, la force d’un auteur de génie, à trop creuser, Ferdinand a fini par trouver quelque chose…
Contrairement aux autres, les deux hommes ne prennent pas le train de la vie en marche. Voyageurs solitaires, passagers à bord de leur destin, ils se laissent emporter par le flot des mots… Et le banc devient un bout de bois, une épave sur laquelle les deux hommes tentent de s’accrocher, de se rapprocher… La tempête est violente. Elle va de l’oreille droite à l’oreille gauche. Elle sort par la bouche en phrases cinglantes.
La Nord-Sud est une pièce sur la vie, tout simplement, son déroulement, sa trajectoire incertaine, son court trajet. Au bout du voyage, le terminus… Durant le voyage, quelques correspondances, et voilà tout. Avec les mots pour compagnons de route.
La pièce Nord-Sud se déroule sur un quai de métro. Lieu impersonnel. Endroit de passage aux murs de faïence. La couleur blanche des salles d’attente. Les deux hommes ont le dos au mur et le vide en face d’eux. Ils ne peuvent ni reculer, ni avancer. Ils sont plantés dans leur présent. Sans aucune échappatoire, l’affrontement sera redoutable. Ici, les mots seront gifles, coups de poing…
La mise en scène devra être dépouillée, à l’écoute, au service du dialogue. Une mise en scène tout en retenue pour mieux laisser entendre la puissance du texte. Une direction d’acteurs au plus près des comédiens pour que ceux-ci s’emparent du texte de l’auteur en douceur… Comme si ses mots avaient toujours été dans leurs têtes.
La puissance de la parole: le théâtre m'a toujours ennuyé. De Céline je n'ai lu que "voyage au bout de la nuit" et je n'ai pas été transcendé. Et voilà qu'arrive la Nord-Sud. Ferdinand-Farrugia qui nous agrippe avec sa puissance de l'expression. C'est la déferlante des mots, du plaisir des mots, qui cinglent, défilent, stoppent et redémarrent en quatrième vitesse... Et l'on est emporté , l'on rit, on tente de s'accrocher et on retombe dans ce flot salvateur... Antagonistes, impayables et complètement indissociables: Farrugia et Pilippot font merveille. Marcel Philippot étonne dans son jeu plus retenu qu'à l'habitude et incarne ce Professur Y à merveille. Igor Futterer qui signe ici l'adaptation et la mise en scène de Céline et nous livre un vrai spectacle populaire comme peuvent l'être un concert des Stooges ou de PJ Harvey ; ou encore un film comme les forbans de la nuit de Jules Dassin ou les infiltrés de Martin Scorsese. Bref du grand Art.
Un texte percutant et riche, servi pas les acteurs avec passion, émotion, force et justesse. Une vision à tout le moins sans complaisance de notre société. Celà donne envie de lire ou relire Celine, visionnaire,. Cette pièce a rencontré avec bonheur ma relecture récente du Loup des steppes, de Hermann Hesse. L'intimité de cette salle vous immerge dans le flot des mots. Du théâtre quoi ! Bravo !
La puissance de la parole: le théâtre m'a toujours ennuyé. De Céline je n'ai lu que "voyage au bout de la nuit" et je n'ai pas été transcendé. Et voilà qu'arrive la Nord-Sud. Ferdinand-Farrugia qui nous agrippe avec sa puissance de l'expression. C'est la déferlante des mots, du plaisir des mots, qui cinglent, défilent, stoppent et redémarrent en quatrième vitesse... Et l'on est emporté , l'on rit, on tente de s'accrocher et on retombe dans ce flot salvateur... Antagonistes, impayables et complètement indissociables: Farrugia et Pilippot font merveille. Marcel Philippot étonne dans son jeu plus retenu qu'à l'habitude et incarne ce Professur Y à merveille. Igor Futterer qui signe ici l'adaptation et la mise en scène de Céline et nous livre un vrai spectacle populaire comme peuvent l'être un concert des Stooges ou de PJ Harvey ; ou encore un film comme les forbans de la nuit de Jules Dassin ou les infiltrés de Martin Scorsese. Bref du grand Art.
Un texte percutant et riche, servi pas les acteurs avec passion, émotion, force et justesse. Une vision à tout le moins sans complaisance de notre société. Celà donne envie de lire ou relire Celine, visionnaire,. Cette pièce a rencontré avec bonheur ma relecture récente du Loup des steppes, de Hermann Hesse. L'intimité de cette salle vous immerge dans le flot des mots. Du théâtre quoi ! Bravo !
3, rue Clavel 75019 Paris